Le bruit percutant des vagues contre mes doigts et les rochers sont les premiers sons qui me font ouvrir brusquement les yeux. Allongé depuis un peu plus de deux heures sur ma planche de surf au beau milieu de la mer, je ne parviens pas à comprendre les raisons qui m'ont poussé à venir ici.
— Vingt-et-un.
Chaque étoile qui s'allume est un nombre en plus à inscrire dans mon esprit, une personne qui s'éteint mais qui a la possibilité de renaître brillamment. Une possibilité qu'Emire fasse partie d'eux.
— Vingt-deux. chuchotais-je.
Je n'ai pas pleuré en sortant de l'hôpital, ni en grelottant de froid contre l'eau glacée de la Jolla Cove, le manque d'émotions m'a permis d'avancer sans me soucier des plaintes de Kelly et celle de Dallas. Pourtant je ne pouvais pas rester près de lui en sachant que la fin qu'il a toujours voulue approche bien trop vite.
— Vingt-trois.
Mes cheveux bruns trempent désormais sous l'eau en laissant une douleur désagréable au niveau de ma nuque, moins importante que celle présente dans mon cœur. Au loin, mon téléphone s'est mis à sonner durant trente minutes avant de s'arrêter. L'envie de répondre ne m'est jamais venu, car je savais qu'à ce moment-là, mes rêves de voir Emire se réveiller se transformeront en cauchemar.
— Vingt-quatre..
Bordel, j'espère que ce n'est pas lui. J'ai toujours souhaité qu'il brille, peu importe la façon dont il le fait. Sauf de cette manière-là, en disparaissant de mon monde. Des bruits de pas au large de la plage se font entendre, et je me dis qu'il est enfin temps de partir, de tout laisser derrière moi. Quittant ma planche pour atterrir entièrement sur le côté, une voix me fige soudainement dans mon élan alors que mon cœur cesse bien trop vite de battre.
— Fais attention à respirer avant d'entrer dans l'eau.
Mes yeux se relèvent vers une silhouette, des boucles blondes virevoltant et des yeux bleus éclatants. Ai-je rêvé de ce moment tellement de fois qu'il a fini par se produire ?
— Ce n'est pas possible.
Pourtant son teint encore pâle et son sweat noir recouvrant ses épaules prouvent qu'il est réel.
— Si tu avais répondu à ton foutu téléphone, je ne serais pas en train de mourir de froid sur cette plage après être sorti d'un long coma.
L'impression d'avoir dépassé la barre des deux heures semble trop légère, il ne peut pas s'être réveillé en si peu de temps.
— Pourquoi mon esprit continue de me torturer, je ne comprends pas.
Fermant les yeux un peu plus fort que prévu, des sanglots s'accaparent de mon corps.
— Nage jusqu'à moi Elone, s'il te plaît.
Non non non. Il va disparaître.
— Non. chuchotais-je.
Alors c'est lui qui s'est élancé en premier, malgré le froid qui nous recouvre il a fini par me rejoindre dans un silence complet.
— Regarde-moi.
Pourtant ses doigts sur mes bras semblent bien présents, son souffle près de ma nuque me crée des frissons que je n'avais pas ressenti depuis quatre mois.
— Deux jours. Je suis réveillée depuis deux jours à peine et tu n'étais pas là.
Mes yeux s'écarquillent quand il mentionne son réveil, peut-être qu'il est finalement bien réel.
— Je ne laisserais pas ton cerveau m'effacer, c'est une promesse Elone.
Son sourire se loge près de mon épaule droite alors que mes doigts s'enroulent avec hésitation sur ses boucles blondes.
— Dis-moi que ce n'est pas un souvenir que mon esprit a décidé de créer pour t'oublier. chuchotais-je.
Peu importe si ses halètements de douleurs sont dus à l'eau glacée sur sa peau ou à mes doigts qui continue d'enserrer ses cheveux. Il est là, et il ne partira plus.
— Est-ce que tu l'espéres ?
Quelques mois auparavant j'aurais répondu négativement sans hésiter, mais désormais la longue torture dans laquelle je me suis mis ne le permet plus.
— Je ne sais pas, Emire.
— Tu es réel Elone, ton cœur est en train de battre à une vitesse phénoménale contre le mien, je ne suis pas un souvenir, je suis là, je suis réveillé.
Les sanglots l'emportent sur mon état d'esprit déjà bien trop important, les dizaines de pilules que j'ai dû prendre ont fait effet.
— Emire..
Il hoche la tête en souriant lentement, avec douceur, et mon cœur est reparti si rapidement que j'ai eu peur qu'il lâche.
— Tu n'as pas décidé de partir, tu.. tu es resté avec moi.
Ses doigts effacent les larmes qui continuent de couler en rejoignant les nombreuses vagues.
— Je suis avec toi Elone, jusqu'au bout.
Le ciel se recouvre d'une énième étoile qui brille un peu plus que les autres, mais cette fois-ci je sais que ce n'est pas Emire, ça ne sera plus jamais lui. Ses jambes s'enroulent autour de mes hanches alors qu'il lie ses lèvres aux miennes.
— Ne me laisse plus seul, s'il te plaît ne m'abandonne pas.
Ses yeux bleus brillent d'une lueur étrange face à mon visage peiné, et c'est à ce moment que son rire a retenti. Au moment où j'ai eu l'impression de revivre.
— Aime-moi plus que l'océan, plus que toi-même et le reste suffira.
En posant avec légèreté mon oreille près de sa poitrine, je réussis à sentir plusieurs battements de cœur régulier, constant, et bordel je n'ai jamais été aussi heureux d'entendre son propre cœur battre aussi fort.
— D'accord, tout ce que tu veux. Absolument tout.
Voyant qu'il continue de grelotter contre moi, je rejoins la plage couverte d'anciennes banderoles avant de le reposer sur le sable.
— Je t'aime, je suis tellement amoureux de toi que l'idée de vivre sans ta présence est impossible.
Son sourire s'agrandit suite à ma phrase tandis qu'il se fraye un chemin entre mes jambes.
— Ne dis pas ça, le monde ne va pas s'arrêter si je ne suis plus là.
" Ce n'est pas la peur de le perdre qui vous angoisse autant, le refus de le laisser partir l'est. Ce monde ne va pas s'arrêter après son départ. "
— Tu es mon univers Emire, sans toi il n'a plus aucun sens.
Sous mes doigts, la blessure sur sa hanche laisse deux cicatrices à peine visibles et une lignée de frissons entre ces dernières.
— Notre histoire d'amour à besoin de moi pour fonctionner, ne l'oublie jamais Nascimento. L'océan a besoin de nous.
Un rictus s'empare de mes lèvres alors que ses yeux se ferment sous la fatigue et le froid, pourtant il reste accroché à mes doigts, il ne va pas partir.
— Je ne risque pas de l'oublier Sosthène.
Estella.
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The Shade Of Sosthène
RomantikEmire Roshan Sosthène. Quatre auparavant, les entraîneurs de surf se déchaîner entre eux pour décrocher le jeune prodige auprès du club le plus réputé de Californie, Bluns Senses Surf, juste avant le drame de sa dernière compétition et la fuite de s...