PAYOFF

𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟗. 𝐂𝐑𝐎𝐈𝐑𝐄

•𝐋𝐈𝐋𝐀•

Ekin s'est assise face à moi, Silas, à ma droite. En face de lui se trouve l'homme qui m'a conduit ici. L'avion a décollé, j'ignore vers quelle destination. Je joue avec l'assiette devant moi. Je n'ai que faim de réponses. Même si je les appréhende, j'ai besoin de les entendre.

— Si je t'ai rien dit pour ta sœur, débute Silas, tourné vers moi, c'est parce que tu m'as dit que tu voulais pas savoir. Et comme c'était ta volonté, j'ai écouté.

J'ai envie de pouffer, mais je n'en ai même pas la force.

— Écouté, répété-je d'une voix presque muette, incapable de le regarder. Le jour où tu m'as donné le collier, t'as pleuré avec moi, c'était pas que m'écouter.

Son souffle me provient.

— Je crois que j'avais besoin de pleurer un peu ce jour-là, après tout ce qu'on a traversé.

Je prends une profonde inspiration. J'ai l'impression d'être si égoïste en quémandant des réponses dont j'ai toujours omis les ombres clairvoyantes.

— Si je te l'avais dit, Lazar aurait tout fait pour le savoir. Les ennemis t'auraient alors retrouvée plus tôt, et jusqu'à ce que tu leur avoues ce que tu sais, ils t'auraient gardé sous leur joug, en te menaçant avec ta famille. T'aurais cédé pour les protéger, en te disant qu'Ekin a des gardes, et qu'elle survivrait à leur attaque. Et à ce moment-là, on serait tous morts.

Je l'entends gigoter sur son siège.

Morts.

Je peux le voir dans le coin de ma vision se tourner davantage vers moi.

— Tu l'auras compris, on peut faire confiance à personne. Après ce qui s'est passé, Ekin est restée à droite à gauche sans gardes pendant six mois, parce qu'on me traquait. L'équipe qui te protégeait à Istanbul était avec moi. L'un d'eux s'est avéré être un informateur, après avoir reçu des menaces visant sa famille. Il m'a attaqué.

Je crois que j'ai du mal à réaliser l'ampleur de la situation. J'ai l'impression d'être incapable de cligner des yeux. Je ne semble que capable de fixer l'assiette devant moi.

— Pas parce que c'est des gens mauvais, précise-t-il, mais parce que les gens mauvais les menacent. Cet homme l'a fait d'un dernier geste désespéré pour protéger sa famille. Il m'a supplié avec une arme à la main de lui dire si Ekin était toujours en vie.

Cette fois, j'ose tourner un peu la tête vers lui.

— Il... lui est arrivé quoi ? demandé-je d'une voix blanche.

— J'ai dû le calmer, déjà. Et puis, quelqu'un que je connais a fait le nécessaire pour que sa famille entre dans le programme de protection de témoins. Et depuis, l'équipe d'Istanbul est rentrée chez elle. Et moi, je protège ma famille moi-même.