Chapitre 27

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Quelque part, Ontario

Samedi 24 juin

[Icarys]

Une douleur fulgurante m'oblige à ouvrir les paupières. Ma tête est lourde. Le voile de mon esprit se lève peu à peu et les souvenirs y affluent : le dîner d'anniversaire de Lylith chez ses parents, l'apparition de Jeremias et enfin, moi qui me jette dans le portail.

Je fronce les sourcils. Je me souviens de la morsure glacée lorsque j'ai traversé cette fenêtre de ténèbres, mais après ? Je me rappelle vaguement un décor obscur avant de... sombrer.

Je n'ai pas perdu connaissance par hasard, j'ignorais même que ça pouvait m'arriver. Je ne crois pas m'être pris un violent coup à la tête, alors j'opte pour la théorie de l'enchantement. Ce qui signifie que... j'ai été piégé.

Jeremias voulait que je le suive ? Mais pourquoi ? Tout portait à croire qu'il voulait enlever sa fille.

Réfléchir accentue ma migraine, et la douleur qui irradie mes membres reprend le dessus sur mes pensées. Je dévie mon regard sur la droite, puis sur la gauche. Je suis torse-nu, j'ai les bras écartelés, attachés à deux poteaux métalliques bien plus propres et récents que la pièce moisie dans laquelle je me trouve.

Je ris intérieurement. On pourrait presque croire qu'ils ont été installés spécialement pour moi.

Des chaînes enroulent mes membres, de l'épaule au poignet pour me maintenir aux poteaux. Je n'ai aucune amplitude de mouvement. Je suis agenouillé sur du béton mal entretenu. Je tente de me tourner. Mes chevilles fixées au sol par des entraves trop serrées m'obligent à garder cette position inconfortable.

Néanmoins, ce n'est pas la souffrance provoquée par mes rotules suppliciées ou par mes bras trop tendus qui est le plus difficile à supporter, c'est celle engendrée par les chaînes qui emmaillotent mes ailes.

Un grondement s'échappe de ma gorge lorsque je tente de me libérer. Je m'acharne sur mes liens, me blessant au passage, en vain. Ma guérison rapide ne permet pas à la douleur de s'atténuer.

— Te débattre ne sert à rien, résonne une voix dans le couloir.

La grille rouillée de ma cellule et la luminosité d'un spot placé à l'extérieur me permettent d'apercevoir une ombre se mouvoir et s'approcher. Jeremias apparaît derrière la grille, son éternel sourire arrogant plaqué sur le visage.

Il ouvre la porte, même pas fermée à clé. Il doit vraiment avoir confiance en mes entraves pour négliger ainsi son verrouillage. Quoique, ce n'est pas un battant usé qui me résisterait si je parvenais à me délivrer. Il a sûrement jugé que c'était dans tous les cas inutile. Car même si cet homme a éveillé en moi une colère intense, j'ai bien saisi qu'il n'était pas idiot.

D'ailleurs, c'est parce qu'il est malin qu'il m'a enchaîné de la sorte.

— Tes liens sont un peu serrés, ne m'en veux pas. J'ai dû prendre mes précautions. Après tout, je garde un dieu en captivité.

Ses mots me font crisper la mâchoire.

— Le jour où je me libèrerai, tu vas en subir les conséquences.

Ma voix est d'une froideur inhumaine et d'un calme effrayant.

— Mon plan A est que ça n'arrive pas. Mon plan B est d'être loin dans le cas contraire, sourit-il.

— Je te retrouverai et je te tuerai pour le mal que tu lui as fait.

L'image de Lylith se matérialise dans mon esprit. Jeremias ricane.

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