PDV Taegan
Toutes les têtes convergèrent d'un même mouvement vers Amory et je n'appréciai guère leur façon de le regarder. J'avais le même regard donc je savais parfaitement de quoi je parlais. Car cette envie, cette convoitise qui brillait dans leurs pupilles me fit bien comprendre la chance que j'avais. Mais une chose était certaine. Même s'il venait à me détester, je ne me séparerais pas de lui. Pas au risque qu'il puisse finir entre leurs griffes.
La plupart de mes semblables tenaient un humain sur leur genoux ou à côté d'eux. Seule Xiana était assise sur les cuisses d'un homme. Un humain avec qui il me faudrait m'entretenir, j'avais un petit service à lui demander en plus de vérifier s'il était bon avec elle.
Ophalia, la plus sournoise de toutes mes sœurs, maintenait une jeune femme sur ses cuisses, un collier qui ressemblait fortement à celui d'un chien autour du cou. Ses yeux d'un bleu glacé me fixaient avec démence. Déjà petite, quelque chose ne tournait pas rond chez elle. Elle avait la fâcheuse tendance à être sur les nerfs et autrefois, son problème de violence n'allait déjà pas en s'arrangeant. Même mon cinquième frère, le plus discret d'entre tous, coula un regard vers Amory, un léger sourire aux lèvres. Mon attention se reporta sur ce dernier. À ses battements de cœur, je sus qu'il n'était pas à l'aise. Pourtant, il donnait l'air d'avoir une tranquillité d'esprit assumée, sa posture n'ayant pas changé. En plus de ne pas s'être incliné comme n'importe qui l'aurait fait à sa place, il bombait le torse et relevait la tête dans une attitude purement fière et confiante.
Il n'avait pas l'intention de se soumettre.
— Quelle jolie créature nous avons là, railla le roi, sa mauvaise humeur s'échappant par tous les pores de sa peau. Ce n'est pas tous les jours que j'ai la chance de voir un elfe de l'ombre.
— Et moi ce n'est pas tous les jours que j'ai affaire à une personne de votre envergure. Ô grand roi, s'exclama-t-il d'un ton léger, presque amusé. Je vous remercie de me recevoir et j'admire votre discernement tout autant que votre servilité. Mon bon souverain, quel exemple vous faites...
La mâchoire de mon père se crispa. Dans sa bouche, ce genre de paroles s'apparentait à de la moquerie. Il n'en pensait pas un mot et tout le monde le savait.
— Excusez-le, m'empressai-je d'intervenir, il n'a jamais appris à parler à un roi.
Autour de nous, un silence inconfortable s'installa. Mes frangins échangèrent des coups d'œil perplexes tout en laissant un petit sourire illuminer leur visage. Un peu de rebondissement dans leur vie lamentable devait certainement leur faire plaisir. De mon côté, les mains derrière le dos, j'observais Amory et le petit jeu auquel il se livrait. Je savais d'avance qu'il était doté d'un talent certain pour éviter de faire ce que je lui demandais, la suite ne pouvait qu'être divertissante.
— J'ai cru comprendre que le sang était une denrée rare pour vous autres, amateurs de chair fraîche. J'en profite ainsi pour vous énoncer ma proposition, se risqua-t-il. Un arrangement d'entente solide entre nos deux camps.
Mes yeux s'arrêtèrent sur son deuxième conseiller qui ne cessait de lui envoyer des messages urgents et muets. Mais Amory n'en avait cure et continua son explication, un étrange rictus aux lèvres.
— Si vous appreniez à contenir vos pulsions, une trêve pourrait être envisageable. Votre peuple tout autant que le mien vit des moments difficiles. Partager vos récoltes et nous notre sang, sans peur et sans regrets, donnerait lieu à une véritable fraternisation. Plus de Barrière, plus de séparation mais une coalition pure et confiante. Une nouvelle ère de paix.
Amory parlait calmement, mais très distinctement, sans se soucier un seul instant que le roi exécrait ce genre de demande. Surtout venant de quelqu'un qu'il jugeait inférieur. Et puis le roi connaissait la situation, mais ne ferait rien pour l'arranger. Sa vie lui convenait, il avait tout ce qu'il désirait, alors pourquoi s'embêter ?
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Dévoreur De Cœurs [BxB]
VampireDans les confins de notre monde se trouve la Vallée, un lieu accueillant pour créatures humaines ou elfiques. Du moins seulement en apparence, car il y a toujours un prix à payer. Amory l'a compris très tôt. Cette dure réalité l'a percuté de plein...