Sidon se réveille sur le sol dur et froid de sa chambre. Son corps est si douloureux qu'il doute de pouvoir bouger. Il ne sait plus combien de coups il a reçu. Il ne se souvient pas qu'ils se soient arrêtés de tomber sur son corps fragile. Sans doute a-t-il fini par tomber dans l'inconscience. Mais, dans ses jambes, des douleurs qu'il n'avait pas en s'évanouissant se réveillent, lui indiquant que ça n'a en rien arrêté son cousin. De ce qu'il lui semble en sentir, seul son visage a été à peu près épargné. Sans doute car le reste est plus aisé à cacher.
Son visage se tord, amplifiant sa douleur quand il essaie de se redresser. Une odeur étrange flotte dans la pièce. Une odeur qu'il n'a jamais sentie. Il tourne le visage vers sa coiffeuse, persuadé que quelque chose d'aussi agressif et déplaisant ne peut provenir que du mélange de ses cosmétiques renversés. Mais la senteur, qui lui semble plus désagréable à mesure que se lève le soleil qui pénètre dans sa chambre, ne provient pas de là. Il se souvient que des serviteurs ont nettoyé les traces de sa colère avant le dîner.
Aussi commence-t-il à regarder autour de lui pour chercher la source de cette puanteur qui va croissante. Et il reste pétrifié de ce qu'il trouve. A quelques mètres de lui, le corps de sa mère est resté étendu là, dans son sang absorbé par ses vêtements et le sable sur le sol.
Un cri l'étrangle, et il se rapproche d'elle, tant bien que mal, son corps hurlant son refus de se déplacer, et son cœur et son esprit hurlant celui de sa mort. Il claudique sans réussir à se redresser, tombant aux côtés du corps sans vie.
Il veut la serrer contre lui, mais le corps froid refuse de bouger, alors qu'il pleure en l'appelant, comme si ses plaintes pouvaient la faire revenir. Malgré la rigidité du cadavre, il parvient à tirer sa mère dans ses bras, versant ses larmes dans ses cheveux qui ont perdu leur douceur et leur belle couleur d'argent, au profit d'un rouge terne et cassant. Une odeur de sang et de métal emplit ses narines, reconnaissable à présent qu'il en a trouvé la source.
Il reste ainsi, le temps s'écoulant sans avoir de prise sur lui. Il ignore combien de temps il reste comme ça et il s'en moque. Son seul regret est que Günter n'ait pas désobéit à son père, que son corps trop fragile pour défendre sa mère ait résisté aux coups portés. Il voudrait être mort.
Il finit par tomber d'épuisement, son corps vidé du peu de forces qu'il renfermait.
Quand il reprend conscience, comme un lointain écho, les derniers mots de sa mère résonnent dans son esprit. Les plantes et les cartes. Le sang des Hommes du Désert.
Il redresse la tête, les pièces d'un puzzle s'assemblant sous ses yeux, les mots de sa mère révélant leur message. Elle lui a enseigné à survivre, elle, Fille des Hommes du Désert. Et s'il veut récupérer son trône, celui qui lui revient de droit, il doit partir.
Il se redresse, mais entre les courbatures et son corps abîmé, il ne retient que mal un gémissement de douleur, et s'écroule alors que des larmes lui montent aux yeux.
_ La folie de cet homme n'a donc aucune limite.
Surpris d'entendre une voix, Sidon fait volte-face, mais le regrette dans l'instant, la douleur le prenant tant qu'il en ferme les yeux avant de les rouvrir sur elle.
_ Mesol... Ma mère... La Reine...
Il sent une main saisir son bras, et il fait remonter ses yeux sur le bras du vieil homme, jusqu'à son visage, lequel lui tire un hoquet d'effarement et de peur. Sur le visage dont il n'a jamais vu que les rides, la seule chose qu'il voit à présent sont les traces des coups que l'herboriste a lui aussi reçu.
_ Relevez-vous, mon Prince. Vous ne pouvez pas rester ici.
_ Je n'ai pas la force de bouger. » laisse-t-il les larmes couler sur le corps qui refroidit à chaque instant, malgré les rayons du soleil de plus en plus haut et plus chauds.
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La Vengeance d'un Oméga [Terminée]
RomanceAprès avoir vu sa mère être assassinée sous ses yeux, Sidon, le Prince de Ruhne, décide de fuir son royaume et de chercher de l'aide auprès de Keril, le Roi de Kaspaz, avec lequel son pays est en guerre depuis plus de vingt ans. Omégaverse médiévale