Les fleurs renaissent au printemps

⋆ 𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒𝟔

      La soirée battait son plein depuis plus de deux heures. Ambre était heureuse de retrouver ses amis pour fêter les vingt-et-un ans de Stephen. Il n'avait pas lésiné sur l'organisation de son anniversaire pour combler ses convives. Les invités étaient en grand nombre, certains n'étaient que des connaissances, d'autres des anciens camarades perdus de vue, mais il tenait à leur offrir un souvenir inoubliable de sa personne.

     Ambre était assise face au bâtiment. Elle écoutait attentivement Zoely parler, en tirant quelques bouffées de son joint. Le temps était doux, bien que l'averse en début de soirée ait rafraîchi l'extérieur. L'air de la campagne changeait, Ambre se sentait ressourcée dans la résidence des Vuillemin.

Cette ancienne ferme avait été rénové en un gîte d'un côté et une maison familiale de l'autre. Le terrain à l'arrière était vaste, presque trois hectares de nature. Il se trouvait quantité d'arbres fruitiers et de plantations et, tout au bout, un coin semblable à une forêt miniature, traversée par un ruisseau.

À proximité, le père de Stephen avait fait creuser une piscine biologique, comprenant un bassin de baignade et une zone dans laquelle vivait tout un écosystème. Ce genre d'installation peu commune et l'accès au terrain fleuri attiraient davantage d'hôtes. Ambre se sentait en harmonie avec ce coin de paradis, si elle avait pu passer son enfance dans un tel endroit, jamais elle n'aurait quitté la campagne.

     Zoely expira la fumée de sa cigarette mentholée. Ce soir, elle se laissait aller, s'autorisant plus d'alcool qu'en temps normal et une ou deux cigarettes.

Les deux étudiantes étaient souriantes désormais, mais lorsqu'elles avaient quitté la salle, elles étaient en pleurs. Nicolas avait eu le malheur d'évoquer Toronto, ce qui avait provoqué un déchirement dans le cœur d'Ambre et son amie ressentit la même chose. Elle n'avait que peu pensé à ce départ qui la séparerait de ses proches. Cependant, le couple ne quittait pas la France le lendemain, ni même dans les mois à venir, alors les filles se réconfortèrent mutuellement et la sérénité revint.

     La porte du bâtiment s'ouvrit, libérant la musique ainsi que Nicolas, qui s'approcha. Le tournoi de beer-pong ayant pris fin, les convives souhaitaient débuter un nouveau jeu. Ainsi, Zoely rentra avec son petit ami, laissant Ambre, seule. Elle avait envie de marcher dans la pénombre et humer l'odeur de la nature.

     Depuis son arrivée, elle n'avait su comment se comporter avec Paolo. La présence de Nina l'inquiétait. Elle et Zoely ignoraient encore le rapprochement des anciens colocataires. Alors, elle gardait ses distances avec son ami et le retrouverait en fin de soirée.

Ambre avança vers un cabanon, l'obscurité l'empêchait de voir l'intérieur. Du matériel de jardinage, sans doute, mais elle imagina un scénario digne d'un vieux film d'horreur. Si la famille de Stephen était végétarienne, peut-être ne mangeait-elle que de la chair humaine ? Tenir un gîte semblait la couverture parfaite pour faire ses courses. Elle rit à sa propre idée. Elle continua sur un chemin de pierres. Un craquement la fit sursauter. Elle se retourna vivement pour faire face à l'ombre qui approchait. La flamme de son briquet l'aida à mettre un visage sur cette silhouette.

     — Je t'ai fait peur ? se moqua Stephen.

     — Un peu, oui ! Ta famille de cannibales ne me rassure pas.

     — Parce que tu crois que j'ai invité tout ce monde par plaisir ?

     Ambre donna un coup sur l'épaule de Stephen. Il ignorait pourquoi elle avait fait cette remarque, mais il la trouva amusante. Il passa son bras dans le dos de son amie et lui proposa de rejoindre la piscine. Il préférait restreindre l'accès aux jardins. Garder un œil sur ses invités lui rappelait les colonies de vacances qu'il animait l'été. Il ne comptait pas chercher pendant des heures un ami ivre et égaré comme un moniteur affolé.