Chapitre 10 - Andrew

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— Je ne vous embête pas plus longtemps, vous avez l'air épuisée. 

Je baisse la tête honteux de mon comportement plus tôt et m'apprête à rejoindre ma potence quand une petite voix aigue se fait entendre.

— On a un canapé si tu ne veux pas dormir avec la sorcière.

Nina se fige et blêmit mais je ne dois pas être beaucoup mieux. Lola bouscule sa sœur et vient me prendre la main pour m'entraîner dans leur chambre.

— Euh ... je ... ce n'est pas une bonne idée. 

— Tu préfères la dame qui fait peur?

Je retiens un sourire alors que Nina se décale imperceptiblement. 

—  Allez viens, je veux bien te prêter un coussin si tu promets de pas ronfler comme un ours.

Cette fois je ne retiens pas mon ricanement. Lola s'empresse de déblayer la petite banquette que je considère d'un œil critique. Je dois bien mesurer au moins 40 cm de plus que cette couchette. Je n'ose rien dire et même si je vois que Nina a compris mon malaise, elle détourne la tête me laissant me débrouiller avec sa sœur qui ne veut plus me lâcher. Elle ne refuse pas ma présence mais ne l'accepte pas vraiment non plus. Bordel, j'ai jamais été aussi mal à l'aise de ma vie. M'imposer ainsi est la dernière chose que je veux mais les petites billes chocolats qui me scrutent comme si j'étais un super héros me font fondre et je finis par me plier en deux pour m'allonger dans ce qui me paraît être un panier pour chien! 

La respiration de Nina s'est considérablement ralentie, elle a finit par s'endormir. Je me retourne pour la millième fois, essayant de trouver une position qui ne me donne pas l'impression d'être enfermé dans une boîte de conserve! Pour la première fois, j'ai des envies meurtrières. Kim ne perds rien pour attendre. Pendant presqu'une heure j'ai du supporter ses jérémiades, tentant de me convaincre qu'on était mieux tous les deux. La vérité? C'est qu'elle ment comme elle respire. Elle ne veut pas revenir dans ma vie, elle a juste besoin de retrouver le confort qu'elle avait trouvé avec moi quand j'étais encore un idiot aveuglé par l'amour! De ce que j'ai appris, elle vit désormais dans un petit studio dans un quartier louche, pour pouvoir continuer à faire croire en société qu'elle mène la belle vie avec ses artifices. 

Lola descend du lit, je me fige pour ne pas lui faire peur dans le noir. Je fronce les sourcils quand elle s'approche de moi.

— Tu n'as qu'à prendre ma place. Tu dépasses de partout et t'arrêtes pas de gigoter.

Sa voix n'est qu'un murmure et je souris bêtement face à cette petite fille adorable.

— C'est gentil, mais je ne peux pas.

— Pourquoi?

— Parce que ça ne se fait pas. Je ne peux pas partager le lit de ta sœur sans son accord. 

Malgré la pénombre je vois ses yeux me sonder comme si j'étais un extraterrestre.

— Retourne te coucher Lola. Promis, je vais arrêter de bouger.

Elle hausse les épaules et grimpe aux côtés de Nina. Dans un murmure très peu discret je l'entends lui dire :

— Tu avais raison, c'est le plus gentil des garçons. 

Un sourire niais étire mes lèvres mais s'assombrit rapidement en entendant la suite.

— Pas comme Juan. 

— Dors Lola. 

— Mais y a encore plein de place à côté de moi. C'est plus grand que dans notre ...

Nina barre sa bouche étouffant la fin de sa phrase. Un soupire las se fait entendre quand elle me lance :

— Vous pouvez venir, si vous voulez ... 

Je ne réponds rien, j'hésite, c'est bizarre non? Un peu, pas tant que ça, et puis il y aura Lola donc aucun risque que ça dérape d'une quelconque manière. Je finis par me lever et grimper dans le lit. Lola se colle un peu plus à sa sœur et je m'évertue à rester le plus proche du lit, si je ne rencontre pas la moquette d'ici demain matin, ce sera un exploit!  

— Merci, je souffle.

Aucune réponse, mais je ne m'en formalise pas, la situation est gênante pour tout le monde. 

Lorsque j'émerge le lendemain matin, un petit bras potelé me barre le visage et des cheveux noirs me rentrent à moitié dans la bouche. Lola est en biais dans le lit, ses pieds sur Nina, sa tête sur moi. Je m'extirpe tant bien que mal du lit et abandonne les deux femmes pour rejoindre mon pire cauchemar. Comme hier soir, on me sert le même discours, je m'énerve mais ça ne change rien, bien évidemment. 

— Je suis sincèrement navré M. Turner, mais l'hôtel est complet.  

— Même pas un placard à balais? je tente de négocier.

Je passe une main lasse sur mon visage quand une petite chose me percute avec entrain.  

— Je suis ton nouveau punching ball préféré? je me marre en ébouriffant ses cheveux. 

— C'est quoi un pouchine ball?

Je rigole et croise les yeux attendris de Nina qui me sourit timidement. Elle porte une jupe crayon noire avec un chemisier blanc, un peu trop boutonné à mon goût. Ses talons mettent en valeur le galbe de ses jambes et je déglutis avec difficulté.

— Pourquoi tu la regardes comme ça?

— Hein? 

— Tu la trouves pas jolie? Tu es bizarre.

— Je .. euh ... si, bien sur que si, je marmonne mal à l'aise. Elle est magnifique ta grande sœur.

Le moment est vite interrompu par une Kim furibonde qui débarque devant nous.

— Je peux savoir où tu as passé la nuit? Je me suis faite un sang d'encre!

— Et pourquoi donc te préoccupes tu de ma vie? On est divorcé Kim. Tu n'as pas à savoir ce que je fais de mes nuits, ni avec qui je les passe. Et la prochaine fois que tu me joues un coup pareil, je te vire.

— Tu n'oserais pas, dit elle les bras croisés avec son air hautain qui m'exaspère un peu plus à chaque fois.

— Tu veux parier?, je la menace alors qu'elle perd un peu de sa superbe.

Son travail, c'est tout ce qui lui reste. Elle n'a rien obtenu à notre divorce, parce que j'avais accepté d'écouter mon père qui m'avait forcé à faire un contrat de mariage pour me couvrir et j'en suis bien content aujourd'hui.

HOPELESSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant