36 - Démon partie III

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Dans l'esprit d'un enfant, quel notion a-t-il du bien et du mal ?

L'espoir, lumière au loin dans les ténèbres, s'efface aussitôt qu'une silhouette a de temps pour se dessiner plus nettement. La moindre apparition d'un être est signe de terreur, alors le pluriel éteint l'étincelle pour de bon. La seule chose qui pousse le père à y croire, à imaginer y croire, à espérer, n'est autre que la rédemption. Il ne lui reste que ça : se racheter de ses erreurs. 

De celle qu'il s'apprête à commettre. Son fils, il y pense, il en rage, n'est-il pas à l'aube de sa vie, ne lui souhaite-t-il pas de devenir meilleur qu'il n'a pu être ? Comment peut-il en arriver là ? Qu'a-t-il fait pour mériter ce sort ? Pourquoi l'accepte-t-il comme étant une tragédie, un destin que l'on ne peut pas empêcher ?

Le regard fixe, il sourit une fois à son fils, d'une main sur sa tête pour le rassurer. Jack calme ses tremblements, renouvelant sa confiance envers lui, chassant ses pensées qui le mène à penser qu'il est peut-être sur le point de le livrer à ces monstres, mais ne dit mot.

C'est le corbeau qui rompt le silence. Au pied des petites marches qui mène à la fontaine où ils sont, la famille décomposée se compose d'une appréhension légitime. Un pas en arrière vif. Brut. Puis contraint de tomber en arrière car une ombre est venu se téléporter à quelques centimètres d'eux. 

La corneille rigole vilainement de son méfait. Sa voix sombre et gutturale comme l'écho d'un timbre grave se porte à leurs oreilles. 

- Il est temps de prendre notre dû. Tu savais que ce jour allait arriver, autant que tu étais certain que ta bien aimée n'allait pas respecter notre accord. 

- S'il vous plaît... ce n'est qu'un enfant, prenez-moi à sa place ! 

- Pour qu'ils vivent seul, sans mère ni père ? 

- NON ! Rendez moi ma femme, que l'enfant puisse-

- Oh voyons... c'est bien mignon de penser encore que tu es dans la position de quémander quoi que ce soit. Nous ne formulons aucune offre, nous imposons. Tu as toutefois un choix par ma clémence. Tu nous remets l'enfant et nous te laissons vivre votre petite vie, toi et ta femme, ou nous vous séparons tous, chacun d'entre vous dans un pandémonium différent, pour réaliser les tâches de nos seigneurs. 

Son père a le regard tombant, ses yeux balancent de droite à gauche, compulsivement. Ses tremblements se rajoutent aux gouttelettes de sueurs qui perlent pour s'écraser contre l'asphalte. Perdu, ses lèvres bougent sans murmures, l'unique sonorité est celle d'une douleur qu'il peine à contenir. 

- Je commence à m'impatienter, on va choisir pour toi si ça continue. exprime le corbeau d'un air las et fatigué.

- Papa... Si ça peut sauver maman, j'irai. grelote le marin d'eau douce.

Les mots ne viennent pas tandis qu'il part en direction du démon-corneille, il laisse sa main tendu vers son enfant, dans le vide, dépassé par les évènements, incapable de l'attraper, de se battre, si bien qu'il le laisse partir sans savoir pourquoi son corps ne réagit plus : l'impuissance à l'état pur. 

- Tu as bien réussi une chose dans ta piètre existence, tu n'as pas conçu un idiot comme fils, lui, il comprend sa situation. Mais ne t'inquiètes pas, nargue-t-il d'un ton hautain. J'ai d'autres projets pour toi et ta '' famille ''.

Les monstres rebroussent chemin, partent dans les ruelles sombres de cette ville vide pour emporter avec eux les derniers instants d'un père et de son fils.

***

Engouffrés au cœur de l'obscurité, tantôt éclairé par les fissures volcaniques qui se traçaient aléatoirement sur le sol, le jeune garçon est désormais résolu, mais empli de regret. Il a l'impression d'avoir abandonné son père pour sa mère, d'avoir fait un choix sans le vouloir... 

Arwan & JackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant