Chapitre 22 : Tu es à l'abris

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Les ténèbres disparurent lentement.

Elle ouvrait les yeux, sa tête lui faisait mal, et elle avait comme des acouphènes. Elle était à genoux, sous un soleil de plomb. Elle avait chaud. Elle vit une colonne effondrée, qui ressemblait à celles des temples grecs. Et les souvenirs de Mélinoé lui revinrent en tête.

Évangeline écarquilla les yeux. Elle avait mal, mais elle avançait, tant bien que mal, vers Aiolos. Il était étendu sur le dos, les yeux fermés, le teint blême. Il était couvert de sang et de blessures. Son armure était abîmée.

-Ai...Aiolos, elle sanglotait. Oh mon dieu.... Oh mon dieu qu'est-ce que j'ai fait...

Les larmes lui vinrent et coulèrent sur ses joues, alors qu'elle voyait celui qu'elle aimait inconscient, mortellement blessé, par sa faute. Elle posait ses mains sur le visage du chevalier.

-Aiolos... Réveille-toi je t'en prie... Si seulement Margaux était là...

Son cosmos était si faible, presque sur le point de s'éteindre. Sa respiration était si saccadée qu'elle peinait à l'entendre.

-M'abandonnes pas encore une fois... Sans toi, je peux pas, je peux pas...

Elle levait la tête vers le ciel. Elle ne savait pas qui implorer. Elle voulait simplement qu'il vive.

Elle aperçut un éclat doré au loin. Un éclat semblable à celui de l'armure d'Aiolos. Un autre chevalier d'or...

Son cerveau ne réfléchissait même plus à ce qu'elle faisait. Ses membres agissaient tous seuls. Difficilement, elle souleva Aiolos et passa un de ses bras au-dessus de ses épaules. Elle le maintenait du mieux qu'elle le pouvait. De toute façon, elle n'était pas assez forte pour le porter.

Lentement, elle avançait. Les escaliers, les innombrables marches qu'elle dut monter, lui paraissaient comme une éternité.

Elle s'effondra au milieu de l'escalier. La douleur et le chagrin l'accablaient. Mais ses mains eurent à peine le temps de toucher le marbre des marches, qu'elle était redressée par quelqu'un.

-Évangeline... Je n'en reviens pas !

-...Mû... A-Aide-moi...bégayait-elle.

Elle était à bout de force, et tomba dans les bras du chevalier. Il la rattrapa juste à temps. Mû attrapa aussi Aiolos. Il n'arrivait pas à compter toutes les blessures qui le couvraient, tant elles étaient nombreuses. Il ne réfléchit pas plus, et se téléporta aux maisons de guérisons.

Il avait beau chercher partout, Mû ne trouvait pas Margaux. Et la situation devenait de plus en plus urgente. Il se décida à la contacter par télépathie, en espérant que son esprit ne soit pas trop fermé par le stress.

-Margaux ? Tu m'entends ?

-Oh c'est quoi ce bordel, je suis schizo maintenant...

-C'est moi, Mû ! J'ai besoin de ton aide tout de suite aux maisons de guérison. Aiolos est au bord de la mort.

-J'arrive !!!

À peine quelques minutes plus tard, Margaux arrivait à l'intérieur en courant, essoufflée et toute rouge. Lorsqu'elle vit Mû, avec Aiolos et Eva, ses yeux s'agrandirent autant qu'ils le purent. Elle se précipita vers Eva.

-Ne t'occupe pas ...de moi ! Soigne A-Aiolos en... priorité ! S'il te plaît...Margaux.

Le regard suppliant et déterminé d'Évangeline la convainquit. L'inquiétude se lisait sur le visage de la déesse de la médecine, mais elle savait qu'Eva ne céderait jamais.

Margaux prit Aiolos des bras du chevalier du Bélier et alla dans une des salles des maisons de guérison, en fermant la porte derrière elle. Mû allongea Évangeline dans la pièce d'en face, en essayant de ne pas appuyer sur une de ses blessures. Des infirmières ne tardèrent pas à arriver, l'entourant de bandages et autres artifices médicaux.

-Évangeline, je vais prévenir Saga et Kanon, ils voudront te voir, dit-il dans un petit sourire.

-Il faut d'abord que je parle à Margaux, seule à seule, répondit d'une voix aussi froide que celle de Camus.

-Te savoir ici les rassurera. Je leur dirais d'attendre avant de venir te voir.

Elle remercia le chevalier d'un signe de tête, avant qu'il ne parte.

Elle se retrouva rapidement seule. Seule avec ses pensées. Seule avec ses souvenirs. Eva s'assit et replia ses genoux jusqu'à ce qu'ils touchent son front. Elle ne voulait pas se souvenir. Et elle était si fatiguée... Elle ne résista plus, et s'endormit, la tête posée sur les genoux.

***

Elle fut réveillée par Margaux, qui lui secouait légèrement le bras. Elle releva doucement la tête. Des larmes brillaient encore dans les yeux verts d'Eva. Margaux eut un sourire rassurant.

-Aiolos est tiré d'affaire. Il va s'en sortir Eva, ne t'en fais plus pour lui. Il dort encore pour le moment.

-Merci Margaux. La larme qu'elle contenait coula lentement sur sa joue.

Margaux s'assit à côté d'elle, et posa la tête d'Eva sur son épaule. Elle prit sa main, et elle entrelaça leurs doigts.

-Eva, tu as vécu des choses horribles. Tu as gros sur le cœur, mais tu vas pas pouvoir tout garder pour toi comme tu le fais d'habitude. Il faut que tu me racontes. Je suis ta meilleure amie, et là je suis aussi ton médecin. Je garderais tout pour moi, s'il le faut. Je t'aiderai à surmonter tout ça.

-Oh Margaux... Plus de larmes silencieuses coulèrent.

Elle resserra enfin ses doigts sur ceux de Margaux. Tous les sentiments qu'elle avait en elle la brûlait de l'intérieur, mais elle ne voulait pas avouer. Pourtant, elle savait que Margaux était la seule personne à qui elle pourrait dire tout ça.

-Je... Elle prit un temps, et respira aussi profondément que ses sanglots lui permettaient. J'étais toujours consciente quand Mélinoé possédait mon corps. Je me souviens de tout, tout ce qu'elle a fait, tout ce qu'elle m'a fait subir.

Son regard croisa celui de Margaux. Elle baissa les yeux de honte. Le regard de sa meilleure amie, qui se voulait bienveillant, lui rappelait le avant. Avant tout ça, avant la rencontre des chevaliers. Avant. Avant les attaques, avant la torture, avant les viols, avant. Avant tout ça.

-Margaux...j'ai besoin d'un service.

-Tout ce que tu veux, je suis là pour t'aider.

-...Je dois avorter. Rapidement.

Le regard de Margaux devint encore plus sévère. Elle hocha la tête, accusant lourdement le coup. Elle se releva. Eva la trouva grandie, plus forte qu'avant.

-Je vais m'occuper de trouver un médecin qui puisse faire ça, dit-elle avec un sourire compatissant. Tu es en sécurité maintenant, Eva. Je promets de te protéger, dorénavant. ...Ça fait beaucoup pour une première fois, repose-toi encore, tu es épuisée.

Elle se retourna vers la porte. Mais en enclenchant la poignée, elle tourna la tête vers sa meilleure amie, qui se recroquevillait sur elle-même.

-Je peux savoir qui t'as fait ça ?

-Thanatos, dieu de la mort, répondit Évangeline.

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