⋆ 𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟒

69 11 35
                                    

     Ambre s'émerveillait des rues du centre-ville. Les rayons du soleil matinal sur les quais au bord de l'Ill rendaient cette promenade idyllique. Elle se pâmait pour chaque bâtiment, ce qui étonnait Dougal. Né à Strasbourg, il avait vécu presque toute son existence ici, il ne passait guère de temps à observer les traditionnelles maisons à colombages. Il reconnaissait, néanmoins, le charme particulier de sa région. Alors, tandis qu'Ambre n'avait d'yeux que pour les bâtisses et la rivière, Dougal n'avait d'yeux que pour elle. Il la trouvait ravissante, mais ne comprenait pas pourquoi lui, il lui plaisait. Même s'il donnait parfois l'impression d'être sûr de lui, Dougal manquait cruellement de confiance en lui et jusqu'ici, la vie ne lui avait pas appris à s'aimer.

     Les deux amis arrivèrent dans un café chaleureux, idéal pour prendre le petit-déjeuner. Quelques passants et cyclistes longeaient la rue. Dougal proposa de s'installer en terrasse, où il n'y avait qu'un couple et une femme d'affaires qui jonglait entre son ordinateur et son téléphone.

Ils eurent tout juste le temps de s'asseoir que la serveuse se présenta à eux. Guère âgée, elle portait une coupe de cheveux à la garçonne et des créoles pendaient à ses lobes. Elle laissa apparaître un sourire radieux face à Dougal. Ambre fronça les sourcils et assista à leur conversation, les bras croisés sur sa poitrine.

     — Oh, ça alors, Dougal ! Je t'avais pas reconnu. Ça geht ? s'exclama la serveuse d'un fort accent alsacien.

     — Oui... J'ignorais que tu travaillais ici.

     — J'ai un mi-temps depuis cet été, et toi alors ? Toujours en arts du spectacle ?

     Dougal répondit par la positive, précisant qu'il s'agissait de sa dernière année de Master. Ambre roula des yeux, embarrassée de ne pas avoir été présentée. Son ventre grognait, alors que la jeune femme n'avait même pas enregistré leur commande. Les gargouillements furent si bruyants que les deux Alsaciens se tournèrent vers elle. Son visage se crispa et Dougal s'excusa, retrouvant ses manières.

     — Euh, Ambre, je te présente Michèle. Elle était en première année avec moi. Et Michèle, voici Ambre, euh ma... une... bredouilla-t-il.

     — Enchantée, Michèle, coupa l'étudiante, mal à l'aise.

     — Bon, je prends votre commande ou bien ?

     Les deux amis demandèrent chacun un café et Ambre se laissa tenter par une tranche de Kougelhopf. Et ils restèrent silencieux. Le regard de Dougal se perdit dans le vide, ses ongles pinçaient la peau de ses poignets sous la table. Ambre garda les bras croisés et le retour de Michèle ne détendit pas l'atmosphère.

Elle jeta un coup d'œil à Dougal en goûtant son double expresso, elle lut la gêne sur son visage. Il semblait fermé à la conversation alors, mine de rien, elle évoqua sa brioche qu'elle trouvait bonne et son envie de visiter davantage le centre-ville. Dougal ne refusa pas d'allonger leur promenade, mais la prévint qu'il devait se rendre à l'université dans l'après-midi. Ambre tiqua ; elle aurait aimé l'avoir pour elle seule toute la journée.

     Lorsqu'ils eurent terminé de se restaurer, Dougal paya l'addition et Ambre ajouta discrètement un pourboire dans la coupelle. Elle ne voulait pas le mettre mal à l'aise, mais ses parents lui répétaient sans cesse d'en laisser.

     Dougal continua sa visite guidée, ils firent le tour du quartier de la Petite France, passèrent devant la fontaine de Janus puis se perdirent dans Notre Dame de Strasbourg. Ambre prenait des vidéos, des photos et également quelques selfies avec son ami. Elle bluffa en disant qu'elle les enverrait à Stephen, mais elle voulait surtout les garder précieusement pour elle.

Les fleurs renaissent au printempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant