Décembre 2009
L'hiver fut particulièrement froid et neigeux. La ville de Besançon était recouverte d'un drap blanc, les flocons étant tombés toute la semaine. Malgré ces intempéries, une fête bravant la légalité avait été organisée aux abords d'un fort. De nombreux jeunes s'y étaient aventurés, inconscients des dangers en cette période.
Un adolescent à la chevelure emmêlée avait quitté ses amis qui l'avaient incité à venir. Le froid le dérangeait et il souffrait d'un ennui considérable.
Il sortit des buissons où il s'était isolé pour tenter de faire ses besoins, sans succès. Il referma son manteau et enfonça son bonnet sur ses oreilles afin d'affronter la neige. Seuls ses pas lourds défiaient le silence de la ville endormie.
Pourtant, suivant sa route sur la colline, il perçut une voix. Il tendit l'oreille, se demandant ce qui était hurlé à pleins poumons. La fatigue lui jouait peut-être des tours, mais il ne comprenait pas un mot, les phrases semblaient être un mélange de français, d'allemand et de latin. Curieux, mais non sans crainte, il s'approcha. Dans l'obscurité, il distingua le dos d'un jeune homme, debout, balançant ses bras.
Le garçon eut l'impression d'être face à un acteur, révisant la tirade dramatique qui clôturerait le dernier acte. Son intérêt était en constante augmentation, il aimait la façon dont l'inconnu s'exprimait. Pourtant, une théorie, davantage macabre, lui fouetta l'esprit. Il pouvait s'agir d'un jeune dans un état second, cette scène n'était peut-être qu'un appel à l'aide, un réel dénouement.
L'adolescent avança encore d'un pas. Grâce aux illuminations, visible en contrebas de la ville, il put visualiser clairement l'homme. Vêtu d'un tee-shirt en piètre état sous la température glaciale, il pensa d'abord qu'il s'agissait d'un clochard, mais il reconnut cette silhouette frêle. Il l'avait croisé lors de la fête.
Il aurait aimé marcher encore, toutefois, se trouver en haut de la colline l'angoissait. L'inconnu se tut et tomba dans la neige. Le silence instauré fut remplacé par de vifs sanglots. Considérant qu'il n'était plus dangereux désormais, le lycéen imita un toussotement, pour indiquer sa présence.
— Qui es-tu ? l'agressa le jeune, se tournant vers lui.
— Je t'ai vu à la fête, tu as vendu du shit et des ecsta à mes potes.
— Trace ta route, gamin.
Il refusa et réduisit la distance d'un mètre. Il essayait de prouver sa bravoure, mais il était terrifié. L'image du jeune homme se dévoila sous ses yeux gris. Il avait des cheveux courts d'un noir profond et un visage pâle et creusé. Il n'avait pas l'air beaucoup plus âgé que lui, la majorité tout au plus. Ce dernier, voyant que le lycéen s'approchait, se releva d'un bond, manquant de glisser. Les flocons recommencèrent à s'abattre sur la ville.
— Ne t'approche pas ! vociféra-t-il, tremblant.
— Je n'irai pas plus loin. J'ai le vertige.
— Je n'ai rien à vendre, si c'est ce que tu veux !
L'adolescent exagéra un « non » de la tête et resta immobile. Cet inconnu le peinait. Et ce sentiment de pitié ne s'arrête pas ici. Une goutte glissa le long de son bras et ne ressemblait en rien à un flocon fondu. Le garçon avait du mal à réaliser ce qui se déroulait face à lui ; le jeune se mutilait, il creusait sa peau avec des gestes précis, spontanés. Cette scène lui glaça le sang, il n'avait aucune idée de la façon dont il pouvait réagir. Cependant, une chose était sûre : il ne laisserait pas une seconde personne trouver la mort sous ses yeux. S'il n'avait rien pu faire pour sauver Molly, il devait sauver ce garçon. Coûte que coûte.
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Les fleurs renaissent au printemps
RomanceAmbre est une étudiante passionnée par le cinéma et effrayée par la solitude. Ses amis, les soirées et l'ivresse rythment son quotidien, pourtant, l'année de ses vingt ans exprime un tournant considérable dans sa vie. Après avoir rejeté les avances...