27- Ils sont nés, partie II

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Dans un passé lointain

L'alarme se déclenche, une sonnerie stridente réveille tout le monde à l'orphelinat. Le petit Drystan continue de ronfler. Cerné, il avait lu en cachette sous ses draps : le seul instant où il pouvait s'instruire sur ce qui l'intéressait vraiment. Tous les autres enfants se mettent à faire leur lit rapidement pour se mettre au garde à vous. Au loin, des pas brutalement posés sur le sol annonce l'approche d'un instructeur. La porte s'ouvre brusquement sur un visage sérieux, sévère, dans un mélange de colère et d'indifférence. Il vient inspecter que tout soit fait à la perfection.

 Personne ne calcule le petit garçon qui dort encore malgré le vacarme. Ou plutôt, ils sont heureux que ce soit lui le souffre douleur cette fois-ci. Il y avait quelques soupirs de soulagement de ne pas être pris pour cible, discrets, mais quelques uns d'entre eux serrent les poings, sachant pertinemment ce que le garçon est en train de faire.

- NUMÉRO 46 ! 

La main ferme du crieur saisi l'oreille du petit pour le traîner devant le groupe. 

- QUEL EST LE SORT QUE L'ON RÉSERVE À CEUX QUI N'OBÉISSENT PAS ?

- LA DOUCHE FROIDE ! LA DOUCHE FROIDE ! beuglent en cœur les petits. 

- LA FILE DE LA HONTE EN PREMIER. déclame l'éducateur.

Tous les enfants, l'instructeur compris, commencent à former une file indienne. L'enfant-victime est bien réveillé, mais ne crie pas, la douleur est là mais il se tait, sa douleur laissée au fond de lui, remplacée par un sourire nerveux et des yeux d'une intensité si sombre et larmoyante... Son seul ami retient son corps de s'opposer, de se mettre devant pour le protéger, mais il réagit de lui-même, un pas est fait mais il est stoppé par le regard de Drystan; Ce petit roux aux yeux jades qui secoue la tête pour qu'il n'intervienne pas.

Le premier enfant de la queue s'avance vers lui d'un sourire affreux, pour lui dire :

- T'es débile.

Puis le suivant :

- T'es nul.

- T'es moche. 

Encore et encore, une dizaine d'enfant percutent le cœur de leur camarade par la méchanceté gratuite de leur mots, c'est la consigne. Le dernier, c'est le donneur d'ordre qui prononce ces mots poignants : 

- Tu n'as pas de valeur, c'est nous qui t'en donnons, rentre toi ça dans le crâne. crache-t-il cette phrase avec dégoût. Sa main s'élève avant de lui donner une claque pour sceller la gêne d'être soumis, rabaissé au bon vouloir de son autorité, une véritable humiliation.

L'horreur continue, on le traîne et le jette à la douche gelée, tout habillé. Ce n'est pas un moment calme tant les cris continuent d'affluer, et même s'il n'écoute pas, c'est une torture. Drystan ne peut que se concentrer à ne pas pleurer, à ne pas se révolter, à attendre que ça s'estompe, qu'il puisse passer l'orage et survivre ne serait-ce qu'un instant de plus. 

Alors il imagine l'avenir, il imagine rencontrer ses parents, être capable de sourire, vivre avec ses deux frères de cœur : ses amis qui ne l'ont jusqu'alors jamais quitté, grâce à qui il a pu tenir malgré ces règles, ces comportements violents qui ne cessent de le rendre triste. Se dessine dans son regard vide : un grand champ de tournesol, l'air frais envahir ses poumons, ses frères et les rires aux éclats; Heureux d'être là, heureux d'être libre...

On le laisse ensuite seul, assez pour qu'il puisse remarcher, retourner à la chambre où l'attende ces deux amis. Dès qu'il ouvre la porte, ils s'empressent de l'enlacer et de parler en même temps, si fort qu'il se tient les oreilles, encore sous le choc de ce qu'il vient de subir. L'un d'eux murmure fortement : 

Arwan & JackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant