22 | Sortilège de douceur

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Drago, les mains tremblantes, était allongé sur son lit, la tête enfouie dans un coussin et le corps secoué de spasmes. Qu'avait-il fait ? Là-haut, au sommet de la tour d'astronomie, le vieux directeur de Poudlard venait de perdre la vie.

Et il regrettait. Non, pas la mort de ce vieux fou, non. Mais de ne pas avoir eu le courage de simplement refuser. D'être Mangemort. Qu'aurait-il risqué après tout ? Il n'était pas le seul à vouloir fuir le règne du Lord, les rebelles n'étaient pas en manque, alors pourquoi il n'avait pas refusé ? Certes, il était à Serpentard, et non à Gryffondor, mais les serpents n'avaient donc pas la réputation d'être égoïstes et de penser à leur propre bonheur avant celui des autres ?

Le garçon leva la tête, inspirant une grande bouffée d'air avant de replonger la tête dans son coussin et de crier aussi fort qu'il pouvait, tentant d'évacuer toute cette frustration.

Car oui, Drago était frustré. D'avoir gâché le peu de chances qu'il avait de garder Ophelia à ses côtés, parce que maintenant il en était sur. Oui, maintenant que cet ignoble tatouage emprisonnait son bras, il savait qu'il lirait du dégoût dans son regard. Il savait que son cœur se briserait à la vue de ce regard dégoûté.

Et même si être Mangemort ne suffisait pas à la Serpentard pour le rejeter, il savait que son père ne le laisserait jamais la fréquenter. C'était ainsi, c'était interdit.

"Je t'avoue que je me fiche un peu de ces histoires d'ego et de fierté. Si j'ai besoin d'aide, je demande, et si on a besoin de mon aide, je répond."

Il l'avait entendue dire cette phrase à Daphné autour de leur table, le midi. Et bien que la phrase ne lui était pas directement adressée, il pensait qu'il en était aussi bénéficiaire. Elle l'avait furtivement regardé en prononçant ces mots - mais sincèrement il la fixait intensément depuis des minutes et ça la perturbait - alors il était concerné.

Ce serait peut-être la dernière fois qu'ils pourraient passer un moment seuls, tous les deux. Avant que les choses ne dégénèrent, il en profitait. En plus, elle venait toujours chercher sa compagnie en règle générale, alors là elle n'allait pas refuser. Un timide sourire en coin, il se dirigea vers la Salle Sur Demande.

La porte caractéristique de cette pièce fit son apparition et Drago la déverrouilla avec assurance. En entrant, il y vit Ophelia, allongée sur un lit double, entourée de coussins, une pile de livres à côté d'elle. Il détourna le regard un instant à la vue de sa tenue peu conventionnelle : un débardeur blanc peut-être trop serré et un short rouge qui lui arrivait à la mi-cuisse.

Mal à l'aise, il explora la pièce du regard. Des petites bougies flottaient çà et là, éclairant doucement la salle, des poufs et des fauteuils étaient disposés un peu partout. L'atmosphère était si chaleureuse, si conviviale, alors qu'une seule personne était présente : Lia. Cette jolie fille au charme si particulier : elle envoûtait par sa gentillesse et sa bienveillance.

Cette dernière, toujours assise sur le lit, le fixa intensément du regard, ayant levé la tête de son livre, attendait qu'il prenne la parole. Ils se s'étaient plus adressés un mot depuis la scène dans les toilettes abandonnées.

- Alors, hum, ça va Victoria ?

- Ophelia.

Elle lui avait répondu avec une voix sans âme. Une petite aiguille piqua le cœur du blond. Sauf que c'était lui qui tenait l'aiguille. Il pinça les lèvres et s'approcha de la brune. Assit à côté d'elle sur le lit, elle posa son livre, intriguée par le comportement du garçon. Celui-ci tira Lia à lui, et entoura sa taille de ses bras, avant de nicher sa tête dans son cou. Elle sentait bon, sa douce odeur emplissait les narines du blond.

D'abord surprise, elle se tendit, mais sentant de l'eau couler sur ses clavicules, ses muscles se relâchèrent et elle rendit affectueusement son étreinte au blond. Il avait été odieux la dernière fois qu'ils s'étaient parlés, mais tant pis, il avait besoin d'elle. À peine ses bras avaient entouré ses épaules que sa voix enrouée par les larmes brisa ce silence.

- Reste, s'il te plaît. Tu dois vraiment me prendre pour le roi des imbéciles, mais sincèrement, j'en ai rien à faire. Je pense que tu es le seul rayon de lumière qui n'a jamais vacillé durant ces six années, et je regrette, commença-t-il avant de marquer une pause. Je m'excuse du comportement que j'ai pu avoir et des paroles que j'ai prononcées. Je... Je tiens vraiment à toi. Même si mes actes montrent le contraire. Et j'ai besoin de toi.

Ophelia resta interdite devant le discours de Malefoy. Il venait vraiment de s'excuser ? Et puis, ses dernières paroles, c'était quoi ? Il était sous filtre d'amour ? Reculant un peu sa tête pour le regarder droit dans les yeux, elle croisa son regard d'argent. Elle essuya de son pouce la larme qui roulait sur sa joue et le tira à elle, les faisant s'allonger.

- Je resterais, Drago. Aussi longtemps qu'il faudra.

Sa tête contre le torse du blond, ses cheveux d'encre chatouillaient son nez. C'était irréalisable, incroyable. Il avait l'impression de baigner dans un océan de noirceur depuis le retour du Lord, mais avec elle... Avec elle, il arrivait à revoir la surface. Seulement pendant les moments où elle était en sa compagnie bien sur, mais ça suffisait à lui faire garder espoir.

Quant à elle, le pardon qu'elle avait si rapidement accordé à Malefoy ne s'expliquait pas. Juste pour lui et personne d'autre. Si ça avait été Seamus... Non, ça n'aurait pas pu, car leur amitié n'était pas profonde à ce point. Avec Drago, c'était autre chose.

Il lui ferait mal pourtant, il le savait ; il n'aurait aucun impact positif sur elle, et ça ne l'empêchait pas d'être égoïste, et de vouloir la garder. Pour lui.

Il sentait la chaleur de son corps, la douceur de sa peau, le parfum de ses habits, toujours allongé contre elle. Il redressa un peu la tête et parsema le cou d'Ophelia des petits baisers, remontant lentement jusqu'à ses lèvres.

Elle serra un peu plus encore Drago contre elle, laissant son contact chaud l'apaiser. C'était si agréable, juste eux, leur bulle, sans rien ni personne d'autre qu'eux. C'était comme ce jour de pluie, où ils avaient dansé, où ils s'étaient embrassés.

Ses douces lèvres sur les siennes.

Il voulait les sentir encore une fois. Alors il remonta le long de sa mâchoire, lentement, lui laissant le temps de refuser. Mais non, elle le laissa faire. Et enfin, après des mois, les lèvres de Drago rejoignirent celles d'Ophelia. C'était magique - parole de sorciers.

Le Temps témoigna des heures qu'ils passèrent enlacés, loin de tout mais proches l'un de l'autre.

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02.11.22

Je veux dormir.

Suzann. <3

Son regard - [D. Malefoy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant