CINQ ACTES

Chapitre 22- Joshua.

Les paupières lourdes, je manque plusieurs fois de m'endormir dans le bus qui m'amène au lycée. Je me jugeais trop fatigué pour marcher alors j'ai décidé de prendre le bus, mais je le regrette maintenant, car marcher m'aurait peut-être réveillé.

Le bus s'arrête sur le parking devant le lycée, je me frotte les yeux, attrape mon sac et me dépêche d'entrer. Je marche vers la salle de théâtre, et je ralentis en apercevant Nora accompagnée bien évidemment de son jumeau blond. La première se contente de me saluer gentiment, délestée de sa bonne humeur et de son énergie habituelle, Sam se précipite vers moi et pose gravement ses mains sur mes épaules. Il est proche de moi, très proche.

— T'as à manger sur toi ? J'ai vraiment trop faim.

Oh. Je m'attendais à quelque chose de plus important.

— Nora n'a rien ? m'étonné-je.

— La nourriture me donne envie de vomir le matin quand j'ai mes règles, donc j'ai rien pris, intervient la concernée en grimaçant un peu.

Non sans songer au fait que Sam est toujours très proche de moi, je glisse une main dans la poche de mon sac et lui donne les derniers bonbons en forme de licorne que nous avions achetés mercredi dernier.

— Je n'ai pas mieux.

— Tu me sauves la vie, merci ! s'écrie-t-il joyeusement avant de me serrer dans ses bras.

Je me raidis brusquement, réalise ce qui est en train de se produire et passe maladroitement un bras autour de ses épaules pour lui rendre l'étreinte.

Il me relâche et recule pour s'adosser au mur et manger ses bonbons, l'air vraiment heureux. Il est vraiment trop mignon, ça ne me facilite pas la tâche. Il m'énerve, parce qu'à le voir sourire comme ça, il me donne envie de le serrer dans mes bras et de l'embrasser. Sauf que pour plusieurs raisons évidentes, je ne peux pas faire ça. Alors je me contente de baisser les yeux sur mon téléphone en essayant de mettre fin à mes pensées concernant Sam, celles qui tournent en boucle dans ma tête depuis mercredi matin.

Je n'ai jamais ressenti ce genre de choses, avant lui. Les mecs avec qui je couchais, c'est eux qui voulaient de moi, pas l'inverse. Et on ne s'embrassait pas. Jamais. Je refusais toujours que leurs lèvres touchent les miennes. L'acte sexuel en lui-même ne représentait rien de plus qu'un échappatoire, alors qu'un baiser me semblait - et me semble toujours - beaucoup plus symbolique et important.

Alors avoir envie d'embrasser Sam, ça en dit beaucoup.

— Tiens, prends le.

Le blond me tend le dernier bonbon, que j'accepte sans hésiter. La première sonnerie de la journée retentit alors, il ne faut pas très longtemps pour que d'autres individus de notre classe arrivent à leur tour. J'admets être déçu de ne pas pouvoir rester plus longtemps seul avec mes amis, mais je n'ai pas le choix, de toute évidence. Nous entrons dans la salle.

Le professeur arrive deux minutes et huit secondes après la sonnerie, il semble de très bonne humeur. Discrètement, il demande d'abord à Nora comment elle se sent, ce qui me rappelle une fois de plus que c'est avant tout son père, et une fois rassuré sur son état il monte sur la scène.

— Aujourd'hui, vous allez répéter comme d'habitude sur scène en remplaçant les élèves qui vont travailler avec moi. Un par un, je vais vous faire travailler individuellement votre personnage pour que vous maitrisiez ses mimiques, son caractère et ses habitudes au maximum.

Il balaie la salle du regard et ce dernier se pose sur le bout de la rangée de chaises, donc la place où se trouve Sam.

— Sam, je commence par toi.