Chapitre 4

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Nous restâmes silencieux tout le long du voyage. Nous ne voulions pas en révéler sur nous alors qu'un membre d'une autre meute avait les oreilles qui traînaient.

Après un long moment, le van s'engagea sur une route étroite, puis sur une allée de terre au milieu des prés. Pendant plusieurs kilomètres, l'irrégularité du chemin, les nids de poule et les bosses me soulevèrent l'estomac.

Enfin, au détour d'un bosquet, le manoir s'éleva devant nous. Le domaine était entouré de hautes grilles en fer forgé. Le parc était parfaitement entretenu, les haies taillées au cordeau, la pelouse d'un vert à faire pâlir les jardiniers les plus aguerris. Lorsque nous franchîmes le portail qui s'ouvrit à notre arrivée, je baissai la tête pour apercevoir un peu mieux la bâtisse. Elle était d'une blancheur éclatante. La pierre de tuffaut contrastait avec la glycine fleurie qui grimpait paresseusement au-dessus du perron. De hautes fenêtres s'alignaient sur quatre étages, et je remarquai même un balcon sur le toit.

La voiture se gara devant les quelques marches qui nous séparaient de la terrasse, et Robin me tendit la main machinalement pour m'aider à sortir du véhicule. Son regard était rivé vers l'arrière de la maison, où nous parvenaient des éclats de voix et des odeurs de loups. Concentré, il essayait de voir l'invisible, les choses qu'on tentait de nous dissimuler. Je fis de même, et me focalisai sur mes sens alors que Daniel nous faisait signe de le suivre pour contourner le bâtiment. Des effluves de roses fraiches emplirent mes narines, rapidement couvertes par l'eau de Cologne de notre guide qui me fit froncer le nez. Le jardin était magnifiquement fleuri, digne des plus grands châteaux. Un peu plus loin, je discernai un potager en carré à la française, et un terrain de tennis. Robin pressa ma main pour m'encourager à ne pas laisser paraître mon trouble, et j'entendais les souffles silencieux de James, Ted et Samuel derrière moi. La présence de ma meute me rassurait.

Nous tournâmes à l'angle de la maison pour découvrir une large piscine qui surplombait tout le domaine. Derrière elle, je ne discernais pas les limites du terrain, seulement des hectares de pelouse, puis une forêt. Un lieu idéal pour qu'une meute de loups s'épanouisse sans attirer l'attention.

Justement, les membres du clan de Damian étaient là, et je remarquai tout de suite que Conor ne m'avait pas menti.

Des loups-garous de tout âge étaient installés sur la terrasse, autour de la piscine ou même dans l'eau pour certains d'entre eux. Et une bonne partie n'avait pas daigné mettre un vêtement pour nous accueillir.

Un homme allongé sur un transat se leva à notre arrivée, en écartant les bras d'un air avenant. Ses cheveux clairs lui tombaient sur les épaules, et il portait sur son crâne une paire de lunettes de soleil qui devait coûter un mois de mon salaire Chez Ed.

— Ah, nos invités sont là ! s'exclama-t-il en nous rejoignant à grands pas.

Lui avait eu la décence de s'habiller. Sa chemise blanche était ouverte sur son torse, et il était pied nu sous son pantalon beige. Sa large montre en or luisait au soleil et m'éblouissait.

Je fis rapidement le tour des émotions qui m'entouraient.

L'homme qui marchait vers nous était excité, et heureux de nous voir. Plusieurs loups étaient inquiets, et se rapprochèrent de nous en nous dévisageant. La curiosité qui émanait de toute cette meute me donnait légèrement le vertige. Robin s'arrêta, et l'alpha le prit violemment dans ses bras, nous forçant à nous séparer.

— C'est bon de te voir, clama-t-il en lui tapant dans le dos.

J'espérai qu'il ne fasse pas la même chose avec moi, car il m'aurait certainement brisé la colonne vertébrale.

Ici - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant