Deviens ma plus belle chanson

CHAPITRE XIII

Lundi 16 août, New York

Quand j'ouvre les yeux, je reconnais ma chambre new-yorkaise et ressens un pincement au cœur à cette constatation. J'étais tellement bien à Los Angeles. Mais comme James me l'a si bien dit, toute bonne chose a une fin. Je prends mon temps pour me lever et me laver puisque personne ne m'attend et que je suis seule désormais.

Je rejoins ma cuisine quasiment deux heures après m'être réveillée et me réchauffe un plat surgelé. Pas le courage de me faire à manger. Et puis, je n'ai même pas de livres de recettes. Alors que je mange ma blanquette de veau avec du riz, mon portable vibre. Je laisse ma fourchette dans ma bouche et récupère mon smartphone dans ma poche. Liz. Je prends deux secondes pour savoir si je dois ou non lui répondre, puis décroche d'une pression sur l'écran en enlevant la fourchette avec mon autre main.

— Allô, je dis d'un ton neutre.

— Bonjour Alex. Tu vas bien ? me questionne-t-elle d'une voix calme.

— Bien oui. Et toi ? je demande par pure politesse.

— Bien. Hum... Je ne vais pas tourner autour du pot, il faut vraiment qu'on se voie. Tu sais quand tu rentres à New York ?

— Je suis rentrée, je réponds en regrettant presque instantanément ma phrase, car je sais qu'elle va absolument vouloir me voir maintenant et que je n'en ai pas envie.

— Ah super, se réjouit-elle, on se rejoint dans notre bar préféré dans vingt minutes. À tout à l'heure.

Et elle raccroche sans me laisser le temps de refuser. Comme je l'ai déjà dit, je ne suis pas prête à la voir me faire les yeux doux en me disant qu'elle regrette. Surtout, que je suis sûre qu'elle le pense. Je termine ma blanquette et jette la barquette avant de retourner dans ma salle de bains. Il faut que je me change et que je me montre sous mon meilleur jour. Dire qu'hier, c'était naturel et aujourd'hui, je dois faire un effort. Je décide finalement de me maquiller légèrement. Les trois jours passés à Los Angeles m'ont donné un petit teint hâlé que j'agrémente d'un trait de crayon noir sous mes yeux et d'un rouge à lèvres rouge. Je retourne dans ma chambre et récupère ma robe gris clair ainsi que des sandales à talons. Dans l'entrée, je passe ma veste en cuir noire et récupère mon sac à main. Après avoir verrouillé ma porte d'entrée, je prends l'ascenseur pour rejoindre le hall de mon immeuble.

∆

Assise depuis une quinzaine de minutes à une table dans notre bar préféré, j'attends Liz. Elle m'a envoyé un SMS il y a dix minutes m'annonçant que son métro avait du retard et que je devais l'attendre. J'ai déjà siroté deux diabolos grenadine et j'envisage d'en commander un troisième quand la porte du bar s'ouvre sur une Liz trempée. Le temps, qui semblait clément aujourd'hui, a changé d'avis et depuis cinq minutes, il tombe des trombes d'eau. Elle balaye la salle du regard et esquisse un sourire quand elle me voit. Elle referme la porte, parle avec le serveur et me rejoint à la table. Il y a un mois encore, on se serait tombées dans les bras à coup de « tu m'as trop manquée ». Mais la situation a changé. Notre relation a changé. Je ne bouge pas de ma place et elle s'assoit alors que je la vois froncer les sourcils. Qu'est-ce qu'elle croyait ?

— Tu es partie au soleil ? me demande-t-elle avec un sourire timide. Tu as un joli teint hâlé. Ça te va bien.

— Oui.

— Alex, je... je suis vraiment désolée pour tout ce que je t'ai dit, me dit-elle alors que sa voix tremblote comme si elle se retenait de pleurer. Je n'aurais pas dû prendre le parti de Zach en pensant que c'était toi qui avais rompu vos fiançailles. Après ton silence radio, que je comprends parfaitement, et ma discussion avec ta mère, je suis allée demander des comptes à Zach et il m'a tout dit. Que c'est lui qui t'avait plaquée avec un SMS la veille de votre mariage. Qu'il avait réalisé qu'il ne t'aimait plus. Qu'il avait été lâche de ne rien dire à vos familles le jour du « supposé » mariage. Quand il a compris que tu ne viendrais pas, il a trouvé plus simple de jouer la victime. Il a reconnu tous ses torts et il a appelé ta mère pour lui dire la vérité. Mais je suppose qu'elle te l'a dit.