Chapitre 21

70 7 0
                                    

TW : hopital, maladie.

{ Alix }

L'atelier de la résidence d'Anna est une merveille. Deux amis de l'école m'ont aidé à déménager une partie de mes affaires. J'y ai rapporté presque tout mon matériel pour peindre, mais je refuse de m'y installer pour vivre et de perdre mon indépendance. Zoé m'a refilé un matelas gonflable qui fait amplement l'affaire pour dormir à l’atelier, si besoin. Je ne veux pas lâcher le studio de ma grand-mère qui reste mon refuge. Joshua pourrait très bien me mettre à la porte de la résidence en claquant des doigts...

Dans moins d'un mois, je pars le rejoindre chez ses cousins. J'ai hâte de le revoir. J'ai tout le temps ce creux dans la poitrine qui me gêne pour respirer pleinement. Je passe toutes mes journées à peindre en écoutant en boucle la playlist qu’on a créée ensemble avec Josh. Dire qu’il y a encore quelques mois, je le haïssais… Je n’ai jamais vraiment vécu de début de relation comme ça. D’habitude si la personne me plaît, je le ramène chez moi et basta. Mais cette fois, j'apprécie tout ce temps passé à flirter. C'est comme construire un mur en plaçant les briques une par une. Quand ça sera bien solide, je pourrais grimper dessus sans risque de me casser la gueule. 

Je suis interrompue dans mon travail par un appel de Marc. 

Salut Alix, tu es chez toi ? Ta grand-mère a fait un malaise, on est aux urgences avec ta mère. 

Un poids s'enfonce violemment dans mon estomac. Je lâche mes pinceaux et commence à enfiler mes chaussures en coinçant le téléphone contre mon épaule.

— Je suis à la résidence.

Envoie l'adresse sur le téléphone de David.

— C'est grave ?

On attend les résultats des examens. 

— Oh, d'accord…

Je t'envoie David, à tout de suite.

Je rassemble mes affaires. Mes mains tremblent, laissant échapper mes clés à plusieurs reprises jusqu'à ce que j'arrive enfin à verrouiller la porte. Je dévale les escaliers et une minute plus tard je suis sur le trottoir en train de guetter la voiture de David. Je n’arrête pas de vérifier mon téléphone, craignant de recevoir la pire nouvelle. 

 
Quand je retrouve ma mère et Marc à l'hôpital,  ils ne savent toujours pas ce que ma grand-mère a exactement. Marc s'énerve contre les infirmières. Il tente d'utiliser son nom pour accélérer les choses, mais se heurte à un mur impassible. Je m'isole dans les toilettes et appelle Joshua. J’ai du mal à retenir mes larmes, il comprend tout de suite que quelque chose ne va pas.

Alix ? Qu'est-ce qui se passe ? 

Je tente de lui expliquer la situation. Je bafouille et les mots se bousculent dans ma bouche. 

Tu veux que je vienne ?

— Tu vas pas prendre le train maintenant… 

Réponds, tu veux que je vienne ou pas ?

— On va se faire griller.

On s’en fout ! 

J’étouffe un sanglot.

Bon, j'arrive.

Il raccroche sans même me laisser le temps de répondre. Je me laisse glisser au sol et enfouis mon visage entre mes bras pour pleurer jusqu’à ce que le flot se tarisse de lui-même.

Une fois calmée, je rejoins ma mère qui est en train de discuter avec les médecins. L'état de ma grand-mère est stable, mais ils ne savent pas ce qui a provoqué le malaise. Ils veulent son accord pour faire des examens complémentaires. Marc est sorti fumer, je fais les cent pas dans le couloir pendant que ma mère dévalise le distributeur. Elle mange toujours quand elle est stressée. Moi c’est plutôt l’inverse. Les minutes s'écoulent lentement, j'ai le temps de tester tous les fauteuils de la salle d'attente. À cette heure-ci, dans cette partie de l'hôpital, il n'y a pas grand monde. 

En revenant de sa pause clope, Marc enlace ma mère pour la réconforter. Je reste prostrée sur mon siège tandis qu’elle sanglote sur son épaule. Marc relève la tête vers moi puis ouvre les bras et fait un geste de la main. J’accepte sans rechigner cette invitation silencieuse et je viens me blottir contre lui malgré l’odeur de tabac qui imprègne ses vêtements et me gratte la gorge. On se serre les uns contre les autres. Je réalise à quel point ça m’a manqué de ne plus me sentir en famille pendant toutes ces années.

***

Il est presque minuit quand je reçois un message de Joshua pour me dire qu’il est arrivé à la gare. Je lui envoie le nom et l'adresse de l'hôpital. Lorsqu’il apparaît au bout du couloir, Marc et ma mère le regardent, abasourdis. J'ai complètement oublié de les prévenir. 

— Josh ? Mais qu'est-ce que tu fais là ? demande Marc.

Mon cerveau est vide, je ne sais pas comment gérer la situation. J'envoie des signaux de détresse occulaires à Josh en espérant qu’il ait acquis le don de télépathie pendant le trajet.

— C'est Alix qui m'a prévenu. Je suis venu aussi vite que j'ai pu…

Ma mère se lève à son tour et prend Joshua dans ses bras.

— C'est très gentil d'être venu, merci, Joshua.

— Je t'en prie Cathy, c'est normal.

Marc lève un sourcil suspicieux et nous regarde à tour de rôle.

— Tu es venu exprès de Londres ?

— J'ai pas le droit de venir soutenir ma famille dans un moment difficile ?

Il parle d’un ton tellement convaincant que même moi je pourrais croire à ses mensonges.

— Si… si, bien sûr.

Pendant que son père se rassoit à côté de ma mère, Joshua me serre brièvement la main. Je n’ose pas le prendre dans mes bras, ni même le regarder, mais sa présence me fait un bien fou.

***

Vers 1h du matin, on a enfin les résultats. Le malaise est sans gravité, plus de peur que de mal, mais les médecins préfèrent garder ma grand-mère en observation. On ne peut rien faire de plus.

— Joshua, tu veux bien raccompagner ta sœur chez elle ? On ne va pas tarder à rentrer nous aussi. 

— Bien sûr, pas de problème.

J'embrasse ma mère puis on sort attendre David sur le trottoir. Je me ronge les ongles sans oser m’approcher de Joshua à moins d’un mètre.

— Tu crois qu'ils se doutent de quelque chose ? chuchoté-je.

— J'espère pas…

Il jette un regard par-dessus mon épaule avant de me sourire. Dans la voiture, je n’ose pas lui prendre la main malgré l’envie impérieuse de toucher sa peau qui me dévore de l'intérieur. Je surprends le regard de David dans le rétroviseur. Est-ce qu’on peut lui faire confiance ?

Joshua me raccompagne jusqu'à la porte de mon immeuble pendant que David laisse le moteur tourner. 

— Tu veux que je reste ?

Je regarde vers la berline qui attend le long du trottoir. 

— Je… Oui, j'aimerais bien. Si ça ne te dérange pas…

Josh fait demi-tour et discute quelques minutes avec David puis lui adresse un dernier signe de la main. La voiture démarre et disparaît dans la nuit.

— Ne t'inquiète pas, me rassure Josh, il ne dira rien.

Je tape mon code et l'entraîne à l'intérieur. A l'abri des regards, je peux enfin l'enlacer et me blottir contre lui sans crainte d'être surpris. Il me serre dans ses bras. La chaleur de son corps et son odeur apaisante m’enveloppent.

— Merci, soufflé-je. Merci d'être là.

__________________________________________

Si tu as aimé ce chapitre, appuie sur la petite étoile pour m'envoyer du love. Tu peux aussi t'abonner pour m'encourager ! ❤️

The Strange Effect On MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant