On toque à ma porte, je fronce les sourcils car M. Turner est assis à son bureau, concentré sur son ordinateur. En dehors de lui, personne ne vient jamais me voir.
— Entrez.
Une femme tirée à quatre épingles entre un sourire ravit sur les lèvres. Ses yeux me perturbent une seconde, comme une impression de déjà vu.
— Enfin, je peux vous rencontrer. Mlle Alvarez je présume?
Je me lève et serre la main qu'elle me tend sans comprendre.
— Maman? Qu'est ce que tu fais là?
M. Turner entre dans son dos avant de l'embrasser chaleureusement. Ses yeux, évidemment, il a ceux de sa mère.
— Je suis venue rencontrer la femme que tu ne voulais pas me présenter, raille t elle.
— C'est ma secrétaire Maman. On ne dîne pas le dimanche chez ses parents avec sa secrétaire, râle t il.
Je pince les lèvres pour ne pas rire, il me jette un regard noir en le remarquant.
— Je suis Dawn Turner, la mère de cet ingrat, mais appelez moi Dawn. Comment allez vous jeune fille?
— Euh ...
Ses yeux dérivent vers ma joue rougie et mon cou. Je détourne légèrement la tête espérant être discrète mais c'est raté.
— On va arrangé ça, me dit elle d'une voix douce. Sors de là, toi.
— Mais! C'est MA secrétaire, s'indigne t il.
— Dehors! Ah non, attends, donne moi ta carte bleue!
— Pourquoi?
— Parce que les tenues obligatoires doivent être payée par l'entreprise gros malin!
Je fronce les sourcils alors qu'il tend sa carte à sa mère et me jette un clin d'œil avant de me souhaiter bonne chance. Mme Turner m'invite à m'asseoir et prend place face à moi. Elle sort de son sac un poudrier et commence à camoufler mes marques avec douceur. Elle ne pose aucune question et ne fait pas de remarque.
— Bien, c'est parfait. On y va?
— Pardon?
— Vous partez en déplacement ce weekend, il va vous falloir des tenues plus ...
Je me crispe alors qu'elle prend le temps de choisir ses mots.
— Prout prout, finit elle alors que j'éclate de rire. Vous êtes parfaite comme vous êtes mais malheureusement dans ce milieu les apparences sont bien trop importantes.
— Je comprends.
Voilà comment je me retrouve dans un magasin dont l'article le moins cher pourrait remplir mon frigo pour deux semaines au moins. Mme Turner me montre plusieurs tailleurs, tous magnifiques, certes, mais à des prix exorbitants. Après un énième modèle, elle réagit à ma grimace et me demande quel est le problème. Cette femme, aussi simple soit elle, porte des vêtements de créateur et des bijoux ornés de pierre dont je ne connais même pas le nom. Comment je fais pour lui dire que c'est ridicule de dépenser autant d'argent dans un bout de tissu sans la vexer?
— Quel est le problème Nina? me demande t elle d'une voix douce.
— Je ... Ecoutez Mme Turner, c'est ... Je ne peux pas porter ça.
— Et pourquoi donc? Vous n'aimez pas?
— Mais vous avez vu le prix? je chuchote alors qu'une vendeuse me jette un regard hautain.
— Oh, je vois. Et que proposez vous?
— Et bien, pour le prix de cette jupe, je dois pouvoir me trouver 3 tailleurs complets et une ou deux paires de chaussures au centre commercial, je lui fais remarquer.
— Vous n'aurez pas à rembourser quoique se soit, vous l'avez bien compris?
— Ca reste un morceau de tissu.
Elle me scrute avec cette même lueur au fond des yeux que lorsque son fils me regarde. Je déglutis gênée par cette inspection quand elle tranche finalement.
— Va pour le centre commercial. Je vous suis.
Quelques heures plus tard, nous ressortons les bras chargés de boîtes et sacs de divers magasins. Je ne vois même plus mes pieds lorsque j'entre dans mon bureau. Je dépose tout en vrac et manque de faire tomber la lampe lorsque mon patron entre derrière moi.
— Et bien! Vous avez trouver ce qu'il vous faut apparemment, marmonne t il.
J'ai comme l'impression d'entendre une pointe de reproche dans sa voix mais ne relève pas quand sa mère arrive à son tour.
— Merci d'avoir monter mes sacs Nina. Tenez, vos achats.
Elle me tend les deux sacs contenant les 3 ensembles et la paire d'escarpins que j'ai trouvé.
— Attends, c'est quoi tout ça? demande mon boss.
— Figure toi que nous sommes allés au centre commercial et j'y ai trouvé un tas de choses intéressantes, ça faisait si longtemps que je n'y avais pas mis les pieds.
— Toi? Dans un centre commercial?
— Ta secrétaire a refusé une dizaine de tailleurs Gucci, alors je l'ai suivi et je n'en suis pas mécontente.
— Je peux récupérer ma carte?
— Ca dépend? Tu nous invites à déjeuner?
Ses yeux roulent alors qu'un sourire en coin étire ses lèvres.
— Japonais ou italien? me demande Mme Turner.
— C'est gentil à vous mais j'ai beaucoup de travail à rattraper Mme Turner.
Elle essaie de me convaincre à plusieurs reprises mais mon patron l'en dissuade en voyant mon malaise. Je lui souris pour le remercier alors qu'ils sortent de mon bureau avec les achats de sa mère. Le reste de ma journée est occupé par l'organisation de ce weekend.
Je me demande comment va le prendre Lola, et surtout mon patron, quand il se rendra compte que mon chien est une petite fille de 8 ans ... Mais pour l'instant, c'est elle qui m'inquiète. Je passe mon temps à lui dire de se méfier des hommes et des inconnus, alors l'emmener avec moi dans une ville et avec des gens qu'elle ne connaît pas ... j'ai des doutes concernant sa capacité de sociabilisation.

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HOPELESS
RomansParfois, lorsque nous sommes happés par les ténèbres, une lumière scintille au loin comme un appel à l'espérance. Encore faut il la laisser illuminer notre univers. Nina retrouve un peu d'espoir en découvrant cette offre d'emploi et si elle allait e...