Revivre

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Il avait l'air heureux, pensa Adeline en l'observant les lèvres pincées à travers l'écran de son téléphone.

Il était entouré des mêmes personnes que la dernière fois, les quelques autres chanceux de l'Académie qui participaient à ce programme à ses côtés, d'autres artistes qu'il avait rencontré là-bas et la galeriste avec qui il travaillait. Il avait semble-t-il tissé des liens avec eux au vu de son sourire et de la manière avec laquelle il était intégré dans le cercle des américains. Elle posa un œil suspect sur la main qu'il avait passé autour des épaules de la galeriste.

Elle était une belle hypocrite si elle voulait être honnête avec elle-même. C'était elle qui avait demandé cette pause. Pause qui s'apparentait à une rupture. Voilà déjà une semaine qu'Harry était parti à New York et Adeline avait parfois l'impression de suffoquer.

Ce n'était pas tant la distance physique qui la minait mais plutôt cette distance émotionnelle. Elle avait cru que ce serait plus facile de le laisser partir s'ils n'étaient plus ensemble, elle avait eu tort. Il lui manquait. Au début, il l'écrivait pour essayer de garder le contact mais Adeline ne s'était jamais résolue à répondre. Depuis, c'était silence radio des deux côtés. Cependant, elle continuait toujours de le stalker sur ses réseaux sociaux.

C'était bien plus fort qu'elle. Ils ont été tellement heureux ensemble. Un bonheur qu'elle n'aurait jamais cru possible. Elle avait toujours cru qu'elle passerait sa vie entière à papillonner à droite à gauche sans ressentir une once de plénitude. Avant de rencontrer Harry. Elle se rendait compte à son grand regret qu'elle aurait voulu que ça dure. Elle, qui pourtant répugnait à se projeter des mois plus tôt, se créait des scénarios où elle et Harry étaient toujours ensemble.

Et elle se disait et si... Mais avec des si on referait le monde.

- Tu pourrais arrêter de stalker ton ex deux secondes et jeter un coup d'œil à ceci ?

Le ton railleur de Malone la ramena à la réalité. Ils étaient dans l'atelier qui leur servait aussi de bureau, gérant les réseaux de Fancy colletions et le site internet. Malone venait de lui montrer les photos d'un terrain laissé à l'abandon à l'intérieur d'une clôture.

- C'est quoi ? Tu vas acheter un terrain ? Tu envisages de construire une nouvelle maison pour ta dulcinée ?

- Tu n'y es pas du tout. C'est pour nous. On a toujours dit qu'un jour on posséderait nos propres locaux. Le loyer vient d'être encore augmenté, on ne tiendra pas pendant des années à ce rythme.

Elle posa à nouveau les yeux sur les photos, imaginant déjà l'immeuble flambant neuf de Fancy à la place des mauvaises herbes et des détritus.

- Ҫa a l'air idyllique mais es-tu sur qu'on peut se permettre cet achat en ce moment ?

- Oh que si on peut, c'est moi le comptable, fais-moi confiance. J'ai déjà discuté avec le propriétaire, ce sont d'anciens habitants de Delmas qui voudraient vendre leur bien à Port-au-Prince afin de s'installer définitivement au Cap-Haitien. Ils n'en peuvent plus de la capitale.

- Comme je les comprends... Et après, construire les locaux nous demandera beaucoup de fond...

- Je sais. J'ai fait les calculs. Que dirais-tu si on faisait un appel d'offres/ On en profiterait pour agrandir l'atelier, augmenter la production en recrutant de nouveaux artisans.

Les yeux d'Adeline se mirent à briller à mesure que Malone parlait. Ҫa a toujours été tout ce qu'elle a toujours voulu. L'expansion de leur petite entreprise serait un achèvement extrêmement gratifiant et les ferait passer dans la cour des grands.

- D'accord. Et comment on trouve des investisseurs pour une colletions de bijoux artisanaux ? Nous ne sommes pas vraiment les cibles principales des portefeuilles en quête d'entreprises.

Sorcière malgré elle [En Correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant