Chapitre 44

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PDV Kanako

Je dépose mon sac aux pieds du tabouret sur lequel je prends habituellement place lors de nos leçons, avant de passer mes yeux sur le reste de la pièce.

Hier, ici, mes émotions se déchaînaient et mutilaient mon cœur. Pourtant, de cette douleur, il n'en reste aucune trace sous mes yeux. La toile déchirée n'est plus là. Le cutter non plus. Il n'y a plus le bruit de mes cris de rage, ni l'odeur salée de mes larmes.

Non, il n'y a que le silence, qu'un apparent calme qui tente de me faire revenir aux bons moments que j'ai pu passer dans cette pièce.

Les mots de William résonnent pourtant encore. La sensation de ses bras autour de mon corps est toujours vivace.

Il n'a pas pu tout apaiser. Mais il était là. Je crois que c'est ce dont j'avais besoin, bien plus que d'autre chose.

J'avais besoin de lui.

Et bizarrement, je n'ai pas peur de l'admettre.

La douleur n'est pas éteinte, pourtant, elle me paraît plus supportable. Comme si elle avait moins d'emprise sur moi que les mots de cet homme que je connais depuis si peu de temps.

La porte claque violemment, me faisant sursauter, et je n'ai aucun doute sur le fait qu'il ne s'agit pas de mon professeur attitré. Lui aurait franchi l'entrée en silence, et m'aurait observé sans rien dire jusqu'à ce que je le remarque, pour le seul plaisir de me faire rougir. Un jeu qu'il semble avoir instauré, et qui est loin de me déranger, contrairement à ce que voudrait la logique. L'espèce de satisfaction qu'il affiche lorsqu'il parvient à faire rosir mes pommettes, sûrement sans avoir conscience de ce que reflète son propre visage, me plaît.

Son sourire... est galvanisant.

— Ma Kana !

La voix enjouée de Charlotte me permet de me détourner des pensées étranges qui commençaient à m'habiter. Je n'ai pas le temps de lui demander ce qu'elle fait là, qu'elle a déjà franchi les mètres nous séparant et m'étreint avec fougue. Elle s'éloigne tout aussi vite qu'elle s'est approchée, avant même que je n'ai pu entourer mes bras autour d'elle en retour, pour planter son regard dans le mien.

— Prends tes affaires, je t'emmène.

— William doit me rejoindre, nous devons travailler.

Elle hausse un sourcil et son sourire me laisse à penser qu'elle a une idée derrière la tête, et qu'elle ne compte pas l'abandonner de si tôt, William ou non.

— Changement de programme. On passe chez toi récupérer quelques affaires, je t'entraîne un peu à défiler, et ensuite, barbecue et soirée bien sympathique.

— Je doute qu'il ne soit d'accord avec tout cela.

— Il n'a pas le choix. Et puis c'est chez lui, tu penses bien que je ne fais pas cela sans son accord.

Je ne retiens pas un sourire de monter sur mes lèvres.

— Comme si son accord t'importait.

— Touché. Allez hop, on y va !

Elle attrape mon sac d'une main, mon poignet de l'autre, et m'emmène avec une énergie débordante que je peine à suivre. Je parviens tout de même à laisser échapper un rire, et je la capte m'observer satisfaite du coin de l'œil. Je ne cherche pas ce que cela signifie, perdue par un flot de paroles incessant jusqu'à ce que nous arrivions chez moi. Obaachan n'a pas l'air étonnée de voir mon amie débarquer, ni surprise lorsque je lui annonce que je pars pour la nuit. Elle se contente d'un sourire, et si je suis intriguée de par son comportement, l'excitation de Charlotte dans mon dos m'empêche de m'y attarder.

Amour Muet - Aime-Moi Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant