Chapitre 23 : How soon is now? {Lee}

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"There's a club if you'd like to go

You could meet somebody who really loves you

So you go and you stand on your own, and you leave on your own

And you go home and you cry and you want to die"

Lee

Lee passa un jour et une nuit en prison. Au petit matin on lui expliqua que sa caution avait été payée, et deux policiers qu'elle n'avait jamais vus auparavant l'escortèrent jusqu'à la sortie. Elle était sale, et abîmée, et si épuisée qu'il lui semblait qu'elle flottait à la frontière de la réalité, et après tout n'était-ce pas précisément là qu'elle se trouvait ? Quelqu'un s'évertuait à l'arracher à son rêve, mais elle refusait encore de le quitter. Elle s'agrippait aux lambeaux de ce qu'il en restait. Même eux valaient mieux que la vérité.

Harry l'attendait à l'extérieur. Près de la voiture de Charles ; sans lui.

« Je suis venu aussi vite que j'ai pu », lui dit-il.

Ou quelque chose comme ça : elle l'entendit à peine. Elle s'affaissa contre son torse et il la retint de ses bras tandis qu'elle s'excusait, qu'elle implorait son pardon, encore et encore sans discontinuer, sans même savoir pourquoi. Lorsqu'elle fut de nouveau en mesure d'articuler ses pensées, il lui expliqua que Charles avait été transporté à l'hôpital.

« Et dès que son état le lui permettra, il sera transféré en prison. »

Puis jugé quelques jours plus tard. Pourquoi ? Il n'avait rien fait, tout le monde mentait.

« Où est Trevor ?

— Je n'en ai pas la moindre idée.

Où est Trevor ? » Harry resta muet. « Il a disparu, n'est-ce pas ? Il est le seul responsable de tout, poursuivit Lee, et au bruit de sa fureur on aurait pu croire qu'elle l'accusait de toutes les atrocités de l'univers, et il a disparu. »

Passant les deux mains sur son visage, elle s'efforça de recouvrer son calme.

« Merci d'avoir payé la caution.

— Je n'ai pas payé la caution, Trevor a payé la caution. C'est grâce à lui que je suis là. Il a contacté Antoine, et ce dernier est venu me trouver. »

Déboussolée, Lee se tint un instant stoïque. Puis elle pointa un doigt tremblant en sa direction.

« Cela ne change rien. Cela ne change rien, tu m'entends ? Tu n'es pas là grâce à lui, tu es là à cause de lui. Cela ne change rien. »

Elle allait et venait sur le trottoir. De temps en temps osait un regard en direction de la voiture, et alors d'affreux souvenirs se percutaient les uns les autres sous son crâne, jouant des coudes pour se rappeler à sa mémoire quitte à réduire tout le reste à l'état de poussière.

« J'aurais dû t'écouter, murmura-t-elle à l'intention de Harry. C'est toi, qui avais raison. Depuis le début. Tu as essayé de me prévenir. »

Les lèvres de Harry se pincèrent. Lee leva les yeux vers lui tandis qu'un soupir aigu, désagréable et méprisant s'échappait des narines de son ami.

« Ne me prête pas des sentiments plus nobles que ceux dont je suis réellement capable. Je ne voulais pas rester seul, voilà tout. J'étais pas prêt à me retrouver seul. Il était trop tôt. »

Lee ne sut que lui rétorquer jusqu'à ce que, soudain, sans le moindre avertissement, un souvenir ne remonte des profondeurs de son être, n'écrase ses poumons, et ne traverse sa gorge à toute vitesse. Elle suffoqua – un bruit affreux, indigne, mais il était trop tard pour avoir honte, il fallait qu'elle le lui dise, qu'il sache, c'était urgent, presque vital – et lui attrapa la main à lui broyer les os.

CyrielleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant