Chapitre 15.2

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Pdv Ellie

Mon train arrive à la gare de Nîmes. Vincent m'a prévenu. C'est Sylvain qui vient me chercher. Mon cœur bat fort depuis qu'il me l'a dit. Mes mains tremblent aussi, et elles sont moites. Je frôle la crise d'angoisse. Qu'est-ce qu'il faut que je dise à Sylvain ? Je dois... faire comme si de rien était ? Ou juste ne rien dire ? Au contraire, lui taper la causette ? Je lui dis « bonjour » ou pas ? Si quand même, c'est la moindre des politesses. Le train se stoppe, et l'arrêt est annoncé. C'est le moment. Je souffle un bon coup, et me lève de mon siège. Je récupère ma valise, mon sac, et prends Myrtille dans mes bras. Une fois sur le quai, mon regard scrute l'intérieur de la gare. Je l'aperçois au loin, assis sur un banc, ses coudes posés sur ses genoux. Je pose mon cocker au sol, et la tiens en laisse, marchant vers mon ancien petit copain. J'ai l'impression de le rejoindre au ralenti. Tout semble plus lent autour de moi. Mon rythme cardiaque augmente de plus en plus. Respire Ellie.

Soudain, il relève la tête vers moi. Nos regards se croisent et se maintiennent. Tout change d'un coup. Les gens marchent rapidement, entrant et sortant de la gare. Le brouhaha reprend à nouveau, de plus en plus fort. Sylvain se lève du banc, et place ses mains dans les poches de sa veste. Je ne vois que lui. Il me regarde toujours, droit dans les yeux. Son visage est sans expression. Je ne sais absolument pas ce qu'il ressent, et encore moins ce qu'il pense en me voyant m'avancer vers lui. Je me stoppe à un mètre, c'est alors que Myrtille se colle à lui, toute contente, en plaçant ses pattes avant sur les jambes de Sylvain. Le lien de nos regards se coupent. Il regarde vers le sol, et esquisse un sourire en voyant mon animal de compagnie. Il s'agenouille, et offre des papouilles à Myrtille, qui en est ravie.

-Désolé... elle est toujours contente de rencontrer de nouvelles personnes...

J'esquisse à mon tour un léger sourire, plutôt gênée. Sylvain relève les yeux vers moi, perdant son sourire. Il reste tout de même, disons... moins neutre. Un faible sourire est encore présent. Très faible.

Sylvain : On y va. Elle doit avoir hâte de sortir. Dit-il en se relevant.

Il remets ensuite ses mains dans ses poches, puis marche vers la sortie. Super. Je suis le pas, en faisant rouler ma valise derrière moi. Je suis complètement déboussolée. J'ai carrément oublié la politesse avec tout ça. Myrtille marche à côté de lui, et renifle un peu partout tandis que nous marchons vers le parking de la gare. Cette ville m'avait manqué, je l'avoue. Il fait bon. J'ai l'impression de la redécouvrir, comme toujours. Sylvain jette des coups d'œil au cocker, avec un petit sourire. Je reste derrière eux. Dans mon coin. Il faut que je lui parle. Il faut qu'on se parle. Il faut que je lui raconte. Tout. Allez Ellie, lance toi. Je soupire doucement. Putain, ce n'est pas si compliqué...

Sylvain : Dis moi ce que t'as à me dire... une bonne fois pour toute...

Je fronce les sourcils. Comment sait-il ? Je continue de le suivre, en retrait. C'est le moment.

-Je suis vraiment désolée tu sais... ? C'était pas facile pour moi non plus, de tout quitter, y'a un an... je... je suis des thérapies... pour... guérir des diagnostics qu'on m'a fait en arrivant en Belgique... et y'en avait beaucoup... Ajoute-ai-je un peu moins fort.

Il ne dit rien, alors je poursuis. Je pousse un soupir avant de me lancer.

-J'avais mes raisons de partir Sylvain, je...

