Chapitre 39

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Caverne, Ontario

Samedi 22 juillet

[Icarys]

J'ignore comment nous en sommes arrivés là. Il y a encore trente secondes, j'étais en train de briser le sceptre après avoir anéanti le calice. Je me suis retourné et le spectacle qui s'est offert à moi m'a foudroyé.

Lylith titubait, une main sur sa poitrine ensanglantée. À côté d'elle, Jeremias tenait un couteau.

J'ai hurlé son nom, ce qui a attiré l'attention des autres, trop occupés à porter secours aux blessés. J'ai accouru vers ma femme en repoussant Jeremias.

Maintenant agenouillé au sol, je la tiens dans mes bras. Son sang imbibe son haut et ruisselle sur mon corps. Je presse ma paume contre sa blessure afin de stopper l'hémorragie, mais c'est peine perdue.

Ses paupières commencent à se fermer.

— Lylith ! Lylith, garde les yeux ouverts !

Elle ne semble pas m'entendre, elle fixe un point au plafond, une grimace de douleur déformant ses traits. Elle écarquille une dernière fois ses prunelles avant de les clore totalement.

Je relève la tête. Des enchanteurs maintiennent Selena et Jeremias au sol. Katelyn s'est approchée sans un bruit et se tient près de moi.

— On doit sortir d'ici et l'emmener à l'hôpital ! Vite ! dis-je.

Je n'ose pas me relever, de peur d'aggraver l'était de ma femme. Je zieute la caverne. Nous ne savons pas par où sortir exactement. Quitter les lieux va nous prendre du temps.

— C'est trop tard, me répond-elle.

— Non...

Je refuse de l'admettre.

Je reporte mon attention sur celle que j'aime. Elle est pâle, elle a perdu trop de sang. Sous ma main, je sens son pouls devenir presque inexistant.

Une douleur horrible s'empare de moi. Jamais je n'avais eu si mal. La torture que j'ai subie le moins dernier me semble désormais ridicule. Mon sang est aussi coupant que des lames de rasoir. Ma poitrine est comprimée et mon cœur me fait si mal que j'ai envie de l'arracher.

J'ai détruit le calice... le seul objet qui pouvait tout guérir.

Mes lèvres commencent à trembler. Une boule se forme dans ma gorge et de l'humidité apparaît au coin de mes orbites encore lumineuses. J'aborde encore ma forme céleste, mes ailes désespérément pendues dans mon dos.

Je murmure encore une fois :

— Non...

Ce n'est pas possible. Ça doit être un cauchemar. Elle ne peut pas mourir maintenant. Même si je pourrais la rejoindre au ciel dès maintenant, elle est trop jeune pour mourir. Il lui reste encore beaucoup de choses à vivre.

Il nous reste encore trop de choses à vivre.

Je lance une œillade à ses doigts qui serrent encore l'amulette et un sanglot s'échappe de mes lèvres. Un liquide chaud roule sur mes joues et s'accumule au bout de mon menton.

Depuis que je suis incarné, je n'avais encore jamais pleuré.

Un silence de mort pèse dans la grotte géante, si bien que mon chagrin résonne contre les parois dans un écho déchirant.

Des perles argentées se mettent à goutter sur le buste de Lylith.

Alors il n'y a pas que mon sang qui possède cette teinte.

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