Ça fait une bonne petite heure que je travaille sur le devoir que Madame Johnson nous a donné. Pour faire bonne impression, j'ai intérêt à le rendre en temps et en heure.
J'ai rédigé six pages de dissertation sur une création qui est censée améliorer notre quotidien. J'ai choisi d'imaginer un robot qui peut prendre n'importe quelle apparence pour s'occuper des personnes âgées et leur tenir compagnie.
J'enregistre mon travail, puis je l'envoie sur la boîte mail de Madame Johnson. Je ferme mon ordinateur, puis je vais me poser sur mon lit. Je ferme les yeux et manque de m'endormir lorsque je reçois une notification.
J'ai d'abord cru que cela provenait de mon téléphone, mais j'ai compris par la suite que c'était la sonnerie de mon ordinateur. Je me lève et m'avance vers mon bureau. Je soulève l'écran, puis je vois « Nouveau message - Atlanta Johnson ».
Mon coeur s'arrête. J'ai l'impression que c'est irréel. Je cligne plusieurs fois des yeux, je me pince, mais rien à faire la notification est toujours là. Mon coeur se remet à battre. Il bat trop fort et trop vite. Il s'accompagne de papillons dans le ventre : un mélange de stress et d'excitation.
Je n'ai pas le choix. Que j'ouvre son message ou non, il a quand même été envoyé. Je prends une grande inspiration. Je clique sur la notification qui me redirige vers ma boîte mail. Puis, je vois un petit paragraphe : « Je vois que vous faites des efforts. Vous êtes la première élève à m'avoir rendu ce devoir. Vous serez récompensée. Rendez-vous dans deux heures en bas de chez vous. Je passe vous prendre. J'ai une Mini Cooper noire. »
Mon dieu. Je n'y crois pas. J'avais déjà pas le choix d'ouvrir son message, mais alors là, j'ai encore moins le choix que d'aller à ce foutu rendez-vous. Je prépare déjà ma vengeance : elle se trouve dans ma garde robe.
Il est 21h, je n'ai aucune nouvelle de Madame Johnson. Si ça se trouve elle s'est foutu de moi ! Elle en serait bien capable cette vicieuse.
Inutile de me regarder dans le miroir une seconde de plus et me remplir d'illusion. Je retourne m'asseoir au bord de mon lit, lorsque j'entends ma mère m'appeler :
- Kia ! crie-t-elle du rez-de-chaussée pour se faire entendre.
- Quoi ? demandé-je en retour au moins aussi fort qu'elle.
Pas de réponse. À chaque fois elle fait ça. Elle m'appelle, je réponds, puis elle ne dit plus rien. Je finis toujours par descendre. Elle pourrait m'envoyer un message à la place. Cela marcherait tout aussi bien.
Je dévale l'escalier à toute vitesse, et lorsque que j'arrive dans le salon, ma mère discute avec Madame Johnson.
Quoi ? Mais qu'est-ce qu'elle fait là ? Je pensais que si elle m'avait précisé le modèle de sa voiture, c'était pour que je la rejoigne directement dehors ! Je fusille ma prof du regard, tandis qu'elle esquisse un petit sourire en voyant ma sublime robe rouge moulante.
- Tu ne m'avais pas dit que tu sortais avec ta copine ce soir, dit ma mère.
Non mais ! On aura tout vu ici. Voilà qu'elle se fait passer pour mon amie maintenant. Heureusement que je sais parfaitement improviser.
- Si maman, avec Atlanta on avait prévu d'aller au Spritz. On rentrera pas trop tard, promis.
Ce qui me fait plaisir c'est que j'ai de quoi mettre en rogne Madame Johnson. Elle ne s'attendait sûrement pas à ce que je l'appelle par son prénom.
- Bon, alors amusez-vous bien les filles !
- Merci maman ! Il faut que j'aille chercher mon sac, on se rejoint dans la voiture.
- Ça marche. Merci beaucoup Madame Marinato. Passez une bonne soirée, lance ma prof d'anglais.
Je passe en vitesse dans ma chambre prendre mon sac à main, puis je rejoins Madame Johnson dans sa Mini Cooper.
- Plus jamais vous ne me tutoyez ou même m'appelez par mon prénom, Miss Marinato, me suis-je bien fait comprendre ? me gronde-t-elle.
- Vous plaisantez j'espère ? C'est vous qui débarquez chez moi en vous faisant passer pour une de mes amies. Je n'avais aucune envie de vous faire entrer dans mon intimité comme ça ! m'exclamé-je dans la plus grande des colères.
Elle m'examine de haut en bas.
- Je ne pense pas qu'on puisse encore parler d'intimité dans une tenue pareille. Puis, dois-je vous rappeler que ma main droite connait parfaitement la forme de vos fesses ?
- Dois-je vous rappeler que ma langue connaît parfaitement le goût de votre cou, et que mes oreilles connaissent aussi bien la tonalité de vos gémissements ? répliqué-je en espérant l'avoir mise K.O.
Je la vois rouler des yeux et avoir les mains qui deviennent moites. Elle ne décroche pas un mot durant le reste de la route. Elle a l'air si concentrée. Madame Johnson se gare sur le parking, descend, puis m'ouvre la portière.
- Faites-moi goûter votre cocktail préféré, m'ordonne-t-elle.
On entre dans le bar, puis on s'installe à une petite table entourée d'une banquette dans le fond de la salle. Au bout de quelques instants, un serveur vient prendre notre commande.
- Oh salut Kiara ! Quelle surprise !
- Hey Nathan ! réponds-je au serveur.
- Je ne t'ai pas vu la semaine dernière... s'inquiète-t-il.
- C'est parce que je suis allée au Banana Split.
- Quoi ? Sérieux ? Mais il n'y a que des trentenaires là-bas, plaisante Nathan.
- Pour y être allée, je peux te dire qu'il n'y a que des vieux en effet, répliqué-je en faisant allusion à Madame Johnson.
- Hé ! Je ne suis pas d'accord ! réagit-elle.
Ma ruse a marché ! Elle s'est sentie concernée. Nathan la regarde comme si c'était une étrangère.
- C'est Atlanta, une amie du lycée, précisé-je.
Le visage de Nathan s'adoucit, il semble moins perplexe. Pourtant Madame Johnson, elle, me lance un regard si noir, qu'on dirait qu'elle veut m'assassiner.
- Je vous sers quoi du coup ? Kia, un spritz. Et pour toi ? demande-t-il sans savoir qu'il s'adresse à quelqu'un de plus vieux que lui.
- La même chose, merci, répond-elle.
Nathan range son bloc note et retourne au bar préparer nos cocktails. Pendant ce temps, Madame Johnson me pince la hanche.
- Aïe ! m'exclamé-je. C'est en quel honneur ?
- Tu ne m'obéis pas ! Je t'avais pourtant bien dit dans la voiture, de me plus me tutoyer, ni m'appeler par mon prénom, me gronde-t-elle de nouveau.
Je la regarde dans les yeux quelques secondes. Elle fait de même. Ses pupilles se dilatent, alors que je lui murmure effrontément son prénom :
- Atlanta.

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Spritz
RomanceKiara, risque de mettre en péril son avenir scolaire si elle continue de se comporter de manière aussi insolente en classe. Elle fait mauvaise impression au près d'Atlanta, sa professeur d'anglais qui n'hésite pas à la remettre à sa place. De cette...