Chapitre 19

1.2K 72 0
                                    

Shama n'était pas dupe.

Le roi n'allait pas bien, et sa tête qui pendait bas, tel un lourd fardeau, en disait long.

Sa posture était légèrement recourbée comme pour contenir une douleur dévorante, et pourtant, dans tout ça, il lui souriait.

_ Qu'y a-t-il Shama ? Demanda-t-il en prononçant son prénom alors que la transpiration suintait de son corps.

_ Vous êtes blessé, n'est-ce pas ? Lâcha-t-elle dans un souffle en espérant se méprendre.

Son sourire, bien que sincère, n'arrivait malheureusement pas à tromper son souffle erratique.

Il a beau essayé d'étouffer ses gémissements, ses yeux qu'il peinait à garder ouvert et son état déchu ne manquèrent pas d'alerter la jeune femme.

_ Pourquoi vous ne voulez pas me dire la vérité ? S'emporta-t-elle en tentant de retirer cette main lourde qu'il maintenait fermement contre son ventre. Vous êtes blessé ? Répéta-t-elle, les yeux embués de larmes. Hein ? Répondez !

Ahmed intervint à temps en l'obligeant à reculer, alors que le cheikh n'arrivait plus à tenir debout.

Ses jambes tremblaient dangereusement en menaçant de le laisser tomber, tandis que Shama, horrifiée, fixait ses mains maculées de sang.

_ Mademoiselle, vous feriez mieux d'aller rejoindre Anas. Articula-t-il en se retenant de la réprimander de son audace.

Seulement, Shama était bien trop bouleversée pour se laisser aller.

D'un geste vif et mesuré, elle échappa au fameux Anas en se jetant sur le cheikh qui était sur le point de s'évanouir.

_ Mademoiselle, je vous en prie. Nous n'avons plus assez de temps.

La jeune femme était consciente du danger qu'encourait Asad, mais elle avait peur de le laisser seul.

S'il était blessé, c'était pleinement de sa faute.

Il n'a fait que la protéger en rabaissant son corps à un bouclier.

_ Je... Je viens avec vous.

_ Non. Il est hors de question. Refusa Ahmed d'un ton catégorique, ne lui laissant pas le choix que de suivre Anas dans le véhicule.

Le trajet était une torture lentement oppressante.

Ses pensées tourbillonnaient, empreints d'une angoisse croissante.

Elle avait peur d'être l'auteur d'un malheur irréparable.

Son imagination fantasque ne manqua pas à l'appel, et elle s'imaginait les pires scénarios à mesure que le paysage défilait.

_ Vous n'avez pas peur pour votre roi ? Demanda-t-elle enfin à l'intention du jeune homme qui roulait sereinement.

_ Son altesse est un homme fort. Je doute qu'une pauvre balle puisse avoir raison de lui.

Les paroles sans équivoque de son chauffeur auraient pu la convaincre, mais Shama était bien trop sensible pour ignorer son cœur.

_ Une balle ne fait pas dans la distinction.

_ Croyez-moi, son altesse a survécu à pire.

Shama voulait le croire, mais elle savait qu'elle n'aurait pas l'esprit tranquille tant qu'elle n'a pas revu le cheikh, alors, à peine arrivée, elle s'empressa de foncer jusqu'à l'étage.

_ Où est-il ?

Ahmed se hâta de rejoindre la jeune femme qui venaient de débarquer en trombe.

Une bretelle de sa robe tombait sur son épaule, dévoilant une partie de ses chairs, et ses cheveux désordonnés étaient en pagaille, comme si elle s'était battue avec sa personne.

Elle renvoyait une image fade, dépourvue de distinction.

Il ne comprenait pas ce que le roi lui trouvait.

Elle était loin d'avoir la prestance qu'il fallait pour être reine, et Ahmed était bien décidé à ne pas lésiner sur les moyens pour arrêter cette mascarade.

_ Couvrez-vous, mademoiselle. Vous n'êtes pas seule.

Shama n'avait pas remarqué son sein qui débordait de sa robe.

Rouge de honte, elle s'excusa en la remettant en place alors que Zayd venait de sortir de la chambre en compagnie d'un vieil homme en blouse.

Elle ne comprenait pas leur langue, mais les deux hommes échangeaient des petits mots à la fois subtiles et doux, qu'elle fut légèrement rassurée.

_ Alors ? Demanda-t-elle une fois que le docteur fut parti.

_ La balle a manqué ses organes vitaux. Assura Zayd en lui offrant un chaleureux sourire. Il ne s'est toujours pas réveillé, mais ça sera pour bientôt.

La jeune femme accueillit la nouvelle en un sanglot de joie.

Son cœur, qui avait martelé d'anxiété durant tout le trajet, se calma enfin.

Ses épaules s'affaissèrent de soulagement alors qu'elle se laissait glisser contre le mur, dans une posture qui ne reflétait en rien l'élégance.

Enfin, elle pouvait respirer.

L'homme qui l'a protégé de son corps était en vie, et Shama ne remerciera jamais assez Dieu d'avoir écouté ses prières.

ShamaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant