Chapitre 8

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FEVRIER

{ Joshua }

La voiture s'arrête devant la maison en dérapant légèrement sur la neige tassée. Je détache mon regard de la fenêtre. Je ne compte pas faire le moindre effort pour être poli. De toute façon, c'était le deal non ? S'éviter le plus possible, se parler le moins possible. J’entends les portières claquer et soudain, j'appréhende de la revoir. Les pas qui résonnent dans l'allée se calquent sur le rythme de mon cœur.

La porte s’ouvre et mon père passe une tête.

– Josh, viens nous aider pour les bagages.

Je sors à mon tour et tombe nez à nez avec Alix. En jean, baskets et doudoune, je la reconnais à peine. Cela dit, elle est toujours aussi belle. Elle porte un bonnet à pompon d’où s'échappent quelques mèches brunes. Ça pourrait être ridicule, mais sur elle je trouve ça mignon.

Je n’ai pas le temps de respirer, elle me jette son sac dans les bras avec un sourire narquois.

– Merci Joaquim, c'est vraiment aaaadorable de porter les valises.

Elle me lance un regard moqueur avant de rentrer dans la maison en me bousculant. Je me retourne pour lui balancer une réplique acerbe, mais mon père me rappelle à l’ordre et me tend deux autres sacs qui pèsent trois tonnes chacun.

Pendant que je fais des allers-retours, Alix m'observe, accoudée à la balustrade du premier étage. Elle éclate de rire et part dans sa chambre à l'autre bout du couloir. Quelle peste ! Il me faut quatre trajets pour tout ramener à l'intérieur, on dirait que Catherine emménage ici pour deux mois. Je suis en nage, j'ai plus qu'à prendre une douche. Sous le jet d’eau froide, je ferme les yeux. J'ai encore le cœur qui cogne dans ma poitrine. Je ne suis pourtant pas du genre à me fatiguer pour si peu… Le visage d’Alix s'impose dans mon esprit. C'est elle qui me fait ça. Ses grands yeux bruns bordés de longs cils, sa bouche pulpeuse. Je me rappelle la sensation de sa peau sous mes doigts quand j'ai effleuré le creux de son dos le soir du Gala. Je rouvre les yeux et ferme le robinet. Je sors de ma salle de bain en serviette, à la recherche de vêtements propres. Sauf que le sac qui est dans ma chambre, c'est pas le mien. C'est celui de mon père. Et merde.

 Et merde

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{ Alix }

Ma chambre est presque aussi grande que mon appart. Heureusement qu'on ne reste qu'une semaine, faudrait pas que je m'habitue trop... D'habitude, je déballe mes affaires dès que j'arrive quelque part pour me sentir tout de suite chez moi. Je ne suis pas franchement du genre maniaque, j’ai plutôt tendance à m'étaler partout. Mais cette fois, je n'ai même pas ouvert mon sac. Par la fenêtre, on voit les montagnes enneigées. Je dois le reconnaître, le paysage est magnifique. Un chalet de sports d'hiver, c'est vraiment un truc de riche, ça. Je fais quelques photos et les envoie à Zoé.

Je me laisse tomber sur le matelas et contemple le plafond. Allez, une semaine ça passe vite. 

Ça m’a fait bizarre de revoir Joshua… Je ne m'attendais pas à ressentir ça. Je pose une main sur ma poitrine. Mon cœur bat encore à toute vitesse. La voix de Marc me parvient du rez-de-chaussée pour prévenir que le repas est prêt. Joshua s’efface de mon esprit.

Je soupire et sors de la chambre. Je marche dans le couloir sans regarder où je vais, trop occupée à envoyer un message à Zoé pour me plaindre. Je me cogne brutalement contre quelque chose de grand, mouillé et qui sent bon le shampoing. Mon téléphone m'échappe des mains. Je titube sous le choc et trébuche en essayant de retrouver mon équilibre. Joshua me rattrape de justesse en passant un bras autour de ma taille et me ramène contre lui. De sa main libre, il agrippe sa serviette qui est en train de glisser sur ses hanches. En levant les yeux vers son visage, mon regard s’égare malgré moi sur son corps musclé, et je surprends le sien qui s'attarde sur ma bouche.

– Tu peux pas regarder où tu vas ? maugré-t-il.

D’aussi près, je distingue toutes les nuances de ses yeux bleus. Je pourrais m’y perdre pendant des heures. Je me demande comment il s’est fait cette cicatrice sous la lèvre… Une chute de vélo peut-être. Il me serre contre lui comme s'il avait peur que je m’évapore. Son bras autour de moi me donne chaud. Je reprends mes esprits et le repousse.

– Et toi, qu’est-ce que tu fous à moitié à poil dans le couloir ?

Il me relâche.

– Je suis chez moi je te signale, je fais ce que je veux.

Je ne peux pas m'empêcher de le suivre du regard pendant qu'il s'éloigne vers la chambre de Marc, contemplant son dos ciselé, l’arrondi de ses fesses sous la serviette blanche qui enserre sa taille… Alix, merde, tu fous quoi ? Je cherche mon téléphone des yeux. Il a glissé un peu plus loin. Quand je le ramasse, je remarque une fêlure sur l'écran. Génial, il ne manquait plus que ça… Joshua repasse devant moi pendant que je constate les dégâts. Il semble hésiter, mais je le foudroie du regard pour le dissuader de m’adresser la parole. Il entre dans sa chambre et claque la porte.

J'envoie un message furax à Zoé avant de descendre rejoindre ma mère et Marc dans le salon. Je me racle la gorge pour attirer leur attention.

– Ah, Alix ! Alors, ta chambre te convient ?

– C’est pas mal.

Ma mère me fait les gros yeux. Marc éclate de rire.

– Tu peux donner ton avis sincère Alix, je n’ai pas envie que tu fasses semblant.

– Tu veux mon avis ? Je vais te le donner. Je trouve ça ridicule de nous forcer à venir ici. Si tu veux épouser ma mère, grand bien vous fasse. Mais si tu crois que ça fera de nous une famille, tu te fourres le doigt dans l'œil jusqu’au coude.

– Alix ! s’insurge ma mère.

Marc lui prend la main et me regarde tranquillement, sans une once de colère ou de déception. Son air calme m’énerve au plus haut point.

– Je ne suis pas naïf, je sais que ça ne se fera pas du jour au lendemain. Mais il faut bien commencer quelque part non ? Je suis sûr que passer un peu de temps tous ensemble ne peut être que bénéfique.

Je me laisse tomber dans un fauteuil.

– C’est pas comme si j’avais le choix, marmonné-je.

Marc fronce les sourcils.

– Si tu penses à ton école, sache que je ne la paie pas pour obtenir ta reconnaissance ou ta sympathie. Je le fais parce que ça me fait plaisir de t’aider. Et rassure-toi, je ne vais pas couper ton financement juste parce que tu es malpolie.

Il se penche vers moi avec un sourire.

– Je paie l'école de Josh et je n’ai pas l’intention de te traiter différemment de lui sous prétexte que tu n'es pas ma vraie fille. Je considère que les enfants ne doivent rien à leurs parents. Tu n’as donc aucune dette et aucune obligation envers moi.

Je reste scotchée.

– Oh euh… Je… Je ne sais pas quoi dire. Merci.

– Je t’en prie. 

Je me sens vraiment nulle de lui avoir mal parlé. Il est pas si horrible que ça, finalement. 

– Et le chalet n'est pas si mal… 

J'échange un regard avec ma mère qui m'encourage d'un signe de tête.

– On… on n’a jamais eu la chance d’avoir… tout ça. Donc euh… merci. C'est plutôt cool.

Joshua arrive à son tour, et je remarque à quel point il ressemble à son père. Les mêmes yeux de couleur changeante, les mêmes boucles, même si celles de Marc sont grisonnantes. Je me demande si je l’ai mal jugé lui aussi… Il lève la tête vers moi et nos regards se croisent. Ses yeux sont d’un gris acier glacial. Je n’y vois que du mépris et de l’arrogance. Finalement, il ne ressemble pas tant que ça à son père.

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The Strange Effect On MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant