33

212 27 19
                                    

Mélanie





































Quatre mois étaient passés et Marcus avait guéri de ses blessures. Il allait mieux, beaucoup mieux. Lorsque nos familles avaient appris ce qui s'était passé, elles avaient littéralement sauté de là où elles étaient pour atterrir dans cette chambre d'hôpital qui puait les médocs et le désinfectant. Tout le monde était venu pour prendre soin de lui. Moi, de mon côté, je le fuyais sans pour autant vraiment m'éloigner de lui. J'étais la cause principale de sa torture et pourtant il ne m'en voulait pas et ça me mettait hors de moi. Il était censé ne plus m'aimer, me détester mais au lieu de ça il avait l'air de m'aimer encore plus. Je n'arrive plus à rester près de lui, j'ai l'impression que si je le touche, il finira par se briser mais je ne veux pas non plus être loin de lui, pourtant il le faut.

Je termine le croquis que j'ai fait pour la prochaine collection et sors de mon bureau accompagnée de Fatou.
Nous sommes déjà au mois de décembre et il fait de plus en plus froid.

_Quand est-ce que tu vas arrêter de le fuir?

Je me retourne vers Fatou qui me regarde avec insistance. En vérité, je le fuis mais je ne veux pas l'admettre, le dire à voix haute serait comme affirmer que je ne le mérite pas.

_Je ne fuis pas. Je hausse les épaules.

_Mouais. Elle fait la moue.

_Franchement Mel, pourquoi tu te fais autant souffrir? Ce psychopathe n'est plus là pour te faire du mal alors pourquoi tu fais comme si ce n'était pas terminé?

_Terminé? Terminé? Je hausse le ton.

_Tu crois vraiment que c'est terminé? Tous les jours je revis la même chose, je le revois se faire découper, entailler par ce fou. Je revois son sang couler sur le sol, je le revois presque mort sur ce brancard, je revis chacun de ces instants douloureux et toi tu ose me dire que c'est terminé?

Des larmes venaient d'inonder mon visage. J'avais dit à voix haute ce qui se terrait au fond de moi. Mais ça ne m'a pas aidé, ces mots n'ont fait que me rappeler que c'était de ma faute. Tous ces instants repassaient dans ma tête et ils faisaient saigner mon cœur.

_Je vais te poser une seule et dernière question. Me dit Fatou.

_Est-ce que tu aime toujours David?

Est-ce que je l'aime toujours? Une partie de moi l'aimeras toujours, je le sais mais est-ce que je l'aime comme aux premiers jours, je ne pense pas. Il m'a fait tellement de mal et ce serait sûrement méchant de le dire mais je suis soulagée qu'il ne soit plus de ce monde. Mais en même temps, je regrette qu'il n'ait pas eu le temps de devenir une nouvelle personne. Je regrette de ne pas l'avoir fait changer, j'aurais voulu qu'il devienne un meilleur homme mais au lieu de l'aider, j'ai fuis. C'est tout ce que je sais faire, fuir. Et c'est comme ça que je m'enfuis pour ne pas répondre à la question de Fatou malgré ses appels. Je ne veux pas répondre à cette question, je n'y arrive pas, c'est trop dur.

Je prends une bonne douche bien brûlante avant de mettre deux pulls, de me couvrir avec un énorme plade et de lancer ma série. La sonnette me fait rapidement tourner la tête vers la porte d'entrée. Je me munie de mon rouleau à pâtisserie-on ne sait jamais-puis je vais ouvrir la porte et je tombe nez à nez avec Marcus.

Je le revois couvert de sang et inconscient dans cet entrepôt. Je le revois se faire planter un couteau dans la jambe, l'abdomen et les bras. Je le revois se faire charcuter, hurler de douleur et ne pas se réveiller. Je le revois au sol, près de la mort, loin de moi. Pourquoi? Pourquoi il a fallu qu'il tombe sur moi? Je suis un monstre! Il a failli mourir par ma faute!

_Salut. Il brise le silence.

_Salut...

_Je peux entrer?

Pourquoi tu t'accroches autant à moi Marcus? Pourquoi tu ne me laisse pas? J'ai envie de lui crier de s'en aller, de me laisser tranquille mais en même temps je veux qu'il me sert dans ses bras pour me réconforter. Alors je lui permet d'entrer et je m'installe avec lui dans le salon.



































Marcus


































Ses grands et beaux mais tristes yeux me regardent depuis quelques minutes maintenant. En venant ici, je n'avais pas vraiment d'ambition particulière, pas de discours, pas de cadeau, je voulais juste la voir. Ces derniers temps on ne s'est pas vus parce qu'elle était "occupée" mais je sais qu'elle m'a menti. Je ne suis pas venu pour lui demander des explications même si ça me dérange de ne pas savoir pourquoi elle m'évite. Je suis juste venu pour la réconforter. Je sais ce qu'elle pense, ressent.

La façon dont nous sommes éloignés me donne froid alors je lui montre mes genoux. Elle est un peu réticente au début mais finit par se rapprocher pour se mettre près de moi sur le canapé.

Elle veut que je la tape?

Je la prend et la dépose sur mes genoux avant de l'enlacer doucement. Elle se crispe puis petit à petit se détend et me serre fort dans ses bras.

_Désolée. Elle murmure dans mon cou.

_Tu n'as pas à être désolée, ce n'est pas de ta faute. Je relève sa tête et lui fait un bisou sur la joue.

_Mais c'est de ma faute, si je ne l'avais pas rencontré et si je n'étais-

Je la coupe en posant mes lèvres sur les siennes. Je n'aime pas quand elle se met à culpabiliser alors que ce n'est pas de sa faute.

_Si tu dis encore une fois que c'est de ta faute, je t'embrasse.

_Mais-

Je lui fait un bisou.

_Mais-

Je lui refais un bisou.

_C'est bon j'ai compris. Mais j'ai besoin... de...

_Tu as besoin de temps. Je complète pour elle.

Elle hoche la tête tout en regardant ses doigts qu'elle triture.

_J'ai besoin de temps, seule. Elle relève la tête vers moi.

Seule? Sans moi? Je comprends qu'elle ait besoin de temps mais moi, c'est d'elle que j'ai besoin...

_Ne fais pas cette tête, je ne vais pas disparaître de la surface de la terre.

_Je comprends ton choix et je te laisserais le temps qu'il faudra. Je lui sourit.

Elle dépose un baiser sur mes lèvres et me chuchote un merci avant de m'embrasser avec un peu plus d'ardeur. Ses mains descendent sur mon torse et lorsque je sens qu'elle soulève mon pull, j'use de mes dernières forces pour l'arrêter. Elle baisse la tête et descend de mes genoux.

_Melanie... je veux d'abord t'honorer avant de passer ce cap. Je dit en lui prenant les deux mains.

Elle me regarde avec les yeux scintillants puis elle me fait un gros câlin.

_Tu es vraiment un amour.

_Ton amour.

Un Simple dîner...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant