Chapitre 41

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PDV William

J'avais tout, tout sauf envie de me retrouver ici, au milieu d'un immense stade de foot, entouré de milliers de personnes inconnues. Je ne sais pas ce qui me débecte le plus, entre la proximité, les hurlements incessants, ou bien les odeurs incongrues. Visiblement, tout le monde n'a pas connaissance du déodorant.

Pour résumer la situation, je suis entouré d'un nombre incalculable de personnes qui sont tout aussi excités que Tic et Tac au quotidien. C'est probablement ce qui se rapproche le plus de ma définition de l'enfer, en ce moment même.

Et pourtant, je suis là.

Je suis là, parce qu'il était hors de question de laisser le petit zombie entre leurs mains. Si j'ai toute confiance en Charlotte, il faut être réaliste, elle n'est pas capable de gérer à la fois les trois énergumènes qui nous accompagnent, et de prendre soin de la blessée.

— Il n'y a vraiment que les Madness pour réussir à remplir un stade entier.

Je suis certain d'être capable de citer un bon nombre de contre-exemple, mais je n'ai aucune envie de me lancer maintenant dans un débat avec Natt. Ou dans une quelconque discussion, à vrai dire. Le trajet jusqu'ici et l'attente pour entrer m'ont suffit à avoir ma dose de lui pour la journée, voire la semaine ou le mois. Rares sont les expériences où j'ai pu le voir dans un tel état, et le fait qu'il soit multiplié par 3, ou 3,5 si on compte l'excitation relative de Cha', me plonge dans une fatigue intense.

— Ça va être un moment incroyable. Certes, on est en fosse, mais quand même ! Les Madness, la folie d'un concert, nous, tous ensemble. Même William est là, même si il tire la gueule. Sensationnel.

Je lance un regard blasé à la jeune femme qui me répond en me tirant la langue, amusée. Je sens les yeux de Kanako se déposer sur moi, et je me plonge dans leur lueur sans réfléchir un instant.

Pourquoi es-tu venu, si tu n'aimes pas ?

— Pourquoi es-tu venue, si tu ne connais pas ce groupe ?

Je m'attends déjà à ce qu'elle me réponde qu'elle au moins, elle aime être ici, avec les quatre plaies de ma vie. Elle n'a pas le temps de le faire, que les lumières s'éteignent, et que la foule retient son souffle.

Je dois avouer que les sensations sont impressionnantes, même lorsque l'on est ni fan du groupe, ni de concert en général. C'est une atmosphère entière qui vibre. J'en viens presque moi-même à ressentir de l'impatience, une certaine pression, une envie de découvrir l'après.

L'univers de la musique n'est pas le mien, mais c'est un art à part entière, et il est tout autant que les autres capable de faire résonner une partie de mon âme. C'est là que l'on voit les vrais artistes. Je ne connais pas plus que cela les Madness, je ne m'intéresse pas à la musique de manière générale. Mais lorsqu'un groupe est capable de vous faire malgré ces paramètres, ressentir une telle tension, c'est indubitablement qu'ils sont taillés dans le talent brut.

Un éclair de lumière, une note de guitare, et tout explose. Les membres apparaissent sur scène, la foule retrouve son souffle, hurle à plein poumon.

Les notes s'enchaînent, déchaînées, les paroles s'élèvent dans le stade, autant du chanteur que des spectateurs, qui les connaissent par cœur.

Il y a trop de monde, trop de bruit, et ce n'est pas mon monde, mais ça a un côté grisant. Avec le peu de lumière, chaque personne est plus floue, comme une tâche de couleur, et devant moi s'étend à présent une toile mouvante. Je retrouve mon monde dans le leur.

De toute part, ça chante, ça danse, ça saute. Lewis et Natt sont en délire, et je me demande comment ils vont avoir l'énergie de tenir. Charlotte et Arwen ne sont pas en reste non plus, mais un peu moins montés sur des ressorts. C'est presque reposant. Et puis il y a Kanako.

Amour Muet - Aime-Moi Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant