Werewolves

Rencontre avec le diable

San, plongée dans un profond sommeil, se remémore son enfance. Il y a plus de cinq ans, c'était une petite fille heureuse, pleine de vie. Elle vivant avec ses parents, elle était fière d'être leur fille. Elle était certes dure de caractère, mais surtout insouciante. Et c'est cette San que Bagha tua en même temps que ses parents. Bien qu'elle vivait, qu'elle respirait, qu'elle mangeait, elle se sentait morte. Bagha lui avait volé sa vie. Il l'avait asservi, elle avait été dénuée de son être. Elle n'était plus qu'une coquille vide. Il passait pour un philanthrope en l'adoptant, mais, dans l'ombre, il lui faisait vivre des cauchemars qu'aucun enfant n'avait à vivre dans sa vie.

Les routines étaient épuisantes. Elle était comme sa petite femme : ménage, repas, courses... Elle avait, à dix ans, été réduite à un esclavage sans pareil, et ce au nez et à la barbe de tous, Bagha sachant parfaitement comment leur dissimuler la vérité. Muselée, elle ne pouvait se plaindre. Bagha la formait aussi au combat. Pour une louve aux yeux bleus, il fallait qu'elle se montre digne, lui disait-il. Il était impitoyable, cruel, et sévèrement strict pendant les entraînements. Il n'hésitait pas à y aller avec toute sa force, la démolissant sans sommation. Elle avait été durcie par tout cela, et devint une guerrière qui n'avait ni peur ni pitié. Elle était devenue une vraie soldate, mais au prix de son enfance et sa liberté.

Mais ce qui était pire, c'était de subir ses crises. Elle savait que Bagha ne se remettait pas de ce qu'il avait fait à ses parents. Il s'en voulait, non pas de les avoir tué, mais de n'avoir pas pu les convaincre de rallier sa cause. A chaque fois, il perdait la raison et pensait s'adresser à eux quand il se tournait vers San. Il essayait de les raisonner, de les convaincre, en vain. Et il les tuait, encore et encore. Et toute cette rage retombait sur elle. Elle devait à chaque fois en pâtir, pour payer la dette que ses parents avaient à l'encontre de Bagha. Il la battait copieusement, déchirait sa peau à l'aide de ses griffes, la mordait, et autres choses violentes et cruelles. A de rares occasions, il la violait en prononçant frénétiquement le prénom de sa mère, dont il semblait être amoureux. Tout ceci finit par devenir une routine pour San. La routine de l'enfer. Et, à moins de vaincre ce monstre, elle ne pouvait rien y faire. Elle était tout à lui. Les sévices qu'il lui faisait subir était ancrés dans sa peau. Elle ressentait ses griffes pénétrer sa peau, déchirer sa chair, ses poings marteler son petit corps sans répit. Elle sentait, en tout temps, ses grosses mains se resserrer autour de son cou, et l'étrangler jusqu'à ce qu'elle se sente partir...
---
San sursaute, émergeant brutalement de son cauchemar. Sous la peur, elle laisse briller ses yeux bleus, et plante ses griffes sur le sofa sur lequel elle était couchée. Sisko, en face d'elle, regarde les traces de griffures avec peine. Balto, lui, ne se soucie que des conséquences d'avoir ramené la fille de Bagha chez eux.

- Qu'est-ce que je fais ici ? demande-t-elle.
- On t'a retrouvé agonisante, répond Sisko.
- Et vous auriez dû me laisser là-bas. Vous n'avez aucune idée de ce qui vous arrivera si Bagha apprend que vous m'avez sauvé.
- C'est ce que je lui ai dit, en plus, dit Balto.
- En tout cas, merci de m'avoir sauvé, dit-elle en se levant précipitamment, mais je dois y aller.

Mais Sisko l'arrête par le bras, et la tire vers lui.

- Ne m'arrête plus jamais comme ça, dit-elle en lui révélant ses yeux bleus, pour qu'il sache qu'elle est prête à se battre.
- Pas besoin de t'extasier, dit-il. Mais tu n'iras nulle part tant que tu ne me dis pas pourquoi ton père cherche le Wendigo.
- Il vous en a parlé ?

Il hoche la tête, et elle se calme et se rasseoit sur le sofa déchiré.

- Il a l'intention de retrouver le Wendigo pour s'approprier son pouvoir, dit-elle.
- Et comment compte-t-il faire ça ? demande-t-il.
- D'après lui, si le Wendigo est bien un Arcadien, il devrait se soumettre à son pouvoir d'alpha, et il pourrait s'en servir comme d'une arme infaillible qui l'aiderait à asseoir son autorité.
- Il lui est donc impératif de le trouver dans les plus brefs délais. Et j'imagine que ça a à voir avec le fait qu'il repousse la date de l'invasion de Kensal Green Village ?
- Tout à fait. Il tient à avoir le plus de force possible pour raser la meute du Sud en une attaque.
- Je comprends. J'espère juste que Kazan s'amènera avant que ça ne tourne au vinaigre.
- Kazan ? demande Balto. Il n'est pas censé être mort ?
- Qu'est-ce que tu compte faire, maintenant ? demande San à Sisko, ignorant complètement Balto.
- Je dois retrouver le Wendigo, répond-t-il. Et pour ça, je dois explorer une piste à Golden East Valley.
- Comment tu vas t'y prendre sans qu'il ne soit au courant ?
- C'est grâce à lui que je vais y arriver.
- Attends, tu veux dire que tu vas le retrouver avec l'aide de Bagha ? C'est complètement fou !
- C'est le seul moyen d'y arriver. Et tu vas me couvrir, comme ça je pourrais communiquer les résultats de mes recherches à Maïka.
- Tu sais où est Maïka ? demande encore Balto. Mais il se passe quoi, à la fin ?
- Tu cours d'énormes risques, dit San, ignorant toujours Balto. Si Bagha apprend que tu essaie de lui cacher des choses, ou s'il a idée que tu es en contact avec des déserteurs, tu vas le payer de ta vie.
- Je sais ce que je fais. Et je dois faire quelque chose. La ville se détruit à petit feu, et Kazan fait tout de son côté pour essayer d'arranger les choses. La moindre des choses serait de lui faciliter la tâche et de retrouver la trace du Wendigo.
- Ça doit être cool d'avoir des amis aussi loyaux. Je serais presque jalouse pour ce Kazan.
- Je... ne suis pas son ami à proprement parler. Et ce n'est pas pour lui que je fais ça, c'est pour la meute et pour Maïka. Je refuse qu'elle vive dans un environnement comme celui-ci. Elle mérite mieux que tout ça.
- OK, je comprends. Alors je te suis. J'aimerais moi aussi aider, je le dois bien à Faolan.
- D'accord, alors rendons-nous utile ensemble et allons traquer le Wendigo.
- Sans soucis. Mais qu'est-ce qu'on fait de lui ? demande-t-elle en désignant Balto, perdu dans ses interrogations.
- Ah, lui ? Il va venir avec nous.
- Hors de question, proteste-t-il. Je n'ai rien compris à ce qui se trame, mais ça sent le coup fourré et je n'ai vraiment pas à cœur de m'en mêler.
- Si je me fais prendre, j'avouerai tout et je t'impliquerai dans toute cette histoire en te désignant comme mon complice, dit Sisko sur un air de défi.
- Et Bagha n'est pas du genre à faire des procès, renchérit San. Il préfère donner son jugement directement, et dans la plupart des cas, c'est assez mortel.