XLI

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— En tout cas, sachez que vous avez la possibilité de changer d'avis jusqu'à vingt-quatre semaines de grossesse. Ça vous laisse un peu de temps pour réfléchir. Si vous avez des questions ou juste besoin de vous parler, n'hésitez pas.
— Merci beaucoup.
— C'est normal. Passer une bonne journée.
— Merci à vous aussi.

Je sortis de la salle. Il me fallait quelque secondes avant de rejoindre. Je ne savais ce que j'avais fait, ni pourquoi, mais je l'avais quand même. Je ne comprenais pas moi-même pourquoi je n'avais pas interrompu cette grossesse. Ça allait contre tout ce que j'avais balancé à Nino un peu plus tôt. Je ne savais pas si je voulais de cet enfant. Je n'avais que dix-huit. C'était tellement prématuré. Ma vie prenait un nouveau tournant.

Après avoir pris un temps pour calmer ma tête en fusion, je me dirigeai vers la salle d'attente où Nino m'attendait. En me voyant, il se leva et me prit dans ses bras. Je lui redonnai son câlin.

— Ça va ?
— Oui.
— Tu veux qu'on aille manger un tacos ?
— On peut le manger chez toi ?
— Tout ce que tu veux Bella.

Je posai mes lèvres sur les siennes. Il était juste à croquer. Qu'il soit aussi compréhensif, alors qu'il était contre depuis le début, c'était juste waouh.

Il passa une main autour de ma taille et nous sortîmes de l'hôpital. Nous montâmes dans sa voiture et il nous conduisit jusqu'à son appartement. Aucun de nous ne parla. Je devais le lui dire. Il le fallait. Mais, je ne savais pas comment le lui annoncer. Au fond de moi, après réflexion, je pensai qu'en vérité, j'avais surtout peur de m'annoncer à moi-même mon choix. Je ne l'assumais pas encore complètement.

Il nous conduit jusqu'à son appartement. Dans le silence. Personne ne parlait. Pourquoi ? Je ne savais pas. Je n'en avais pas envie. J'avais besoins de réaliser dans quoi je m'embarquais. J'allais avoir un enfant. Moi, Roza Muñoz, ou plutôt Del Castillo. À seulement dix-huit ans. J'allais devenir maman. De mon point de vue, cet enfant était une grosse erreur, un problème que je ne pouvais régler. Une grosse anomalie sur le chemin que je m'étais tracée. Comment allait évoluer ma vie ? Mes études ? Est-ce que j'allais pouvoir retourner au Mexique ? J'avais beaucoup trop de questions et pas assez de réponses.

Nous arrivâmes finalement à son parking souterrain. Il se gara. Toujours dans le silence. Nous sortîmes de la voiture et nous montâmes dans l'ascenseur qui nous emmena devant sa porte. Il l'ouvrit.

— Tu veux prendre une douche ?
— Mmh.
— Je vais commander en attendant.
— Ok.

Je me dirigeai vers la salle de bain, le laissant seule dans l'entrée. J'entrai dans la baignoire et actionnai l'eau. L'eau chaude qui dégoulinait le long de mon corps me fit le plus grand bien. Je me lavai et sortis. En m'habillant, je ne pus m'empêcher de regarder mon ventre dans le miroir. Il était plat. Il n'y avait qu'un petit amas de graisse. Mais, dans quelques mois, il serait beaucoup plus gros et rond. Il fallait que je lui dise. Maintenant. Je m'habillai et sortis en m'élançant déterminé vers le salon. Je le trouvais assis sur le canapé avec un sac rempli de tacos en face de lui. La révélation attendra.

— Tu as faim ?
— Je suis affamée.
— Attend, je t'apporte une assiette.

Je n'attendis pas qu'il revienne pour commencer. Je rêvais de ces tacos depuis un bon moment déjà. Il revint quelques secondes plus tard avec les assiettes. Il s'assit en face de moi et commença à manger.

— Comment tu te sens ?
— Bien.
— Comment ça s'est passé ? Ils t'ont anesthésiée.

C'était le moment. Le moment de lui annoncer. Je posai mon tacos dans l'assiette. Je soufflai un bon coup. Pour me donner du courage. Pour ne pas laisser mes émotions prendre le dessus.

Les épines du désespoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant