Chapitre 16

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CHAPITRE 16

Plat

『 Mycroft』

— Entrez, accordé-je.

Je suis surpris de voir se présenter le frère de Gail, l'air grave.

— Monsieur, j'ai vraiment besoin de vous parler.

Cette fois, je suis plutôt intrigué, car Fletcher est toujours un peu familier dans ses propos. Là, on voit qu'il s'est longuement préparé avant de venir dans ce bureau. Je l'invite à s'asseoir. Il prend toutes ses précautions pour fermer la porte avant, en s'assurant que nous sommes bien à l'abri des oreilles indiscrètes.

Il est vraiment préoccupé, il est en grande souffrance. J'anticipe toutes les raisons qui le pousse à agir de la sorte. Les pires me traversent l'esprit.

— J'ai hésité à le faire, mais je n'en peux plus, retient-il ses larmes.

— Quoiqu'il se passe, Fletcher, il n'est rien que je puisse faire. Ça ne coûte rien de demander, en tout cas, pas pour toi.

— C'est un peu ce que Sherlock m'a conseillé de faire aussi, admet-il en souriant très brièvement. C'est grâce à lui que je suis là, il m'a convaincu.

— C'est au sujet de ton cœur ? m'inquiété-je ne premier lieu.

J'ignore pourquoi j'ai dit cela, pourquoi c'est ce détail qui devient récurrent dans mon esprit. Je me demande si ce n'est pas pour paraître avenant et le pousser à en venir aux faits.

— Quoi ? Non, non ! s'oppose-t-il. C'est bien plus important. Il s'agit de Gail.

— Je t'écoute.

Là, c'est moi qui semble le surprendre. Que croit-il ? Que je m'en moque ? Gail prend de plus en plus de place dans ma vie. Dans mon quotidien, dans mon esprit...

— Vous avez certainement remarqué qu'elle avait changé, ces derniers temps.

— Il semblerait que c'est ce qui arrive quand on commence à fréquenter quelqu'un, dis-je avec amertume. Sa petite histoire avec ce... Colin Lortie doit lui tourner la tête.

J'ai failli vomir ce nom. Haïr cet homme, ce petit être si insignifiant que je pourrais le tuer de mes mains si je le voulais. Oui, si je le voulais, j'insiste ! Car je le peux. Il me suffirait de tirer sur une ou deux ficelles, faire chanter les bonnes personnes et... Hop, bon vent, Colin ! Mon fournisseur de matériel informatique privé (et donc, pour le monde entier) a déjà effacé son ex de la surface de la planète. Une histoire de trahison, de vol de prototype... Enfin, quelque chose qu'il avait mérité, probablement.

Or, moi, quel est mon motif ? La jalousie mal placée ? Je doute que ce soit parfaitement légitime, même pour moi.

Depuis ma dernière grande réunion, j'ai surpris cet homme se ventousant à ma majordome. Elle semblait éteinte, mais si proche malgré son éternelle réserve. Quand j'ai vu un baiser furtif se glisser sur sa nuque, sa façon à elle d'être surprise. Mes mains se sont crispées. Puis, il y a eu les appels, les sorties, les congés imprévus...

Je hais ce Colin Lortie.

— Laissez-moi vous apprendre quelque chose, monsieur, dit Fletcher sans détour. Quand on vit une histoire avec quelqu'un, on se sent heureux, épanoui, parfois même euphorique ! Vous la trouvez euphorique, vous ? Ou même épanouie ?

— Je reconnais que depuis quelques semaines, elle est éteinte.

— C'est la faute de Colin !

— En réalité, Fletcher, tu dois faire fausse route. J'ai remarqué que c'était encore pire ces derniers jours ? Je pense que le responsable, c'est moi.

Cœur Coquelicot [GxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant