Dévoreur De Cœurs [BxB]

𝟒𝟑- 𝐀𝐜𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐯𝐞́𝐫𝐢𝐭𝐞́

À l'occasion de ce voyage, Taegan m'avait expliqué que le roi n'avait jamais essayé de forcer la Barrière. Il savait que les elfes ne resteraient pas sans rien faire et qu'une telle mission occasionnerait trop de pertes. C'était un homme fier et orgueilleux autrefois, mais la blessure que lui a infligée la mère de Taegan l'avait stoppé dans ses délires de massacres. Suite à cela, il avait tenté de cacher le mal qui le rongeait à ses fils. Il ne voulait surtout pas que l'un d'entre eux ne profite de sa faiblesse et ne lui vole la couronne. Et puis sa petite vie à l'abri de ses murs de pierres lui convenait parfaitement. Il se faisait vieux désormais, l'esprit de conquête lui était sans doute déjà passé.

Dans le lieu où nous nous rendions, la Citadelle, il y aurait beaucoup d'anciens, de très puissants vampires mais aucun n'était de sang pur, seulement Sirdon, l'oncle de Taegan et accessoirement dirigeant du territoire. Ce dernier était aussi puissant que le père de mon nouvel amant. C'était son ennemi juré et leur divergence d'opinions les avait autrefois poussés à s'affronter. Leur duel avait néanmoins fini par la défaite de Sirdon. Après ça, il s'était reclu dans un fort délabré, suivi de près par les quelques hommes qui partageaient ses idéaux. Ensemble, ils l'ont reconstruit brique par brique et se sont jurés de faire tout ce que le roi n'avait jamais eu le courage de réaliser : entreprendre la chute des elfes blancs, créatures insidieuses de la forêt et seuls responsables de leur soif.

Sirdon n'avait jamais tenté de se venger de son frère en le combattant directement après qu'il l'ait banni. C'était un homme cupide et sournois, mais très intelligent. Il avait autre chose en tête et surtout, il savait que le roi était soutenu par ses enfants qui lui avaient juré allégeance. Tout sauf un : Taegan. Mon ancien tortionnaire n'avait jamais été considéré comme son fils et avait toujours refusé de se soumettre. Et c'était précisément ce qui lui avait valu son exil de l'autre côté des montagnes. Tout le monde savait pour les tensions entre le roi et son fils bâtard. Taegan était donc un allié de choix tout trouvé. Ne disait-on pas que l'ennemi de mon ennemi était mon ami ?

Pour en revenir à l'oncle, son intention première aurait pu paraître juste pour son peuple. Après tout, c'était dans leur intérêt. En tant que seigneur, il se devait de faire tout ce qui était en son pouvoir pour leur éviter de mourir de soif et de rejoindre les rangs des charognards. Mais il se montrait cruel, était craint par ses propres hommes et ses méthodes n'étaient pas toujours au goût de tous. Fourbe et manipulateur avec tous ceux qu'il rencontrait, même avec ses plus proches alliés, il n'hésitait pas à s'en débarrasser dès qu'il les jugeait inutiles, et tout le monde le savait. Il ne parvenait pas à créer de liens sociaux, ni amicaux et certains disaient qu'il était complètement incapable d'en construire. Même après des années de loyaux services, quiconque montrant le moindre élan de faiblesse se faisait abattre. Il n'avait également aucun respect pour les humains et sa façon de les traiter en disait long sur sa personnalité.

La première réunion qu'il avait organisée quelques semaines plus tôt avait pour but de rallier mon détenteur et d'autres puissants vampires à sa cause. Maintenant que c'était chose faite, il lui fallait organiser une nouvelle entrevue pour finaliser le plan et rassembler leurs ressources. Taegan avait promis de mettre tous ses hommes à profit, mais il n'en était rien. Sirdon l'apprendrait à ses dépens : il avait choisi la mauvaise personne à rallier à sa cause.

Taegan serait la raison de sa chute.

***

Après quatre jours de voyage durant lequel je n'avais presque pas fermé l'œil - peu importe à quel point mon nouveau protecteur avait tout fait pour me rassurer - nous passâmes enfin la gigantesque muraille de Kelos. L'air devint plus lourd et une sorte de tension déplaisante commença à m'entourer. Sans un mot, les gardes refermèrent l'immense porte après notre passage, me donnant l'impression d'être prisonnier de ce nouvel endroit.