41. Némésis

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Chapitre 41

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Irina

-          Ah ! c'est tout de suite plus logique ! résonne la voix de Charlie dans l'habitacle.

Je viens de faire l'appel de groupe, et j'envoie le reste de l'équipe de Kei dans un coin de la ville, loin de nous. Je viens de leur dire que Keiran m'a demandé de les prévenir que l'adresse a changé, on se retrouve tous là-bas. Enfin, c'est ce qu'ils croient.

Je raccroche et me laisse tomber contre mon dossier. Ma voiture est toujours à l'arrêt dans la cour. Le temps passe vite, je suis stressée et je ne suis pas sûre que mon cœur supporte. Mais je dois me dépêcher. Alors je cours jusqu'à ma chambre, je récupère le colis, je retourne près de ma voiture et j'ouvre le colis. La bête est lancée.

Je sors à nouveau mon portable et écrit un message rapide

[de : Irina

Surveillez Kei, je pars à sa recherche aussi]

La réponse ne se fait pas attendre

[de : Ducon

La puce gps était une bonne idée]

Je ne réponds pas.

Cette partie-là de mon plan était pour le moins inattendue. Je ne pensais pas me retrouver à devoir prévoir un tel coup. Je pensais au début que cette partie du plan était moitié pour la vengeance, moitié pour aider, mais finalement, j'ai compris que j'avais envie d'en profiter aussi, de tirer quelques avantages de cette mésaventure.

Je me force à sourire malgré les événements qui vont suivre, et je grimpe dans ma voiture.

Je prends une grande inspiration, je ne suis pas une meurtrière aguerrie, le dernier meurtre que j'ai commis date d'il y a quelques années, papa. Et ce soir je dois recommencer.

Un auteur a dit qu'on ne condamnait pas l'acte criminel parce que c'était criminel, mais que c'était criminel par ce qu'on le condamnait. Quelqu'un a choisi un jour ce qui était réprouvable ou non, et on doit s'y faire. Même si on a grandi dans un monde impitoyable. Même si on a grandi là où la seule façon de survivre était de se battre.

Peut-être qu'on oublie trop souvent que les valeurs qui nous entourent ont été posées bien avant nous, peut-être qu'on oublie pourquoi telle chose est bien ou ne l'est pas. On ne réfléchit plus à ces choses assez souvent. Je sais que ce que je fais est mal. Mais fût un temps ou le meurtre était banale. On punit le meurtre parce que c'est mauvais ? Pourquoi ? Parce que ça rend des gens tristes ? Parce qu'on bousille la vie de quelqu'un ? Alors pourquoi seul 1% des viols sont condamnés ? C'est la même chose, c'est une mort différente, mais je peux assurer que c'est une mort.

Peut-être que j'essaie seulement de me rassurer comme je peux. Je sais que c'est mal. Mais c'est son monde. Mon monde. Je vais le faire. Ça fait longtemps que je n'ai plus le cœur à la gentillesse. Merci papa. J'ai envie de crier au monde qu'il peut me juger, mais jamais il ne me comprendra. Je n'aime pas ce monde, je n'aime pas les crimes et la violence, mais putain je peux y faire recours si besoin. Je connais les règles du jeu.

Et enfin, aujourd'hui, j'arrête d'observer et de coacher, et je décide de jouer.

Je roule vite, le temps presse. J'imagine que je devrais remercier Keiran de m'avoir appris à piloter de cette façon, mais ça serait mal venu.

Quand j'arrive devant le bâtiment, j'inspire un grand coup. Je n'y crois pas. Je vais le faire. Je dois le faire. Mon arme coincée dans mon jean, je sors de la voiture tranquillement, comme si j'allais faire les courses.

AZUL - BruisesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant