𝟏𝟕- 𝐃𝐞́𝐬𝐨𝐛𝐞́𝐢𝐬𝐬𝐚𝐧𝐜𝐞

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Je me réveillai légèrement déboussolé par mon environnement. L'immense lit et la chambre si luxueuse m'étaient si peu familier que les souvenirs de la veille ne furent pas long à émerger dans mon esprit.

J'avais envie de hurler contre le monde entier.

Un mélange de gêne, de frustration et d'abattement commençaient à se réveiller en moi, faisant remonter dans ma gorge un goût amer. De la colère aussi, mais à ma propre encontre. Comment ai-je pu laisser les choses en arriver là ? Comment ai-je pu me dévoiler ainsi, lui faire part aussi facilement de toutes mes craintes ?

Je n'étais qu'un idiot.

Voilà déjà dix minutes que je fixais la porte dans l'angoisse de le voir apparaître. Une assiette à l'odeur délicieuse était disposée sur la table de nuit, mais je n'osais y toucher.

Mon cœur bourdonnait à l'intérieur de ma poitrine alors que je l'imaginais déjà me demander mon sang en échange du repas. Hier, on pouvait considérer le fait que j'avais une excuse, mon état était trop mauvais, mais là, plus rien ne me sauverait.

Ma tête roula tristement sur le côté et mon regard se reporta sur l'assiette juste à côté de moi. C'était extrêmement tentant. Une tartelette à la fraise semblait-il. Ces petits fruits rouges étaient pourtant si difficiles à faire pousser... Un tel repas - même si la quantité restait relativement faible dans l'estomac - était synonyme de fête chez moi. Je ne pouvais pas gâcher toute cette nourriture alors que les miens mouraient de faim.

Maintenant que je savais qu'il ne cherchait pas à m'empoisonner pour me faire subir toute sorte de choses, je pouvais me le permettre. Et puis comme il me l'avait si gentiment expliqué, m'empoisonner alors que je lui appartenais ne lui apporterait rien. Il prendra ce qu'il veut, que je mange ou non ce qu'il m'avait préparé. C'est donc d'un mouvement las que je me saisis du plat.

Je n'eus même pas le temps d'en apprécier la saveur que la tartelette était déjà engloutie. Un verre d'eau était heureusement disposé juste à côté et je saluai encore une fois son étrange attention.

Mais même après ces quelques heures de sommeil et ce généreux en-cas, ma colère était loin d'être éteinte. Seulement, je commençais tout doucement à prendre conscience que la rébellion frontale n'apportait jamais rien de bon. Surtout lorsque l'on ne faisait pas le poids face à son adversaire.

Pourtant, c'est précisément à cet instant qu'une nouvelle idée me vint, faisant écho à mes réflexions de la veille. Il me fallait impérativement de quoi me défendre.

Cette soudaine opportunité que je commençais à entrevoir ne se présenterait pas une seconde fois. Qui sait ? Demain je serais peut-être battu et affamé pour mon insolence. Ce sera sans doute aussi mon dernier repas avant que je ne serve moi-même de nourriture.

Sans y penser davantage, j'attrapai l'assiette désormais vide et la brisai en me protégeant les doigts avec la couverture - cette dernière servant aussi à en camoufler le bruit. Je gardai ensuite le plus grand bout dans ma main et cachai le reste sous mon oreiller. Mon précieux bien entre les doigts, je me recouchai calmement sous la couverture.

Il me fallait le prendre par surprise, c'était le seul moyen !

C'était dingue à quel point tout semblait si facile en y pensant. Pourtant, je savais très bien que face au danger, cela le serait tout d'un coup beaucoup moins.

Je fis en sorte de me détendre, mais lorsque la porte s'ouvrît après plusieurs minutes interminables où je pesais le pour et le contre, je sus que je n'aurais pas de seconde chance.

La sensation du matelas qui s'affaisse sous le poids d'un autre m'informa rapidement de sa position. Mais je choisis d'attendre qu'il soit juste un petit peu plus proche. Juste un peu... encore un peu et il sera bientôt à portée de mon arme !

Dévoreur De Cœurs [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant