Chapitre 40

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Griverfall, Ontario

Dimanche 23 juillet

[Icarys]

Je referme la porte. Ma poitrine me serre.

Je lève ma main et la pose sur mes paupières. Mes yeux brûlent.

Que vient-il de se passer ?

Je m'attendais à voir de la peur dans son regard. Après ce que j'ai fait hier à Jeremias et ce que j'ai failli infliger à sa sœur, je me doutais qu'elle allait avoir du ressentiment à mon égard. Cependant, je ne m'attendais pas à ce qu'elle me rejette. Elle veut que j'utilise l'amulette et je parte, que je retrouve ma forme au plus vite.

Il y a trois mois, c'est ce que j'aurais souhaité, mais aujourd'hui... je veux rester auprès d'elle encore un peu. Je veux mener une vie humaine à ses côtés.

Je retire ma paume de mon visage et découvre que des traces argentées la recouvrent. Je pleure ?

— Tout va bien ?

Je relève la tête. Je découvre Kurt et les parents de Lylith face à moi.

— Oui, dis-je simplement.

Je m'avance dans le couloir pour me diriger vers le hall d'entrée d'Olga.

— Allez-y, je vous rejoins, lance une voix dans mon dos.

Je ne m'en préoccupe pas et lorsque je pose mes doigts sur la poignée de porte, une masse chaude agrippe mon épaule.

— Attends, fiston.

Je me tourne vers le père de Lylith. La bienveillance paternelle qu'il m'accorde – à moi, un esprit bien plus vieux que l'humanité – me ferait sourire dans un autre contexte.

— Qu'est-ce qui ne va pas ?

— Rien.

Il fronce les sourcils.

— Ne me prends pas pour un âne. Que s'est-il passé ? me rabroue-t-il.

Je soupire.

— Elle ne veut plus de moi.

Il me dévisage de longues secondes, perplexe.

— Ma fille est folle amoureuse de toi, ça m'étonnerait.

— J'ai tué quelqu'un de sang-froid sous ses yeux.

— Je sais. Katelyn nous a tout raconté. Je pense qu'elle est en état de choc. Elle a également failli y rester, d'ailleurs. Je dois te remercier de l'avoir sauvée d'une mort certaine.

Je ne tiens même pas compte de ses remerciements, trop blessé.

— Elle ne veut pas d'un tueur.

— Tu n'en es pas un. Je suis contre le meurtre en guise de punition et je ne cautionne pas ton acte envers Jeremias même s'il le méritait. En revanche, il ne faut pas oublier le contexte particulier dans lequel vous vous trouviez. Les ombres et les zombies de ce fou ont tué des enchanteurs qui vous accompagnaient. Parfois la situation nous impose de commettre de terribles actions.

Je me mords la lèvre. J'ignore si sa compréhension me soulage ou nourrit davantage mes remords.

— J'ai perdu le contrôle de mes pouvoirs. C'est ça qui effraie Lylith. Elle a raison, ça pourrait se reproduire. Je pourrais m'en prendre à l'un de vous.

Il ouvre la bouche pour me contredire avant de la refermer aussitôt. Certes, ma colère a été nourrie par la presque mort de ma femme, mais ce qui a suivi, cette sensation de vide et de supériorité, ça n'a rien d'humain.

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