𝟐𝟓- 𝐂𝐡𝐚̂𝐭𝐢𝐦𝐞𝐧𝐭

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Pdv Amory :

Ils étaient des géants, tous sans exception. Je me savais minuscule en comparaison et pourtant rien ne désemplissait la sensation présente en moi. Pendant cet échange, je me sentais invincible, invulnérable. Ma haine était si forte qu'elle brouillait mes faibles instincts de survie.

Ce roi était le commanditaire de l'attaque qui avait anéanti mon peuple et mes parents. C'était lui qui m'avait privé d'une enfance normale et il n'en ressentait aucun remord. Pire que ça, il en parlait comme si ce n'était rien de plus qu'une futilité. Il se permettait même d'utiliser ce génocide pour me menacer. Si j'avais toujours mes pouvoirs, je ne sais pas si je me serais retenu d'enrouler mes ronces autour de sa gorge et de serrer jusqu'à ce que son sang m'éclabousse le visage.

Quand son regard croisa le mien, je fus pris d'une montée de rage qui échauffa mes sens. Je voulais qu'il meure. En moi se trouvait bien plus qu'une infime couche d'ombre. Je décelais désormais en mon fort intérieur une part plus incontrôlable, plus puissante, profondément attractive et fatalement plaisante. Un tel désir de tuer ne m'avait encore jamais traversé. Cette bribe de noirceur qui m'habitait depuis petit était à deux doigts de me submerger et d'exploser. Mais la chute fut vertigineuse et brève. Une main se posa subitement sur mon épaule et me coupa dans mes délires de massacre. Cette paume chaude qui me fit sursauter, suffit étrangement à apaiser cette noirceur.

— Excusez ce jeune insolent. Il n'a jamais appris à respecter ses aînés. Je ne l'ai avec moi que depuis quelques jours, mais je vous assure que je saurai me charger de son éducation.

D'une pression encore plus forte sur mon épaule, il me poussa à m'agenouiller. Sa main, menaçante, glissa dans ma nuque et me força à rester bien en place.

— Amory, m'apostropha Taegan si durement que j'en frémis.

Une colère incandescente brûlait dans ses pupilles, alors que je n'avais su résister à l'envie de le regarder avec provocation.

— Maintenant, ne dis plus un mot ou je ne pourrais plus rien pour toi, me chuchota-t-il. 

Je n'étais pas suicidaire pour autant, mais ma fureur m'avait aveuglé. Je me sentais si fort et inflexible, puissant. Mais je comprenais désormais ma position. En tout cas, j'avais essayé. J'avais vraiment essayé de proposer un arrangement. Il l'avait refusé et il allait le regretter. Bientôt, je partirai d'ici et je le lui ferai payer. Je nous autoriserai enfin à vivre librement, sans crainte et sans peur. Pour cela, je n'avais qu'une chose à faire : le détruire. Mais seulement lui. Pour le reste, je ferai ça à ma manière. Je les acculerai au pied du mur et ils n'auront d'autres choix que d'accepter ma proposition. Je n'étais pas sûr d'en être capable, mais en ralliant les elfes à cette cause, il y avait de l'espoir. Le roi était orgueilleux et nous sous-estimait, il nous fallait au moins tenter notre chance ! C'était le seul moyen, sinon l'hiver emporterait toujours plus de monde sur son sillage... Tôt au tard, nos faibles ressources seraient inexploitables.

Puis, un fait indiscutable s'insinua en moi lorsque je vis le roi offrir un sourire mesquin à Malays. Cette discussion était stérile depuis le début. Au fond, à quoi m'attendais-je réellement ? Même si le roi avait accepté, qui me dit qu'il ne nous aurait pas trahis ? Il l'avait fait une première fois et résultat, mon peuple avait été décimé. Rien ne garantissait qu'il n'allait pas réitérer la chose. Ma profonde naïveté devait sûrement parler à ma place et ce goût âcre dans ma gorge ne me quittait plus.

Après avoir zieuté l'assemblée de dents-longues devant moi, j'enroulai rapidement un morceau de ma tunique autour de ma main pour éviter d'empirer les choses. Heureusement, c'était une simple égratignure, la plaie n'était pas profonde.

Dévoreur De Cœurs [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant