Chapitre 20 : La théorie du chaos - partie 1

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Chapitre 20 : La théorie du chaos

     Je refermai ma bouche béante avant de gober je ne savais quel nuisible balancé par le courant d'air s'engouffrant dans notre geôle à ciel ouvert. D'un pivotement lent du cou, je fis un panorama précis de la scène apocalyptique. J'essayai de reconstituer le point de vue normale de la cité. Je vis pile face à moi, la tour Eiffel amputée de son membre phallique au-dessus du premier étage, entouré du champs de Mars transformé en début de forêt vierge. A ma droite, j'aperçu le palais des Invalides étrangement intact avec son dôme recouvert de feuilles d'or toujours à sa place. Au-delà, la Seine traversait de droite à gauche, coupant parfaitement l'image dans une légère courbe. Le quartier de la Défense aux tours écrêtées, marquait l'horizon. Le phénomène le plus incroyable se passait toujours sur ma droite juste au-delà des Invalides, là où devait se situer les Champs Elysées encadrés de l'Arc de Triomphe et de la Concorde. Il n'y avait plus rien... Même pas une ruine, pas un gravât... C'était parfaitement plat et lisse... Un disque parfait de deux kilomètres de diamètre avec pour centre l'entre-deux parfait sur les Champs, des deux monuments, l'Arc de Triomphe et l'Obélisque de Louxor désintégrés. La texture du sol était noire et brillante comme du pétrole brut. La comparaison avec un vinyle 33 tours était parfaite. Ceci était le point central de l'impact de l'attaque. Mais point de cratère et d'onde de choc circulaire dont la puissance et les dégâts s'amenuisaient avec la distance. Non, juste un cercle parfait au sol vitrifié. Après la force du souffle ne s'était pas propagée de façon ondulatoire avec une puissance décroissante selon la distance jusqu'à sa nullité. Non, cela ressemblait plus à un rayonnement à énergie variable. Les dégâts étaient visibles uniquement sur ces rayons comme le dessin enfantin d'un soleil avec ses traits qui partent du centre du cercle dans tous les sens. Plus étonnant encore, ce flux de dommages s'interrompait par endroit sur quelques centaines de mètres et reprenait de plus bel avec autant d'intensité. C'était pour cela que le palais des Invalides était intact et que plus loin la désolation était totale. Pour ça aussi que notre tour était encore debout. La force ne décroissait pas et semblait identique sur une distance infinie, qui avait atteint ma ville à plus de soixante kilomètres et au-delà, peut-être cent, deux cents, cinq cents kilomètres... Je ne savais pas. Non, tout cela n'était pas logique, tout cela défiait les lois de la physique connues par l'être humain. Voilà, tout ceci n'était pas humain. C'était extraordinaire... Extraterrestre !

Des larmes incontrôlées et inattendues coulèrent sur mes joues. Un frisson glacé parcourut mon échine, et ce n'était pas dû au souffle froid du vent qui envahissait la pièce. Si la scène face à moi était un écran de cinéma, je me dirais ; mais que ce map painting est magnifique. C'était un art qui m'avait toujours fasciné et je rêvais de travailler dans ce domaine, mais je n'avais pas assez de talent pour entrer à Boulle ou autres écoles d'art prestigieuses. Pourquoi pensai-je à ça à ce moment précis...

Je me tournai vers Marina comme pour marquer le clap de fin sur cette scène apocalyptique. Pourtant elle restait là, envahissante et réelle. Je sentis le regard compatissant de Marina. Je ne pouvais plus contrôler le flux lacrymal de mes yeux.

« Mais... Que s'est-il passé ?

— La fin d'un monde ! Le début d'une nouvelle ère.

— Quoi ?

— Mais est-ce une ère qui sera dominée par l'être humain ?

— Putain de chienlit !

Je me détachai de Marina pour marcher seul. En claudiquant je reculai vers ma paillasse. Je m'effondrai dessus comme une loque. Marina s'accroupit à mes côtés et me ramena à la réalité du moment.

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