Chapitre 06 : Objectif ; maisons des filles - partie 1

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CHAP. 06 : Objectif ; maisons des filles

     Je dormais comme un bébé, la tête empaquetée dans ma capuche. Je sentis la douce chaleur des premiers rayons de soleil du matin. Un pied vint me secouer l'épaule vigoureusement.

— On se lève la Belle aux Bois Dormants, remua Karl.

— Doucement, laisse les autres dormir encore un peu marmonnai-je les yeux fermés.

— Nous sommes déjà tous levés crétin !

Je me redressai d'un coup et écarquillai les yeux. Effectivement tout le monde était prêt à partir. Je n'avais rien entendu de leurs déambulations. Syvanna s'accroupit à côté de moi et tendit une cannette de jus d'orange.

— Petit-déjeuner.

— Mais vous auriez dû me réveiller plus tôt.

— Tu dormais si bien ! on n'a pas voulu te réveiller tout de suite.

— On pensait surtout que tu serais réveillé par notre boucan. T'es un putain de gros dormeur, railla Karl.

— Je ne sais pas comment il fait, se demanda Romain qui avait chaussé ses lunettes après avoir jeté ses verres de contact la veille avant de se coucher.

— Des années d'entrainement ! S'il n'a pas ses huit heures de sommeil, il est tout mou, se moqua Fab.

Je fis genre d'ignorer mais leur sarcasme me fit sourire. Je bus mon jus d'orange puis une gorgée d'eau. Je constatai sur le comptoir toutes les bouteilles d'eau, cannettes et conserves que nous ne pouvions pas transporter dans l'état actuel. C'était très dommageable pour notre survie. J'observais Syvanna en jupe les jambes égratignées, Cindy en robe légère, Vanessa en débardeur, Moïse en polo, Fred en short bermuda. J'étais surement le membre du groupe le plus couvert. Il fallait que l'on commence à s'organiser, avoir une vision à plus long terme.

— Bon, aujourd'hui c'est mission ; les maisons des filles, annonça Karl.

Une vague d'émotions submergea les yeux de Syvanna. Un douloureux mélange d'envie de revoir ses proches en bonne santé et une répulsion à découvrir l'horreur. Elle serra fort la main de sa sœur. Extérieurement Vanessa semblait plus détachée. Elle verrait bien ce qu'elle verrait. Une partie de son âme positive ; la compassion, la joie, l'amour, s'était tarie après la lame de la mort.

— Si je peux me permettre, m'exprimai-je. Bien sûr que nous allons consacrer cette journée à retraverser la ville vers le sud et rejoindre le quartier des filles. Mais il faudrait aussi songer à une organisation nous permettant de transporter nos provisions, notre eau, de trouver d'autres vêtements plus aptes à notre randonnée.

— Et qu'est-ce que tu proposes ? Demanda Romain.

— Il nous faut un sac à dos chacun pour porter tout ce dont on a besoin, des pantalons pour les filles en jupe ou en robe et pour Fred en bermuda.

— Je suis très bien en short !

— Peut-être, mais c'est un risque de sur-blessures que vous prenez. De plus, il faut nous trouver des vêtements plus chauds pour les nuits à venir, peut-être aussi des parkas à capuche pour les jours de pluie.

— A t'écouter, j'ai l'impression que nous allons passer le reste de nos jours à survivre et à errer sur terre, continua Edouard. Ce n'est que le troisième jour après cette merde, mais putain, les secours, l'armée vont finir par arriver ! J'ai entendu dire qu'après la tempête Katrina, l'armée américaine avait mis plus de sept jours pour rejoindre la Nouvelle-Orléans, plus de jours que pour conquérir Bagdad pendant la dernière guerre du Golfe.

— Tu as sûrement raison, mais je préférais prendre les devants.

— Mais pourquoi on ne resterait pas ici pendant plusieurs jours. Nous avons un toit à peu près stable, de la nourriture, des frigos de boissons encore pleins. On peut toujours se réapprovisionner en conserves dans le camion sur le pont.

Je dois avouer que l'argumentation d'Edouard se tenait. Nous pouvions tenir au moins six jours au club house, largement suffisant pour l'arrivée probable des secours. Même si mon instinct me tiraillait, je tenais peut-être un discours trop alarmiste.

— Je suis assez d'accord avec Edouard, dis Moïse.

— Me too ! Confirma Romain.

— OK, j'avoue ça se tient ! C'est sûrement la situation à venir la plus probable, assurai-je.

Je vis une expression de soulagement sur les visages d'Edouard et Chris.

— Mais nous ne devons pas rester tous ici à se tourner les pouces pendant cette semaine, repris-je. Nous devons organiser une expédition pour explorer le quartier des filles et trouver de l'équipement au cas où la situation de crise se prolonge.

— D'accord avec ça !

— Oui pour moi aussi.

Le soutien de mes amis était très précieux pour moi.

— D'accord fil de fer, comment on compose les équipes, demanda Karl.

Dans sa phrase, j'avais l'impression que l'on déterminait des équipes de foot pour jouer dans la cours de récré. Le décalage était étonnant et presque drôle. Ça m'avait décontenancé.

— Euh oui... Alors... Bégayai-je. Je pensais pour l'expédition à ; Syvanna, Tania et Vanessa bien sûr...

— Non pas moi, surpris Tania. Je ne veux pas voir ça et je suis épuisée. Laissez-moi ici, s'il vous plait.

Syvanna se tournait vers sa sœur les mains liées et lui adressa un regard compréhensif.

— Pas de soucis, reste ici pour te reposer. Je te ramène papa et maman si je les trouve.

Les sœurs s'enlacèrent. Je continuai la composition de l'équipe assez gêné.

— Ok... Euh... Karl, Fred, Fab et moi, si ça vous convient. Donc Tania, Moïse, Romain, Chris, Édouard et Cindy, vous restez ici pour garder le camp.

Le groupe acquiesça plus ou moins convaincu.

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