Chapitre 38

857 43 0
                                    

_ Doucement !

Le cheikh tenait sa dulcinée fermement contre son épaule alors que cette dernière s'agitait dans tous les sens, terrifiée à l'idée de monter sur cet animal aux cris alarmants.

_ Pourquoi il est si grognon ? S'affola-t-elle en se reculant d'un coup, manquant de les faire tomber à la renverse. 

_ Il tente de communiquer avec vous. Murmura-t-il alors que le poids de sa belle pesait lourd sur sa plaie ; C'est sa façon de parler.

_ Vous êtes sûr qu'il parle ? Il me donne l'impression d'hurler.

_ C'est qu'une impression. Grogna Asad à son tour alors que sa blessure lui lançait des piques, menaçant de se rouvrir ; Allons un dernier effort.

Dans un cri lamentable, Shama se força à se mettre docilement sur le dos de cette bête du désert, une petite grimace déformant son visage.

_ Vite ! Montez ! Lui somma-t-elle alors que l'animal l'intimidait sournoisement, son ventre presque gargouillant contre ses pieds, donnant l'impression qu'il allait bientôt se relever, l'emportant avec lui dans cette escapade, seule.

Heureusement, ces pensées agitées n'étaient que le fruit de son imagination, et l'animal attendit patiemment que son maitre le chevauche à son tour, collant son torse contre son dos, les enveloppant dans une proximité encore plus dangereuse que la veille.

Accolés l'un contre l'autre, elle pouvait sentir son cœur battre dans un rythme régulier, contrastant avec le sien.

_ Vous voyez, ce n'est pas si terrible. Susurra-t-il tout près de son oreille alors que Faris s'était mis à arpenter le désert, un pas devant l'autre.

_ C'est... Shama s'arrêta un instant pour apprécier ce moment indistinct, tentant de savoir ce qu'elle en pensait réellement ; C'est terrifiant.

C'était terrifiant !

La hauteur était vertigineuse et Shama s'ordonnait de regarder devant elle, incapable de descendre ses yeux plus bas au risque de s'évanouir.

Pire encore, l'animal ne cessait de grogner, visiblement en manque d'attention, animant une pénible peur en elle.

Fort heureusement, il y'avait le cheikh pour la soutenir.

Seulement, c'était un appui laborieux.

La présence masculine sur laquelle elle pouvait potentiellement se reposer nécessitait une ardue maîtrise de soi.

Si elle ne voulait pas réagir à ces muscles saillants qui la provoquaient à chaque pas, la jeune femme devait se munir d'un effort surhumain, et elle en manquait cruellement.

Le parfum musqué, les bras veineux qui l'encerclaient... Tous appelaient à s'y plonger.

_ Vous aimez la vue ? Il demanda soudain alors que d'innombrables dunes dorées se dressaient devant eux, dessinant un paysage éblouissant pour le moins. Cependant, la seule vue qui l'importait en ces instants étaient ces mains rêches qui tenaient la corde.

Victime de l'effervescence de l'instant, elle les imaginait la tenir, la caresser... Elle imaginait ses doigts dessiner des traits invisibles sur son corps, étreignant ses chairs avant de s'aventurer plus loin... beaucoup plus loin.

_ J'aime la vue. Affirma-t-elle d'une voix rauque, alarmant le cheikh qui la regardait s'agiter, les cuisses ébranlées de spasmes.

Dans un grognement sourd, Asad afficha son mécontentement de la voir ainsi.

_ Non ! Ne faites pas ça. La supplia-t-il presque en tentant de reculer, s'échappant à ce contact pénible qui le faisait réagir sans son consentement.

La vue était une torture.

Le dos frêle et les cuisses frémissantes de la jeune femme était un délice à regarder, seulement ça lui était interdit.

Pourtant, il n'arrivait plus à détacher les yeux de sa futur épouse, visiblement victime de leur proximité à son tour.

Qui ne le serait pas ?

Accolés ainsi, à chaque pas leurs deux corps donnaient l'impression de s'unir, les piégeant sournoisement dans une passion défendue.

De là où il se tenait, il pouvait sentir la jeune femme vibrer, le feu aux joues.

Ses mains timidement croisées devant elle tremblaient et son souffle se faisait erratique, accéléré, emportant le sien avec lui.

A cette image, les yeux vitreux, il pouvait sentir ses dernières forces le lâcher et tel un couard, tenta de fuir.

_ Ne me poussez pas à bout Shama.

D'un coup brutal, il ordonna à l'animal de s'arrêter avant de lui intimer de s'agenouiller, tentant vainement de mettre fin à son appétit.

_ Vous allez où ? S'alarma la petite brune en le voyant sauter par-dessus Faris avant même qu'il ne rencontre le sol ; Je vous interdis de me laisser là. Cria-t-elle en tentant de descendre à son tour, les jambes flageolantes, la tenant à peine.

_ Faites attention. Souffla Asad en lui offrant son bras bien trop loin pour alléger la chute inévitable qui renversa la jeune femme en arrière, sur son postérieur.

_ Aïe !

Dans une petite foulée, il la rejoignit en s'assurant qu'elle allait bien. Toutefois, une colère à peine dissimulée animait les yeux de sa belle, promettant de lui faire regretter son retrait, mais il ne le remarquait point, profondément absorbé dans ses pensées.

Ses yeux embués de larmes trahissaient la colère et la peine qui bouillonnaient en elle, et Asad, aveuglé, ne le voyait pas. Seulement, la jeune femme ne manqua pas de lui faire comprendre.

Dans un silence pesant où le désert semblait avoir retenu son souffle, un fort claquement se fit entendre ; le retentissement de sa paume contre sa barbe à la fois sombre et piquante.

ShamaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant