Au moment où le réveil retentit pour annoncer onze heures, je le projette d'un geste colérique et enfouis ma tête dans l'oreiller. Ma nuit s'est déroulée entre pleurs et mouvements incessants à la recherche d'une position où la douleur me serait épargnée, en vain. La souffrance s'est propagée dans tout mon corps et persévère encore malgré l'antalgique. Le visage de Lucian hante mes rêves, et son odeur persiste sur ma peau, ce qui me suscite des nausées. Je le déteste et souhaite lui faire payer la torture qu'il m'a infligée. Mais une part de moi se résigne, car il a raison : c'est moi la traîtresse, celle qui a vendu Conrad au FBI. J'aurais dû être plus attentive, plus minutieuse dans mes actions, mais ma bêtise m'a conduite à ce problème insurmontable. À présent, Jonas détient le téléphone où il peut savourer la destruction de chacun d'entre nous, et je suis contrainte d'accepter mon sort. Aucune porte de secours ne s'offre à moi. Je frappe le matelas avec force, étouffant mes cris dans les draps avant de me relever et de me diriger vers la salle de bain.
J'ôte mes vêtements et contemple mon corps marqué par la torture. Des ecchymoses parsèment mon torse, témoignage des coups reçus. Avancer reste difficile, mais je m'en sors mieux qu'hier. Je grimace en les effleurant du bout des doigts, soupirant de frustration avant d'entrer dans la douche. Tobias souhaite me parler, donc je me dépêche. Je passe rapidement le savon là où les mains de Jonas m'ont touchée pour éliminer son odeur répugnante, mais en vain. Son empreinte persiste, hantant mes pensées.
Je pose mes paumes sur le carrelage pour laisser toute ma douleur s'écouler. La réflexion m'échappe, et lever la tête semble impossible. J'aimerais parler à ma mère, recevoir ses conseils, mais je n'ai personne vers qui me tourner. Si je reste ici, mon âme risque de se dissoudre dans cet océan de torture que je lui inflige. J'inspire profondément, puis sors pour m'habiller rapidement. J'attache mes cheveux en queue de cheval et glisse à l'extérieur de la chambre.
Parcourant les couloirs, j'ai l'impression que tous les regards convergent vers moi. L'information a probablement fuité. Sont-ils convaincus de ma trahison ou ressentent-ils de la compassion ? Je n'en sais rien, mais mes pensées incessantes menacent de faire exploser mon être. Je baisse les yeux, serrant les poings. Je ne peux pas m'effondrer, je dois rester forte.
Je frappe à la porte de Tobias, qui m'ouvre immédiatement. Il porte son costume bleu, celui qu'il réservait aux conversations privées avec maman. J'incline la tête pour le saluer et m'assois sur le fauteuil. La discussion à venir me tourmente, tout comme les conséquences qui s'annoncent. Il n'y a plus de retour possible, les masques vont tomber.
— Je m'excuse, admet-il. Si je n'avais pas donné l'ordre à Lucian de débusquer la taupe, il ne t'aurait jamais infligé de telles atrocités. Je te promets qu'il endurera autant de souffrance que toi, tu as ma parole.
— C'est un gros connard, je ne cautionne pas ses actes, mais il a agi en accord avec ce qu'il croyait être juste, pour le gang.
Je serre la mâchoire et secoue la tête devant la réalité de mes aveux. Bien que l'idée de lui arracher quelques doigts aurait pu être tentante, je dois rester lucide et cesser de me voiler la face. Quant à mon père, il s'installe en face de moi et me scrute avec une intensité telle qu'elle parvient à me déconcentrer, à susciter l'angoisse en moi.
— As-tu une quelconque implication dans cette affaire ? me demande-t-il.
Quand j'étais enfant, Tobias avait l'habitude de disparaître sans se préoccuper de sa famille. Il n'y avait que Jonas, mon frère, qu'il adorait. Ils passaient du temps ensemble, partaient à la chasse le week-end, mais pour moi, il n'a jamais manifesté le moindre intérêt, ni posé les yeux sur moi.
Chaque matin, en me réveillant, et chaque soir, en m'endormant dans ma chambre, ses disputes avec maman résonnaient dans l'air. Même en plaçant mon coussin sur mes oreilles, leurs voix persistaient, pénétrant mon esprit et glaçant mon sang. Karine n'a jamais goûté au bonheur. Les pleurs étaient son lot quotidien, et malgré mes tentatives de réconfort, elle restait paralysée par la peur.
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The Thieves Of Hearts, TOME 1 : Bienvenue en enfer - DARKROMANCE
Romance« N'oublie jamais que tu n'es qu'une proie au milieu des prédateurs, et si jamais l'envie me prend de te dévorer, je le ferai volontiers. » *** Tessa, élevée par sa mère, voit sa vie basculer lorsqu'elle est accusée à tort de complicité de meurtre...