Il s'arrête d'un coup et se tourne vers moi. Je me stoppe net et le regarde droit dans ses yeux bleus, la boule au ventre.

Sylvain : Justement. Parlons de tes putains de raisons. Vas-y. Dis-moi. Tout le monde est au courant, sauf moi. Alors vide ton sac. Crache-t-il froidement.

Ne te défile pas Ellie. C'est maintenant ou jamais. Je ferme les yeux un instant, puis les rouvre en fixant le sol. Je prends la parole, d'une voix faible.

-J'étais enceinte, j'attendais un bébé... notre bébé... Rajouté-je plus bas, avant de reprendre. Je savais pas quoi faire... j'étais instable mentalement, et tu travaillais beaucoup à ce moment là... on aurait jamais pu élever un enfant dans ses conditions, et on était ensemble depuis si peu de temps je... je suis partie... j'ai rejoint ma meilleure amie en Bretagne, et j'ai... j'ai avorté... et j'ai recommencé ma vie... dans un autre pays... je voulais tout refaire, oublier parce que ça me faisait beaucoup trop mal de penser à toi, à vous... c'était horrible... mais après Vincent m'a retrouvé, on a repris contact et après plusieurs mois je suis venue lui rendre visite... et tu connais la suite...

Son visage se décompose. Je m'en veux tellement. Avec du recul, j'aurais dû lui en parler. Nous aurions réglé le problème à deux. Ensemble. Je fixe Sylvain, en attendant une réaction, une réponse, quelque chose.

Sylvain : T'es encore plus lâche que ce que je pensais... Murmure-t-il, son regard vers le sol.

Je le sais. Pourtant mon coeur me fait mal lorsqu'il prononce sa phrase. Là voilà la réaction. Il est en colère, et c'est légitime.

Sylvain : Putain mais j'étais là pour toi. Je t'aurais aidé. Je t'aurais donné tout ce que tu voulais. Putain je t'aimais comme un dingue !

Je relève les yeux vers lui, puis mes mots passent la porte de mes lèvres sans y réfléchir.

-Et tu m'aimes encore ? Dis-je sans conviction, neutre comme si la question n'était pas aussi complexe.

Il fronce les sourcils. Il se braque. Évidemment. À quoi je m'attendais ?

Sylvain : Je répondrais pas à la question. C'est pas le moment de parler de ça.

-Écoute Sylvain, je... j'ai changé... je me suis soigné en Belgique, je suis en pleine thérapie depuis un an, j'ai guéri mes addictions, je prends soin de moi et de ma santé maintenant... laisse moi une chance de-

Sylvain : Une chance pour quoi ? Pour que je te laisse à nouveau rentrer dans ma vie ? Que tu partes encore comme tu l'as fait ? Et que je finisse comme un con, totalement vide pendant des mois ? C'est non Ellie, tu m'entends ? Non ! Annonce-t-il, énervé. 

Il fulmine de l'intérieur. Enragé. Il frotte sa main sur son visage, fuyant mon regard. Il me regarde à nouveau, le regard noir. Il prend la parole, d'un ton neutre, ce qui me donne la chair de poule.

Sylvain : J'ai besoin de temps. J'ai besoin de réfléchir à tout ça. Et je ne veux pas te dire des choses que je pourrai regretter plus tard. Rentre à l'appart' des gars, moi je vais chez moi. Salut.

C'est comme ça qu'il s'éloigne avec les mains dans les poches, me laissant planter au milieu du parking. Je le regarde aller jusqu'à sa voiture, sans même essayer de le retenir. Il monte, puis démarre. Sylvain s'en va. Je me retrouve seule, vide. L'appartement de Vincent et Rémi est à quarante-cinq minutes de marche d'ici. J'ai envie de pleurer, de rentrer chez moi et de ne jamais revenir ici. Je sens mes larmes monter. Myrtille essaye de me distraire. Je porte mon attention sur elle, et décide de commencer à marcher, pour arriver le plus tôt possible à ma destination.

-À qui parler ?- | VSO [TERMINÉ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant