Ici - Tome 2

Chapitre 25

Je reconnus de suite son regard vif malgré l'obscurité qui régnait et sa paupière tuméfiée. Cependant, il n'avait plus rien à voir avec le second qu'il était encore il y a quelques mois : ses muscles avaient fondus pour ne laisser que sa peau sur ses os. Son visage était couvert de bleus, ses cheveux étaient trop longs et sa voix enrouée.

— Alex, bordel, qu'est-ce que tu fous là ?

Il se frotta son œil valide pour être certain de ne pas rêver, et me détailla.

— Tu es blessée ? Tu sens le sang.

Abasourdie, je secouai la tête de droite à gauche.

— Des égratignures... soufflai-je. Matt, qu'est-ce qu'ils t'ont fait ?

Pourquoi était-il dans cet état ? Sa nature de loup-garou aurait dû le soigner. Il n'était plus que l'ombre de lui-même.

Il lissa son t-shirt et esquissa un sourire.

— J'ai entamé un petit régime pour retrouver la ligne. Quant à ça, me dit-il en désignant ses ecchymoses, c'est la grande mode par ici.

Son sourire triste laissa place à l'accablement.

— Robin sait que tu es ici ?

Une lueur d'espoir vacilla dans son regard et disparue aussitôt.

— Non, bien sûr que non, sinon il serait déjà là, soupira-t-il en s'affaissant sur le sol.

Je posai ma main sur la sienne à travers les barreaux. Elle était gelée.

— Matt, où est ton loup ? Pourquoi ne te soigne-t-il pas ?

— Ils me donnent un truc dans la nourriture, un inhibiteur. Ils n'ont pas confiance en la solidité de cette cage face à un loup-garou apparemment. Samuel en avait déjà entendu parler, certains de nos chercheurs travaillaient là-dessus pour maîtriser les loups incontrôlables, plutôt que voter leur mise à mort. Jamais je n'aurais pu imaginer d'être l'un des premiers cobayes.

— Qui sont ces gens ? Est-ce que ça un rapport avec Damian ?

— Je n'en sais rien. Je suis navré, mais je n'ai pas beaucoup d'infos. Les seuls moments où je sors d'ici, c'est quand ils viennent m'interroger, et autant te dire qu'ils ne sont pas très loquaces, ils ont un faible pour le son de ma voix.

Il releva la tête, et ses yeux accrochèrent les miens.

— Alex, je te jure que je n'ai rien dit, je n'ai pas parlé. Ils posaient des tas de questions sur toi et sur Robin mais je me suis toujours tu. Jamais je ne trahirais la meute, je préfèrerais mourir. J'espère que tu le sais ?

— Je te crois, le rassurai-je. Qu'est-ce qu'ils nous veulent ?

— Je ne suis pas sûr, avoua-t-il en se triturant les doigts. Ils cherchent une solution à un de leur problème, mais je ne sais pas quoi exactement. Ceux qui s'occupent de moi ne disent rien, ce ne sont pas eux qui sont aux commandes. Ils veulent savoir qui tu es, d'où tu viens, comment vous vous êtes rencontrés, quels sont tes pouvoirs... Je reste silencieux, mais ça ne plaît pas trop aux sitrams, acheva-t-il en me désignant son visage.

— Les sitrams ? demandai-je fébrilement.

— Oui, les gars qui t'ont amené sont des sitrams. Et il y en a plein d'autres.

— Je croyais qu'ils n'étaient plus nombreux ?

— Je le croyais aussi, et on s'est tous plantés, ricana-t-il en haussant les épaules.

Je me laissai glisser au sol.

— Attends, tu veux dire qu'ici, il y a des sitrams et des sorcières ?