Comme à son habitude, Lola a négocié un nombre incalculable d'histoires. Je finis par réussir à sortir de sa chambre et rejoindre la cuisine. Tout y est rangé, je vais dans le salon, personne. Il est allé se coucher avant que je ne revienne. Je soupire, déçue et m'apprête à faire demi tour quand une lumière rougeoyante me parvient de la terrasse. Je plisse les yeux et m'approche. C'est lui, il fume. Depuis quand fume t il? Je ne l'ai jamais vu fumer. J'ouvre la baie vitrée hésitante. Je ne sais pas dans quel état d'esprit il est, j'ai évité son regard toute la soirée.
— Je peux?, je murmure.
Il hoche simplement la tête. Ses coudes sur ses jambes, il fixe un point devant ses pieds. Je m'installe sur le transat face à lui et attends. Il semble perdu dans ses pensées. Il enchaîne une, deux, puis trois cigarettes.
— Depuis quand tu fumes?
— Je ne fume pas.
— Je vois.
Il ne veut pas me parler, je ne vais pas m'imposer. Je me lève mais il retient mon bras et m'intime de me rasseoir. Je souffle avant de capituler.
— Je ne fume que lorsque j'ai besoin de réfléchir, explique t il.
Je n'ai jamais rien entendu d'aussi stupide. On a tous besoin de réfléchir, tout le temps.
— Et ça t'aide?
— Non. Mais j'essaie de me convaincre que si.
— Je suis désolé(e)
Nous avons parlé en même temps. Il lève les yeux vers moi, ce sourire en coin que j'aime tant sur les lèvres. Sa main attrape la mienne et me tire vers lui. Assise sur ses genoux, ses mains viennent agripper mes hanches et son front rencontre le mien.
— Je ne veux plus jamais que tu te dévalorises devant qui que ce soit, Nina. Tu n'as rien de vénale et encore moins d'une pute. Maintenant, si tu n'es pas prête à entamer une relation, je peux l'entendre. Mais si tu comptes encore le nombre de cornichons que Lola a mis dans son sandwich, je te passe au dessus de la rambarde.
Sa voix est douce et suppliante. Un rire léger m'échappe alors qu'il sourit contre moi.
— Je ne compterai plus les cornichons, promis.
— Bien. Et pour nous? demande t il en s'écartant légèrement pour plonger dans mes yeux.
— J'ai peur. Mais cette semaine était encore plus terrifiante loin de toi.
— C'est un bon début ... je crois, rigole t il. Toi aussi tu m'as manqué.
Il frotte son nez au mien avant de déposer ses lèvres sur les miennes avec douceur. Je m'écarte de lui avec une grimace.
— Quoi?!
— Tu pues, je lui fais remarquer.
Il éclate de rire avant de m'embrasser à nouveau sans tenir compte de mes jérémiades. C'est hilare que nous regagnons sa chambre. Je m'endors à nouveau sereinement pour la première fois depuis son départ.
Nous apprenons dans les jours qui suivent que notre caravane a brûlé, emportant celle de Paola dans ses flammes. Malheureusement, mon amie n'a pas survécu et mon cœur se retrouve brisé en un millier de morceaux. Je pleure pendant des jours. Les fédéraux ne veulent pas que je me présente aux obsèques, pensant que c'est un piège tendu par Juan. Ils ont surement raison, mais ne pas pouvoir dire aurevoir à la femme qui nous a aidé durant toutes ces années est un supplice. Elle n'avait pas de famille et je ne peux intervenir d'aucune manière. Elle sera enterrée dans la fosse commune sans cérémonie, sans hommage, sans un mot, seule.
On frappe à la porte de la chambre. Je ne réponds pas mais Andrew passe la tête. Un sourire triste s'affiche sur ses lèvres quand il me voit recroquevillée sur le lit, les yeux rouges.
— Viens voir.
Je ne bouge pas, je n'ai pas envie. Je veux juste penser à elle, à son sourire, à toutes les choses adorables qu'elle a fait pour nous, à toutes les fois où elle a pris soin de Lola pour me permettre de travailler, à toutes les fois où elle nous a protégé.
Andrew se rapproche et passe un bras autour de ma taille pour me soulever.
— Andrew, j'ai pas envie, je râle.
— Viens voir ce qu'on a préparé avant de dire ça, murmure t il contre mon oreille.
Je fronce les sourcils intriguée alors qu'il sourit triomphant. Un clin d'œil plus tard, nous voilà dans le salon où nous attendent Ben, Carter, Ely et Lola. Ils tiennent chacun une lanterne japonaise volante, une enveloppe et un crayon. On se dirige tous vers la terrasse. Chacun écrit un mot avant d'accrocher son enveloppe à sa lanterne. Les petites flammes s'envolent une à une vers le ciel étoilé en un dernier hommage à Paola. Après m'avoir laissé un moment seule pour me recueillir, je les retrouve dans le salon en pleine discussion sur la taille idéale d'un pénis, appelé "aubergine" devant Lola. Tout le monde se tait en me voyant arriver.
— Je suis sûre que c'est encore Carter qui a lancé la discussion, je lance.
Tout le monde est pris d'un fou rire alors que l'intéressé fait semblant d'être vexé. Je passe un agréable moment en leur compagnie. Ely a été merveilleuse avec nous depuis notre emménagement et elle est particulièrement aux petits soins avec Lola. J'adorais déjà les garçons en tant que client du bar mais en tant qu'amis ils sont génialissime. Ben est plutôt discret habituellement mais ce soir je trouve que son regard est étrangement accaparé par la jolie brune. Ely ne manque pas de lui rendre ses œillades et je souris bêtement en me demandant si Andrew est au courant.
— Qu'est ce qui te fait sourire comme ça? me demande Andrew.
Ely capte de suite mon regard et la panique s'inscrit sur ses traits. Je ne compte pas révéler leur secret qui semble être tout frais, peut être même pas encore tout à fait réel.
— Rien. Je pensais juste à la chance que j'avais de vous avoir dans ma vie. Merci d'être venu ce soir.

VOUS LISEZ
HOPELESS
RomanceParfois, lorsque nous sommes happés par les ténèbres, une lumière scintille au loin comme un appel à l'espérance. Encore faut il la laisser illuminer notre univers. Nina retrouve un peu d'espoir en découvrant cette offre d'emploi et si elle allait e...