Chapitre 24 : Il faut sauver le soldat Mic. - partie 1

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Chapitre 24 : Il faut sauver le soldat Mic.

     Le noir. Le silence.

...

Le noir. J'entendais.

« Putain, faite quelque chose ! Ne le laissez pas crever comme ça, criait Vanessa.

— Calmez-vous et aidez-moi plutôt. Vous aussi. Retournez-le doucement pour le mettre sur le flan.

Un sac se posa à côté de moi. Une fermeture éclair glissait. Quelque chose en sortait. Des sachets en papier qu'on déchirait pour les ouvrir.

« Soulevez son sweat.

J'avais froid.

« Putain ça saigne grave, s'affola Vanessa.

— Oui ça saigne, mais pas tant que ça. Et la couleur du sang n'est pas trop foncée. Il n'y a pas l'air d'avoir d'hémorragie et pas d'organe gravement touché.

— Qu'est-ce que vous en savez ? Vous êtes médecin ?

— Oui ma chère, je suis médecin militaire. La croix blanche sur mon casque, ça ne vous dit rien ?

— Ok d'accord, et qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

— Pas le choix, on ne va pas l'opérer sur la route. Je vais refermer les deux plaies et vous allez prier pour qu'il n'y ait rien de touché dans le bide. C'est à lui de se battre.

Un objet sortit du sac. On me pinça la plaie. Puis le claquement soudain d'une agrafeuse.

Le noir. Le silence.

...

Le noir. J'entendais. Je ressentais.

Je glissais, allongé surement sur une petite remorque de livreur. Je ne savais pas. En tout cas j'étais transporté sur un engin roulant. Le confort était spartiate. Je ressentais toutes les imperfections de la route chaotique. Mon dos et mon épaule ne me faisaient pas si mal que ça. Le militaire avait dû m'injecter une bonne dose de morphine. Mon esprit planait.

« Ça va Fred ? Tu veux que je te relaie ?

— Non, ça va pour le moment. C'est pas vingt kilos tout mouillés de Mic Fil de Fer qui vont me fatiguer.

Je ne sus pas si mon visage le retranscrivait, mais cette pique me fit sourire intérieurement. Mes amis étaient là, auprès de moi, pour me soutenir, pour m'aider, pour me sauver.

« Qu'est que vous comptez faire maintenant, jeunes gens ? demanda un des militaires. Rentrer avec nous à Hex Balard ?

— Vous pensez que Mic est stabilisé ? S'inquiéta Fred.

— Il respire. Son pouls est plutôt correct pour un mec qui s'est fait planter deux fois. Ma foi, s'il n'y a pas de septicémie dans les heures qui viennent, il pourra probablement s'en sortir.

— C'est peut-être mieux de rentrer avec eux ? Demanda Fred.

— Je ne sais pas. J'ai envie de me barrer d'ici le plus vite possible et retrouver la bande à Mantes, grogna Vanessa.

— Si je peux me permettre, intervint Marina pour la première fois. J'ai peut-être une solution de locomotion pour rentrer chez vous.

— Putain, mais t'es qui toi d'abord ? D'ailleurs tu ressembles beaucoup à cette pouffiasse de lardeuse, gronda mon amie.

Non, ne t'énerve pas. Elle est avec nous.

— Je suis la sœur jumelle de la pouffiasse.

— Quoi ? Mais merde, abattez-la, cette conne.

— Calme toi Vaness ! tu vois bien qu'elle n'est pas hostile.

— Oui calmez-vous. Ecoutez votre pote.

Un silence pesant planait, comme l'atmosphère lourde précédent un duel au pistolet dans le far west.

— Je m'appelle Marina et nous étions emprisonnés ensemble dans la tour Montparnasse. Je suis un peu l'antithèse de ma sœur.

— D'accord, mais ça ne te fait rien de l'avoir vu se faire abattre devant tes yeux.

— Oui et non. J'ai vu bien trop d'atrocités depuis la catastrophe que ça m'a insensibilisé.

— Bienvenu dans le club de Vanessa, ironisa Fred.

— Bref, je pense avoir la solution pour évacuer Paris avec tout le confort possible pour Micaël.

— Vas-y accouche !

— Nos parents étaient bateliers et on habitait avec eux sur une péniche légère. On passait nos jours à transporter des marchandises entre Paris et le Havre. Le jour de la catastrophe, notre bateau mouillait au niveau du Quai Alfonse le Gallo à Boulogne-Billancourt. Nous étions à l'intérieur à ce moment-là. La proue de la péniche a percuté le cul d'une autre péniche devant nous. Malgré le choc, elle n'a pas coulé. Nous sommes restées cloitrées dedans pendant deux semaines. On a consommé une grande partie des provisions du navire. Puis un jour, ces décérébrés de nazis nous ont abordé pour vider le reste de la nourriture et nous ont emporté avec eux.

— Ok, c'est bien beau tout ça. Mais qu'est ce qui nous dit que ta péniche n'est pas endommagée, que les moteurs fonctionnent toujours, s'interrogea Vanessa.

— Oui, et est-ce que le carburant qu'elle possédait n'a pas été siphonné ? continua le médecin militaire.

— Peut-être, mais notre bateau possède deux réservoirs ; un grand et un petit. Le petit est moins visible et moins accessible que le grand. Je pense que le petit de 40 galons est encore au deux tiers plein ce qui nous permet de parcourir environ 100 miles.

— C'est-à-dire ?

— 160 kilomètres. Et si tous les réservoirs sont presque vides, nous pouvons toujours nous laisser dériver par le courant qui nous est favorable. Comme vous le savez, les rivières se jettent dans la mer et nous sommes dans le bon sens. Bien sûr, cela nous prendra beaucoup plus de temps.

— Jeunes gens, si vous décidez cette option, on peut vous escorter jusqu'au pont Garigliano. Ensuite vous devrez vous débrouiller seuls. Il restera à peu près 4 kilomètres à faire.

— On peut le faire, affirma Fred. On s'est tapé 60 km de marche à pied depuis Mantes, traversé un champ de bataille sous le feu des balles. Alors, ce n'est pas 4 kilomètres qui vont nous faire peur. Et j'ai toujours rêvé de faire du bateau sur la Seine.

— Ok, d'accord, on va f...

Ma civière roula sur un nid de poule. Gros choc. Grosse douleur foudroyante.

Le silence. Le noir.

...

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