Shama

Chapitre 7

_ Que font-ils encore là ? Demanda Shama en regardant les deux hommes se déplacer dans leur modeste salon.

L'inconnu se tenait devant le portrait de sa mère depuis un certain temps déjà, et Shama commençait à s'impatienter. Elle voulait qu'ils s'en aillent pour pouvoir enfin respirer.

_ Ne sois pas aussi dure. Ils semblent tout à fait honorables. S'exclama Belle en affichant un sourire émerveillé.

Shama la toisa, et son amie le remarqua à peine, trop occupée à dévorer les deux hommes du regard.

_ Dis plutôt que tu les trouves beaux.

_ Qui ne les trouverait pas beaux ? Regarde les Shama. Tenta de se défendre Belle en arrimant son regard à celui de son amie ; Tu dois bien l'avouer, ils le sont. Surtout le plus âgé des deux.

Shama n'avait pas besoin de se retourner pour savoir de qui elle parlait.

_ Il est affreusement beau. Il me fait penser à un homme super connu... Commença Belle en essayant de poser un nom sur ce visage qu'elle avait l'impression d'avoir déjà vu quelque part ; Il ne te rappelle pas quelqu'un ?

_ Si ! Plumette !

Belle roula des yeux face à la mine espiègle de son amie.

Shama ne plaisantait pas. Elle trouvait sincèrement qu'il lui ressemblait. Ses cheveux de jais parfaitement plaqués en arrière lui rappelaient son plumage sombre et son aura invoquait les ténèbres comme le ferait un charognard.

Il s'est présenté à eux en début d'après-midi pour mieux troubler cette journée tel un corbeau porteur de mauvais présages.

À l'exception de Plumette.

_ Quoi ? Avoue que j'ai raison. S'écria Shama en essayant de la retenir.

...

_ Vous aimez ? Demanda Amanda à l'intention d'Asad qui semblait charmé par les nombreuses toiles qui ornaient la pièce. C'est Shama qui les a peintes quand elle vivait encore ici.

Asad accueillit ce détail d'un hochement de tête, pensif.

_ Elle aimait beaucoup dessiner plus jeune, mais dit avoir perdu la passion. Continua-t-elle en contemplant la toile à son tour.

_ C'est dommage. Elle a du potentiel.

Asad n'écoutait que vaguement la vieille dame qui avait eu la gentillesse de les accueillir chez elle.

Le temps se jouait de lui. Il faisait déjà nuit, et il n'avait toujours pas trouver de solutions.

Dans un dernier recours, il pensa à la kidnapper. Elle le haïra probablement plus, mais au moins elle sera près de lui.

_ A quoi penses-tu mon frère ? Demanda Zayd en venant poser une main qu'il voulait amicale sur son épaule une fois qu'Amanda se soit éclipsée.

_ Je suis en train de tomber fou. Avoua-t-il en faisant passer une main rageuse dans ses cheveux. Elle est en train de me rendre fou.

Asad fit part de son plan à son frère qui resta stoïque. Il ne semblait pas surpris, et faisait preuve d'un calme imperturbable. Insensible aux tourments de son frère.

_ Laisse-moi deviner ! Une fois à Al-Khayyam, tu comptes la forcer à te marier.

_ Ça m'a traversé l'esprit en effet.

Asad jeta un regard à la jeune fille et un sentiment tout nouveau l'assaillit

Il n'arrivait pas à se résoudre à la transporter de pays en pays telle une marchandise pour au final la forcer à devenir sa femme. Il refusait qu'elle soit traitée de la sorte. Si elle venait à l'épouser, ça serait par amour. Du moins, il l'espérait.

_ On passera la nuit ici. Conclut-il en ne la quittant pas du regard.

Zayd savait qu'il ne servait à rien de contester face à la mine résolue de son frère et se contenta d'aller convaincre la dame de bien vouloir les héberger pour la nuit.

Telle une gifle, Shama accueillit la nouvelle en fusillant sa grand-mère du regard.

_ Ils ont encore une longue route devant eux et espéraient se reposer avant. Tenta-t-elle de se défendre, désolée.

_ Tu veux me faire croire qu'ils ne peuvent pas le faire dans leur voiture ?

_ Ce n'est pas très confortable. S'exclama son amie qui venait de les rejoindre dans la chambre. Ils viennent de loin et sont épuisés. Tu peux te montrer moins... méchante.

_ Méchante ? Moi ? S'écria Shama incrédule.

Elle jeta un regard à sa grand-mère en quête de soutien mais n'en trouva aucun. Elle se contenta de l'ignorer en prétextant devoir aller s'assurer que les invités n'avaient besoin de rien.

_ Je n'arrive pas à croire qu'ils ont réussi à remonter ma grand-mère contre moi. Cria-t-elle à l'intention de Belle qui s'était déjà allongée.

_ Tu dramatises les choses ma belle. Personne n'a remonté personne ! Amanda est juste contente de recevoir du monde chez elle. Tu sais à quel point elle aime être au contact des gens.

Bien qu'elle ne voulût pas l'avouer, Belle avait raison.

A son opposé, sa grand-mère avait le don pour se mêler facilement aux gens. Elle était une âme sociale qui prenait plaisir à s'entourer de personnes.

Au marché du village, elle ne cesse jamais de parler à qui veut bien écouter.

_ Bon ! Cessons de parler d'eux. Dis-moi, je veux savoir ce qui est advenu de Charles. Il t'appelle toujours ? Lui demanda-t-elle en l'invitant à la rejoindre sur le lit.

A son plus grand malheur, oui.

Charles ne témoignait aucune honte. Il la harcelait par message en prétendant vouloir s'expliquer.

Qu'est-ce qu'il y'avait à expliquer ?

La blonde a été claire quant à leur relation. Et Charles n'avait rien fait pour la contredire.

_ Il dit vouloir me revoir pour se défendre.

_ Il ne manque pas de toupet.

Shama était fatiguée et ne voulait pas s'étaler sur ses malheurs. Elle voulait oublier sa vie de Londres mais Belle ne lui laissa pas le choix. Elle la força à discuter chaque petit détail de sa vie, jusqu'à l'aube.