Chapitre 32

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(TW : les chapitres commencent à aborder des sujets difficiles tels que la prise de médicaments, les TCA et les conséquences du deuil. Veuillez être vigilant.e.s durant votre lecture si ces sujets sont sensibles pour vous. Prenez soin de vous ).


Ange

In my blood - Shawn Mendes


Après un repas quelques peu compliqué, Kaï et moi avons repris la voiture et nous sommes éloignés de la ville. Nous roulons durant environ une heure et demie, dans le silence le plus total. Nous sommes en plein milieu de la campagne, sur une petite route déserte qui ne doit être empruntée que par les quelques agriculteurs du coin. Je me gare sur le côté de la route et éteint le moteur.

- Qu'est-ce que tu fais ? me demande Kaï d'une voix un peu endormie.

Je me penche pour détacher sa ceinture en souriant.

- Je n'ai pas envie de rouler toute la nuit. Il est tard, je suis fatigué, tu l'es aussi, il faut qu'on se repose. Et cet endroit me paraît parfait.

Il hoche la tête et détourne les yeux pour ouvrir la portière et sortir.

- Je n'ai pas trop envie de discuter pour l'instant, murmure-t-il, le regard vide.

- Okay, pas de problème. On n'est pas obligé d'en parler maintenant.

Il m'adresse un sourire un peu bancal et sort de la voiture, refermant la portière derrière lui. Je le suis du regard. Il s'assied dans l'herbe, face à la ville. Étant garés sur une petite colline, nous surplombons les maisons éclairées par les lampadaires. C'est magnifiquement calme, vu d'ici.

Quelques minutes plus tard, mon téléphone sonne. Le nom de Kaï s'affiche sur l'écran. Je décroche. Je ne dis rien, et il ne parle pas non plus. Nous restons simplement en ligne, lui assis dehors, moi assis sur le vieux siège poussiéreux de la voiture de mon père, à nous écouter respirer. Il fixe le vide qui s'étend en face de lui, la Lune qui éclaire la nuit, et les étoiles qui scintillent dans le ciel. Moi, malgré ce beau spectacle qui s'offre à nous, je n'ai d'yeux que pour lui. Assis sur la banquette arrière, la tête reposant contre la vitre, les genoux contre la poitrine, je le contemple, mon téléphone posé à côté de moi. Nous restons ainsi durant un très long moment, jusqu'à ce que sa voix fragile ne brise le silence.

- Est-ce que tu peux venir ? S'il te plaît.

J'ouvre la portière et sort. L'air se fracasse contre ma peau comme une vague sur un rocher lors d'un jour de tempête. Je regrette de ne pas avoir pris de manteau plus chaud. J'ai toujours été assez sensible au froid. Je n'aime pas vraiment cela. Je préfère être bien au chaud, emmitouflé dans une couverture, recroquevillé près du feu, allongé entre les bras de Kaï. Lorsque j'expire, l'air se colore d'un blanc fantômatique à cause de la différence de température. J'aime penser que je viens d'expirer une minuscule partie de mon âme qui restera ici pour toujours, figée dans ce moment hors du temps, à la fois triste et éblouissant.

Je reste en ligne jusqu'à ce que j'arrive près de Kaï. Je me laisse tomber à ses côtés et raccroche avant de ranger mon téléphone dans ma poche. Il passe un bras autour de ma taille et se rapproche de moi pour poser sa tête contre mon épaule. Il est toujours aussi silencieux. Je suis persuadé que tout doit être très bruyant dans sa tête, alors je ne veux pas en rajouter. Je ne veux pas essayer de l'aider d'une manière classique, pour la simple et bonne raison que Kaï n'est pas quelqu'un de classique. Kaï est unique. S'il ne veut pas parler tout de suite, je peux me contenter d'être silencieux et de le prendre dans mes bras jusqu'à ce qu'il soit prêt à m'en dire plus ce qui se passe à l'intérieur de lui.

Remember meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant