35 - Démon partie II

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La terre tremble, le mécanisme s'ébruite lourdement, les dalles roulent sur le côté pour ouvrir la voie. Les portes coulissantes, que personne ne soupçonne, ne laissent à présent que de l'eau à perte de vue. Le géniteur ne prend plus la peine de regarder son fils, mais n'hésite pas à regarder vers l'avenir, pour ne pas perdre une seconde. Il abandonne son fils à ses interrogations par cette simple affirmation : 

- On doit sauver ta mère, tu entends ? Tu auras tout le temps de me haïr ou de me dire tout ce que tu as sur le cœur ensuite. 

Impossible qu'il n'y pense pas, c'est un cauchemar pour le petit Jack. Il a l'impression d'être au côté d'un étranger, lui, son propre père, avec qui il a vécu pendant toutes ces années, qui l'a éduqué, nourri, aimé, du moins ce qu'il croyait. Il n'est plus sûr de rien. ''Et si tout cela n'était qu'une comédie''. Rien ne semble réel, l'enfant est en plein vertige.

Il comprend, avec ces mots, ce timbre de voix, que son père ne peut être qu'un autre, pire, un démon. Il devenait responsable, complice, de la même trempe que ceux qui ont poussé sa mère à quitter le foyer. Il devenait à ses yeux un être mauvais, comme tout ceux de son espèce. Depuis le plus jeune âge, l'ennemi n'avait pas d'autre appellation. 

Les monstres étaient toujours considérés comme des démons, pareillement pour le moindre bandit. Dans les contes et les enseignements de leur parent, il n'avait retenu que l'identité des assaillants. 

En grandissant, Jack avait beaucoup appris de ses poursuivants, de qui il fallait se méfier, s'enfuir et se cacher. Cette langue, cette voix, était propre à leur espèce, on ne pouvait pas comprendre ni parler comme on siffloterai un air. 

Le paternel n'avait pas le temps de le rassurer, l'enjeu trop grand, il le prend à bout de bras, mais la réaction est agressive. Le garçon se débat, hurle de toutes ses forces, bombarde ses bras contre les tempes de son père qui gémit et se met en colère. 

- Si tu veux sauver ta mère, tu n'as que moi pour y arriver. Ta petite force contre des démons comme moi, tu crois qu'elle vaut quoi ? Tu vois comment ils sont cruels, tu comprends pourquoi je t'ai protégé d'eux ? je t'ai déjà fait du mal ? Je vais pas t'abandonner là, mais je ne vais certainement pas abandonner ta mère pour tes caprices, tu dois grandir vite, même si c'est dur. Même si je ne le veux pas. Tu as trois secondes pour me dire si tu es prêt à y aller, sinon, tu seras livré à toi-même. 

- Je...

- Deux... un. 

- Sauve-la père.. 

- Ferme les yeux, prend ta respiration. 

Une fois au bord de la rivière scintillante, le cour d'eau se transporte sur tous les corps. Ils s'immergent, fondent lentement en dessous. Entrouverts, leurs pupilles se dilatent de curiosité, accroché par les divers lumières qui les éblouissent. Ils sont entourés par un flux rougeoyant, qui semble indiquer un chemin. Il fait chaud, très chaud, réchauffé par les innombrables petits volcans qui bordent le fond.

De plus en plus brûlant. Ils se laissent tomber sur l'un des volcans, de ces trous ouverts qui émettent une température étouffante. Le petit s'agrippe, panique et manque d'air, il prend la tasse, tousse juste au moment où sont aspirés leur enveloppe au sein du cratère lumineux. 

Soudain ils se retrouvent sous un ciel rouge, un vent chaud. Une terre craquelée et déserte. Sous leur pied : Une pierre rouge, des craquelures où de très faibles coulis de lave s'étendent et s'écoulent le long des roches ; les faisant fondre. Il y a au loin : une cité. Un bel assemblage de beauté, qui défie, s'oppose à l'aridité des lieux à travers une matière blanche. 

On voit un horizon d'ivoire, doux et flottant, sans impureté. Une architecture, une matière blanche qui ondule comme des vagues au ralenti. Les lieux se dessinent à mesure qu'ils s'approchent. Lentement. Le tracé de cette zone mystique, se comporte comme un sable fin emporté par le vent et qui pourtant, aurait décidé de rester en place. Ses formes sont tantôt dévoilées en arcade, circulairement, triangulairement, d'une manière hexagonale ; mais aucun d'entre eux n'échappe à l'art.

Il y a en chaque coin, chaque petit recoin, un portrait sculpté, une dessin camouflée, des œuvres à perte de vue, parfois discrète, parfois géante. La plus marquante est celle de leur arrivé aux portes de la ville.

Chaque pilier du portail aussi haut qu'une montagne, rapporte l'image d'anges encapuchonnés, dont on ne voit pas le visage, aux ailes qui cette fois ne cachent pas la couleur de l'ébène, d'un sombre sans nuance...

Le géniteur déglutit en même temps que son fils, happé par la beauté, la dangerosité de l'inconnu qui cache par sa magnificence, une dangerosité d'ordre divine.

Ils finissent par entrer sous l'arcade géante, le regard porté par l'art qui parsème son plafond, où l'on illustre des femmes ailées qui chutent vers un sol volcanique. Pas à pas, le change sous leur pied, devenant un miroir géant, qui reflète un ciel bleu aux faibles nuages paradisiaques. En haut pourtant, une lune rouge ne cesse d'afficher une atmosphère lugubre.

En dehors, tout semble immense mais lorsque sont passés les premiers pas à l'intérieur, il y a une impression de proximité. Les maisons portent différentes formes mais ne déroge pas à cette matière sablée. Il n'y a pas de nuance de couleur, aucune vie apparente, si ce n'est les tintements de lames sorties de leur fourreau qui se font entendre d'un coup. 

Le père et son fils se retrouvent encerclés au milieu d'une place circulaire, accompagnés d'une fontaine à son centre, de petites marches qu'ils venaient tout juste de franchir. Tout autour, une masse de démons, cornés, ailés, sans que l'on ne puisse apercevoir leur visage, tiennent des petits boucliers qui rayonnent d'une lumière noirâtre, tout comme leur fine lames aux lueurs sanguines. 

Dans ce paquet de monde, il n'y a qu'un seul homme qui sort du lot. Une silhouette masculine, qui lorsqu'il vient à se décapuchonner, exprime par sa seule présence : la peur. Une tête de corbeau, pour un corps d'ange. Puis un ours, qui vient à ses côtés...



( Démon partie III pour bientôt, j'espère que cette mise en bouche vous plaît toujours autant ! Je réduis les chapitres, pour me laisser un peu plus de temps pour élaborer ! Merci pour le vôtre à me lire !) 



Arwan & JackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant