Chapitre 11 - Partie 3 - James-Karl

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Je ne tarde pas à trouver celui que je cherche. Il est adossé contre les murs de la cuisine et une Bêta semble essayer d'entretenir la conversation. Je doute fort que ce soit efficace. Vu les traits sur son visage, il a plutôt l'air de s'ennuyer.

— Je suis désolé, je peux te l'emprunter ?

— Désolé, Gladys, s'excuse-t-il en m'emmenant plus loin. Écoute, James-Karl, on est amis, c'est vrai, mais il faut que je te le dise... Calme un peu sur l'odeur, tu veux ? Je ne pense pas que qui que ce soit ici, ne doute que c'est toi le futur PackAlpha de cette meute.

— Hein ?

— Tes phéromones sont insupportables. Ça rend mon Alpha nerveux et j'ai envie de planter mes crocs dans un truc.

— Merde ! Sérieux ? On me sent de loin ?

— De loin ?! Tu empestes à des kilomètres à la ronde.

Ma main s'aplatit sur mon front. L'onguent de Lucy. C'est de tradition d'exacerber l'odeur de l'Alpha pour la cérémonie, afin d'attirer les Omégas à lui. Mais j'aurais dû aller me rincer après. J'ai dû incommoder tout le village et leur imposer mes émanations... C'est très embarrassant. Ils ont dû croire que... Oh merde !

Étann.

J'écarquille les yeux.

— C'est ce qui m'amène, dis-je avec hâte, j'ai besoin de...

— Est-ce que c'est ma sœur qui te met dans cet état ?

— Quoi ? Non ! Je ne vais pas faire ça maintenant. Je dois attendre la fin du solstice d'été pour faire mon choix. J'ai besoin que tu me donnes les clés de ta cabane. Je crois que je vais avoir mon rut. Ce n'était pas prévu avant des mois.

Virgil rit puis dépose une main sur mon épaule.

— J'en étais sûr. Tu peux prendre Rebecca avec toi, tu sais ? Elle n'arrête pas de me parler de toi depuis des lustres, j'en peux plus.

Je fronce les sourcils. À cet instant, la seule personne dont je peux imaginer l'aide pour passer mon rut n'est pas absolument pas une Oméga. Ce qui m'inquiète davantage. Cela me rappelle les sensations étourdissantes d'avoir Étann contre moi et j'essaye de repousser cette idée au maximum.

Je suis tellement dans la merde. Je dois partir au plus vite et m'écarter du village.

— Je... Pour le moment, je préfère rester seul, merci.

— Pas de souci. J'y vais demain pour terminer quelques trucs et j'en profiterai pour t'y laisser à manger et à boire. À la prochaine lune, tu pourras y être.

Ça ne me convient absolument pas. J'ai besoin d'y être CE SOIR. Mon rut est en préparation et je sens déjà ma chaleur corporelle augmenter. Je ne suis pas encore à l'apogée, mais cela risque d'arriver vite. De plus, je dois entraîner Étann demain et mon rut ne peut pas se mettre en travers de mes responsabilités.

Je hoche la tête et m'échappe vers la rivière. Il faut que je trouve le moyen de me calmer et de faire baisser ma température. Me débarrasser de cet onguent m'aidera probablement aussi. Je ne comprends pas pourquoi je suis dans cet état-là. Mon Alpha le sait très bien, lui. Si je l'écoutais, il me dicterait de rejoindre l'humain sans hésitation. Il le veut.

Mais pourquoi, bon sang ?

Je m'étais fait à l'idée que mon accouplement avec une Oméga ne serait qu'un sacrifice pour le bien de la meute. Je n'ai jamais été attiré par elles. Mais il a fallu que cet idiot d'Étann me marque. Et jamais, je n'aurais dû réagir de la sorte. Heureusement, il n'a pas d'odeur et personne ne pourra un jour découvrir ce qu'il s'est passé dans l'obscurité de cette nuit. Le blasphème... Aller se frotter à un bâtard lycan alors que je suis censé engendrer la future génération de notre meute.

« Personne ne le saura jamais. »

Je me déshabille avec hâte et m'insère dans la rivière fraîche. La lune se reflète dans les ondes que j'ai créées. Je m'immerge en retenant mon souffle. J'essaye de me détendre avec le silence sourd de l'eau. Mon cœur bat toujours trop vite. Quand je ressors, je ne peux m'empêcher de tressaillir au souvenir de sa manière de lécher mes plaies. C'est un acte très intime chez les lycans et je me sens coupable de l'avoir laissé faire. Même si ce simple souvenir me fait à nouveau trembler de partout. Je passe une main distraite sur ma poitrine, puis baisse les yeux.

Non seulement les traces des griffes d'Étann sont guéries, mais les balafres qu'a gravées le loup sauvage sur toute la longueur de mon torse ont disparu aussi. Je tire mes cheveux vers l'arrière. Je tente d'ignorer le lien de l'empreinte en moi qui lutte. Je sais très bien ce qui arrive. Le fil d'Étann est en train de se tisser, de m'attirer à lui. Mon Alpha chante et me hurle d'aller le chercher.

Jamais.

Je fais tout ce que je peux pour réfréner tout ça.

Je dois empêcher ça. Non seulement, car je ne connais pas cet humain. Ce n'est que mon côté animal qui parle. Mais surtout, il ne servirait à rien d'entretenir ce genre d'inclination.

« Tu es le futur PackAlpha. »

Oui. Je vais simplement oublier ce qui est arrivé. Je vais patienter et me tenir à carreau jusqu'à demain soir. Et ensuite, je pourrais me laisser aller à la fièvre et à l'abnégation. Seul. Dans la sécurité de la cabane de Virgil. Je ne peux pas perdre plus de temps. La meute a besoin de moi.

« Tout pour la meute. »

[À paraître en 2025]D'OR ET DE JAIS - Tome 1 & 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant