Double je(u)

Chapitre 13 : Une mélodie dissonante

Depuis mon annonce faite lors du repas, Grand-mère s'affairait pour achever ma robe, trop heureuse de me voir participer à nouveau aux célébrations de la cité.

Lekha était aussi excité par la nouvelle. Il assurait que cette année serait particulière à cause de la présence des humains. Sur ce point-là, je ne pouvais qu'être d'accord avec lui. Ils seront simples observateurs lors de la cérémonie organisée pour nos défunts mais pourront prendre part au banquet qui suivra.

Espérons qu'il n'y aura pas d'incidents.

Las de toute cette joie débordante, je décidai d'aller tenir compagnie à Asha avant le jour de son opération.

En me rapprochant de sa chambre, je constatai qu'une douce musique s'en échappait. Intriguée, j'accélérai le pas afin de découvrir au plus vite qui tenait compagnie à la fillette.

Je découvris qu'il s'agissait d'un humain au physique plus qu'étrange. Petit et trapu, son crâne présentait une large calvitie et était encadré par des cheveux gris longs et raides tombant jusqu'à ses épaules.

Ses mains virevoltaient gracieusement sur une flûte d'où s'échappaient des notes dont l'effet apaisant m'atteint vivement.

Asha semblait être également sous l'emprise de cette musique : assise dans son lit, elle gardait ses yeux clos et souriait paisiblement.

Je m'adossai alors au mur et laissai le musicien achever son morceau, fermant les yeux afin de profiter au maximum du calme qu'il suscitait sur mon esprit.

- Keyaaa ! Comme je suis heureuse de te voir ! s'exclama la fillette une fois le morceau terminé. As-tu entendu la belle musique jouée par Senritsu ? Elle tourna son visage vers l'homme et poursuivit. C'est une musicienne incroyable.

Musicienne ? C'est une femme ? Quel physique trompeur.

- Je m'appelle Senritsu. Désolé de ne pas avoir pu officiellement me présenter plus tôt. Sa voix douce et calme contrastait terriblement avec son apparence disgracieuse.

- Pas grave fis-je simplement.

- Laissons notre jeune amie se reposer et allons discuter dans le salon proposa Senritsu en se levant. La matinée a été éprouvante avec toute cette agitation.

J'acquiesçai d'un signe de la tête et lançai un dernier regard à Asha qui me salua de la main sans rien dire.

Marchant vers le salon, j'observai Senritsu qui me précédait. Son tempérament calme et rassurant m'avait séduit instantanément. À Asha aussi apparemment.

Une fois dans le salon, la musicienne s'installa sur le petit fauteuil et posa précautionneusement sa flûte sur l'un de ses accoudoirs. Elle me sourit chaleureusement comme pour me signifier de faire de même. Je m'assis sur le fauteuil qui faisait face au sien, attendant qu'elle prenne la parole en premier.

- Asha m'a beaucoup parlé de toi. Le lien qui vous uni est très fort.

- Je la considère comme ma petite sœur. Je ferai tout pour elle.

- Et pour éviter à ses parents qu'ils ne perdent le seul enfant qu'il leur reste ajouta-t-elle.

Je tentais de masquer l'embarras qui me gagnait mais mon corps me trahissait. Mes yeux se fixèrent sur mes chaussures et je triturai nerveusement mes mains. L'inconfort que j'éprouvais ne passa pas inaperçu.

- Asha m'a dit que son frère et toi étiez ... elle n'acheva pas sa phrase par politesse.

- Asha dit beaucoup trop de choses dis-je sans méchanceté. Depuis notre enfance, Hari, Lekha et moi étions inséparables. Tout le monde nous appelaient les Lekhayari.