Chapitre 16 : Appel à un ami - partie 2

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     Cette pièce était bien plus petite mais je m'y sentais plus en sécurité. Trois canapés poussiéreux étaient contre chaque mur. La quatrième paroi accueillait une autre porte desservant la salle de conférence, ainsi qu'une vieille commode sur laquelle était posée une cafetière et une pile effondrée de tasses dont celles au sommet à l'origine avaient chues et éclatées sur le parquet. Au centre, il y avait une table basse crasseuse. Une petite lucarne donnait sur le flanc de la mairie et sur une des petites rues adjacentes. Kylian s'en était retourné dans le couloir.

— Vous ne restez pas ? Demandai-je, connaissant déjà la réponse.

— Non, il est encore tôt. J'ai le temps de retourner au tunnel de Saint-Cloud.

Je ne savais plus quoi dire.

— Merci encore pour votre aide... Et désolé pour vous avoir forcé la main. Qu'allez-vous dire à monsieur le maire ?

— Pour ne pas trop troubler sa quiétude, je vais juste lui dire que nous n'avons rien trouvé. Mais en cas de succès de votre côté, je compte sur vous pour ne pas nous oublier. J'attendrais le fruit de vos recherches.

Vanessa s'aperçut que le collaborateur municipal était sur le point de partir. Elle le rejoignit et lui donna une tape sur l'épaule. Kylian sursauta et tourna la tête en coup de fouet, craintif.

— Eh Kylian, c'est cool, tout va bien. Je voulais vraiment m'excuser pour mon coup de pression agressive à votre égard.

— Ne vous excusez pas, vous ne le pensez pas de toute manière. Je suis triste pour vous en fait. Cette catastrophe vous a en partie déshumanisé. Vous n'avez plus aucune empathie envers vos congénères, plus aucun amour pour la race humaine. J'espère que vos amis sauront remettre votre esprit d'aplomb.

Cette intervention figea Vanessa, muette.

— Messieurs, à très bientôt j'espère !

Kylian disparut dans les méandres des couloirs de la mairie.

Vanessa s'affala dans le canapé, éjectant un nuage de poussière. Fred s'assit à côté d'elle sans oser ni lui parler, ni la toucher. Gêné, je me grattai la tête et réfléchissais quoi dire.

— Fait pas gaffe à ce qu'il a dit. Il devait être énervé et un peu traumatisé par ta mise en joue.

— Non, il a parfaitement raison. Je suis devenue un monstre.

Un silence lourd s'abattit dans la pièce. J'étais figé par l'atmosphère. Il fallait que je bouge. Je sortis de ma torpeur et alla fermer la porte pour nous isoler de l'extérieur. Fab campa sur le sofa libre. Je m'occupai en évacuant les tasses à café et les débris sur la commode et installai le panneau solaire sur son socle. Je dissimulai inconsciemment le téléphone aux yeux d'un entrant inconnu, derrière la cafetière. A peu près deux heures passèrent. Nous essayâmes de nous décontracter et nous reposer dans bien que mal. Au bout d'un moment, cette tranquillité et ce silence me rendirent nerveux. Je sortis d'une poche intérieure de mon sac à dos, la carte de Paris pliée en quatre, page dégrafée du calendrier des pompiers, trouvée au club de tennis. Je pointai du doigt le 15ème arrondissement et cherchai les rues mentionnées par notre interlocuteur. Rue Saint-Charles et Balard. Que pouvait-il y avoir à cet endroit-là ? Je repérai la rue Balard et remontait avec mon index sa ligne jusqu'à croiser la rue Saint-Charles. Cet angle de rues donnait sur un parc arboré. A côté, il y avait l'hôpital Georges Pompidou et derrière le boulevard des Maréchaux, un immense rectangle immobilier avec la mention Hexagone Balard. Ça me disait quelque chose sans que cela ne me revienne précisément en mémoire. Bêtement, je ne demandai pas à mes amis. En tout cas, pas de détour à faire ou de longs kilomètres à parcourir, le rendez-vous était sur notre chemin. Le 15ème arrondissement était limitrophe à Boulogne-Billancourt. Fab scrutait par la lucarne.

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