Dénouement (Spécial Nouvel An 2024)

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Nathalie poussa la porte de l'atelier secret de Gabriel doucement, regardant autour d'elle. Les gonds avaient grincé du manque d'utilisation, mais elle n'avait pu se résoudre à venir plus tôt. D'un pas hésitant, elle alla ouvrir les rideaux qui cachaient la fenêtre, révélant la froide nuit qui régnait encore. Après une seconde de doute, elle s'assît sur la table de travail, les doigts effleurant les tissus autour d'elle. Elle avait besoin de réfléchir.

Ce soir, l'année terminait.

2017.

Elle ne risquait pas d'en oublier un instant, tant elle avait été étrange.

Entre un Bal des Diamants chaotique à la fin de l'année précédente, des attaques et une froideur, une colère sans précédent lors de l'hiver. La tristesse d'Adrien, de Kagami et de Félix, les batailles de Marinette.

La première partie de l'année avait été sombre. Noire comme la nuit, un couvercle d'ébène sur leurs cœurs. Y respirer, y évoluer avait été difficile, destructeur, écrasant. Tout prenait sa respiration, l'étouffait. Jusqu'au dernier jour. Le jour de la mort. Le jour où le monde avait été détruit et reconstruit aux mains de Gimmi, devant une adolescente dévastée dont les mots s'étaient échappés en torrents, fuyant les images bloquées dans son esprit, lui racontant et lui expliquant tout, lui révélant le plus grand secret.

La brune avait eu du mal à admettre, à reconnaître ce qui s'était passé. À comprendre qu'il n'était plus là, définitivement. Quand Ladybug lui avait tout expliqué, elle avait réagi avec calme, détachement. Le choc l'empêchait de réagir, mais elle avait vite compris que son deuil n'était pas si complètement fait. Et alors que l'été pointait, qu'Amélie et Félix arrivait, elle avait eu à faire face à un intense moment de déni, qu'elle n'avait partagé à personne, son cerveau remettant sans arrêt en doute les affirmations, les réalités du monde. Elle réfléchissait trop, toujours, et inconsciemment, c'étaient des scenarii improbables, des demi-rêves qui prenaient corps devant ses yeux, ce n'était même pas tant sa mort qu'elle niait, mais les circonstances, incapable d'accepter qu'il ait pu donner sa vie pour la sienne.

Une semaine de choc. Une autre de déni. L'arrivée d'Amélie au pire moment, quand la réalité frappait, que Nathalie glissait du refus à une colère viscérale, qu'elle cachait, une colère contre elle-même qui la rendait muette et fermée, que son amie avait doucement dissipé.

Succéda l'été.

En compagnie, sous les rires des adolescents, le regard illuminé d'Adrien, la joie inédite dans les yeux de Félix, la liberté de Kagami, le Soleil qui brillait autour d'eux. La chaleur et les éclaboussures, que les deux adultes évitaient soigneusement, pour ne pas réveiller les souvenirs. Nathalie silencieuse pour ne pas tout gâcher, Amélie qui arrivait à lui tirer des sourires inattendus, malgré l'étrange fraîcheur dans son cœur, les mots qui s'échappaient quand elle était seule dans le bureau, et les larmes qui venaient le soir. Elle oscillait de la joie de voir les adolescents heureux et libres, accompagnée du soulagement que tout soit enfin réellement terminé, à une tristesse qu'elle ne s'expliquait qu'à peine. Et elle refusait de communiquer.

Puis Alix et Ondine les avait jetées à l'eau à la toute fin de juillet, les forçant à cesser de ressasser. Arrêter de se torturer. Arrêter de s'empêtrer dans des pensées noires qui ne pouvaient même atteindre leurs regards. Offrant un bonheur réel, malgré l'épreuve, et tout avait disparu, le soleil d'août s'était frayé un immense passage vers son cœur, elle avait retrouvé une insouciance presque oubliée à force d'être dissimulée. Les rires par centaines qui se bousculaient, le bonheur qui coulait avec l'eau du bassin sur son corps, sur son cœur blessé, toutes ses peurs envolées. Mais ce n'était qu'une parenthèse, peut-être en avait-elle eu conscience, peut-être pas, en tout cas une étape d'arrêt. La plaie était encore ouverte, mais noyée dans une joie de surface, brûlée par une étincelle de vie extraordinaire.

OS MiraculousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant